Les employé-e-s de l'État se mobilisent pour défendre leur retraite

Dans le cadre d’un plan de recapitalisation de la Caisse de pension de l’Etat de Vaud (CPEV), le gouvernement cantonal prévoit une mise à contribution massive des quelque 30 000 employé·e·s de la fonction publique. Pour faire obstacle à cette nouvelle attaque contre les conditions de travail et de retraite, la mobilisation syndicale est à l’ordre du jour.

 

Une modification du droit fédéral décidée en décembre 2010 par la majorité bourgeoise du parlement – au moment même où les caisses de pension du pays perdaient des milliards sur les marchés boursiers en raison de la crise – impose aux caisses publiques d’atteindre un taux de couverture de 80 % d’ici à 2052, à laquelle devra s’ajouter une réserve pour fluctuation de valeur. Un taux de couverture de 100 % signifie qu’une caisse de pension peut verser d’un seul coup à l’ensemble de ses as­su­ré·e·s l’entier des prestations de retraites ainsi que les prestations de libre passage des actifs.

Or, comme une collectivité publique ne peut pas disparaître du jour au lendemain à l’image d’une entreprise privée en faillite, l’exigence d’un taux de couverture élevé relève d’une décision purement politique, destinée à accroître la part des retraites placées sur les marchés financiers, à inciter les autorités cantonales à revoir les prestations à la baisse et à faciliter la privatisation de certains secteurs du service public (ainsi, en 2007, l’Etat de Vaud avait tenté de se défaire du Service des automobiles et de la navigation, un projet qui avait échoué en votation populaire).

 

Sacrifices

Aujourd’hui, par un procédé comparable à celui mis en œuvre par le gouvernement genevois ces derniers mois, le Conseil d’Etat refuse d’injecter dans la caisse de pension environ 4,5 milliards sur quarante ans, somme qui permettrait de maintenir les prestations promises aux employé·e·s, tout en atteignant le taux de couverture exigé. Pourtant, avec un endettement quasiment symbolique, le canton de Vaud connaît la situation financière la plus favorable de son histoire. Le gouvernement cantonal se livre même à des jeux d’écriture pour assombrir cette situation idyllique – en escamotant par exemple les bénéfices de la Banque cantonale vaudoise (BCV) du bilan comptable de l’Etat – afin de mieux justifier les sacrifices demandés à ses employés, tel Harpagon dissimulant sa cassette.

Ces sacrifices sont massifs : avec le plan prévu par P.-Y. Maillard, P. Broulis et leurs cinq collègues, les rentes du IIe pilier d’un employé qui commence sa carrière aujourd’hui baisserait de quelque 25 %, et la durée de cotisation nécessaire pour obtenir la rente pleine serait allongée de deux ans. Cette dernière mesure ciblerait tout spécialement les femmes, dont les carrières sont statistiquement moins longues que celles des hommes et qui, pour cette raison, touchent déjà des rentes nettement moins élevées.

En outre, les salaires de tous les employé·e·s baisseraient, car leur cotisation à la caisse de pensions serait augmentée de 1 %. Pour justifier ces attaques, la droite vaudoise recourt à un argument un brin éculé : les « fonctionnaires » seraient des « privilégiés » pour lesquels les « contribuables-salariés-du-privé » n’auraient pas à passer à la caisse. Cette touchante homélie occulte pourtant un fait central : les vrais privilégiés dans le canton sont les multinationales qui, à l’image du géant minier brésilien Vale, ont bénéficié ces dernières années de gigantesques abattements fiscaux, comme l’a montré ces derniers mois la polémique sur les « statuts fiscaux spéciaux », qui permettent aux multinationales étrangères de payer un impôt sur le bénéfice de 11 %, au lieu des 23 % normalement prévus. Ainsi, s’agissant de ces seuls « statuts fiscaux spéciaux » dans le canton de Vaud, ce ne sont pas 4,5 milliards sur quarante ans qui sont en jeu, mais plus d’un milliard par année, comme l’a révélé une enquête de la RTS (émission « TTC », 8.10.2012).

 

Mobilisation

Face à cette attaque brutale, la mobilisation syndicale monte en puissance. Le 4 février dernier, une première assemblée convoquée par les syndicats SSP, SUD et FSF a réuni quelque 400 sala­rié·e·s. Depuis, les réunions sur les lieux de travail (collèges, gymnases, CHUV, Université, Service de protection de la jeunesse, etc.) se sont multipliées, débouchant sur un préavis de grève et de manifestation pour le 7 mars. La Fédération des Sociétés de Fonctionnaires (FSF), d’ordinaire encline à signer des accords au rabais avec le Conseil d’Etat en raison d’une longue tradition corporatiste, est aujourd’hui poussée à la mobilisation par une base en colère, notamment par les gendarmes vaudois, qui voient leur retraite passer de 58 à 60 ans, ou encore par les enseignant·e·s du primaire, qui seront très affectés par le nouveau mode de calcul de la rente, effectué sur l’ensemble de la carrière et non plus sur les trois dernières années de travail. La journée du 7 mars doit être envisagée comme un premier pas unitaire et massif, en vue de la construction d’un rapport de forces qui oblige le Conseil d’Etat à inscrire à son budget ordinaire les sommes nécessaires à la recapitalisation de la caisse de pension, sans aucune péjoration pour celles et ceux qui assurent au quotidien la bonne marche du service public.

 

Hadrien Buclin


À Lausanne, la majorité rose-verte refuse la gratuité des TL pour les jeunes

 

Avec seulement 7 absentions dans les rangs du PS et des Verts, et une large majorité de refus, le Conseil communal de Lausanne a rejeté une motion du groupe La Gauche demandant à ce que la Ville paie à tous les jeunes en formation ou au chômage jusqu’à 25 ans un abonnement aux transports publics (TL). Cette mesure visait à la fois un objectif social (un financement de l’abonnement par l’impôt tient compte de la capacité contributive de chacun), et écologique (les villes où la gratuité a été mise en œuvre, par exemple Aubagne, ont vu le recours à la voiture diminuer). En outre, La Gauche proposait de récupérer au niveau communal le point d’impôt baissé par le canton, ce qui aurait assuré le financement de cette mesure.

HB