Votations du 9 juin
Votations du 9 juin : Non aux mesures urgentes sur la loi sur l'asile
Le mouvement solidaritéS appelle vigoureusement la population suisse à s’opposer à un énième durcissement de la Loi sur l’asile. Voici nos arguments.
Simonetta Somaruga, ministre socialiste en charge du dossier de l’asile, prétend aujourd’hui agir au nom de la raison. A l’en croire, les modifications urgentes de la Loi sur l’asile – déjà entrées en vigueur, malgré le référendum – seraient de nature à aider les requérant·e·s en leur garantissant une réponse rapide. Ainsi donc, en urgence, le Conseil fédéral aurait senti le besoin de venir au secours des demandeurs·euses d’asile engagé·e·s dans des procédures trop longues. Mais de qui se moque-t-on ? Tout le monde le sait, ces mesures n’ont qu’un but : renvoyer le plus possible et le plus vite possible les demandeurs·euses d’asile et empêcher par tous les moyens leur venue. Madame la Conseillère fédérale, assumez vos positions et vos pratiques et n’essayez pas de nous mener en bateau.
Des mesures particulièrement cruelles
Ces nouveaux durcissements vont dans le sens de la discrimination, de la criminalisation et de l’exclusion des demandeurs·euses d’asile. Contrairement à ce qu’affirme Simoneta Sommaruga qui se répand dans la presse la main sur le cœur, ils ne permettent ni d’accélérer ni d’alléger les démarches d’asile. Bien au contraire, ils entravent davantage l’accès à une procédure juste et équitable pour les personnes victimes de persécutions et de violations des droits humains, ce qui entraînera de nombreux recours. Ces mesures, particulièrement cruelles, ciblent les personnes demandeuses d’asile les plus fragilisées et les plus nécessiteuses d’une protection. Par ailleurs, elles touchent à la définition même du statut de réfugié telle que défini par la Convention de Genève.
La première mesure inscrit dans la loi l’impossibilité d’obtenir le statut de réfugié aux objecteurs de conscience ayant refusé de servir ou ayant déserté l’armée de leur pays, même s’il s’agit de régimes dictatoriaux. De ce fait, ces personnes victimes (ou menacées) d’emprisonnement et de persécutions telles que la torture ou la peine de mort, ne pourront plus recevoir la protection de la Suisse au travers du statut de réfugié. Sur les sites d’ELISA-ASILE et de Stop Exclusion (ou http://issuu.com/elisaasile/docs/parcours_du_requerant_final), on peut suivre les douze étapes du parcours d’un objecteur érythréen, de sa décision de désertion au refus de l’asile en Suisse, en passant par les conséquences dramatiques du refus des ambassades suisses.
Par la fermeture des ambassades suisses aux demandes d’asile, les requérant·e·s n’auront plus d’autres choix que de venir jusqu’en Suisse pour déposer leur demandes d’asile. Cette mesure incohérente et criminelle touche particulièrement les femmes, les enfants et les personnes les plus fragilisées n’ayant ni les moyens financiers, ni la capacité physique ou morale de traverser les frontières pour effectuer un voyage périlleux jusqu’en Suisse. En effet, cette mesure incite les personnes à employer des voix de passages illégaux et à s’exposer à des risques de traitements inhumains et dégradants, et bien trop souvent au détriment de leur vie.
Une justice arbitraire
Enfin l’ouverture de centres spéciaux pour les requérant·e·s d’asile ayant un comportement dérangeant, illustre la méfiance exacerbée à l’égard de cette population. En effet, les personnes demandeuses d’asile n’ayant commis aucun délit selon la loi pénale suisse en vigueur, mais considérées (selon quels critères ?) comme « récalcitrantes », pourront être placées dans des centres spécifiques sans aucune forme de procès. Ceci ouvre la voie à de nombreux abus et à une justice arbitraire. La mise en place de cette législation d’exception met en péril des droits fondamentaux et universels, notamment le principe de la non-discrimination.
Ce processus de démantèlement du droit d’asile, visant à tout prix à rendre notre pays moins attractif, affaiblit les fondements de l’Etat de droit, pilier de la démocratie. De ce fait, il menace l’ensemble des populations fragilisées ou marginalisées, telles que les employé·e·s sans autorisation de séjour ou les mendiant·e·s, elles-mêmes menacées de discrimination, de stigmatisation et de traitements qui entravent la dignité et de respect de la personne.
L’indignation monte
Dans le Collectif StopExclusion, qui coordonne la campagne de votation, des jeunes organisent avec une belle énergie des actions de sensibilisation telles que des flash mob spectaculaires (naufrages de barques pleines de réfugié·e·s ou mise en prison des récalcitrants, voir page 17). Des lectures publiques d’auteur·e·s du recueil An deiner statt – A ta place (www.art-et-politique.ch), relatant le sort indigne réservé aux réfugié·e·s en Suisse contribuent également à faire monter l’indignation de la population.
De toutes façons, quel que soit le résultat de cette votation, le but de notre engagement est de débusquer les préjugés et les mensonges répandus dans l’opinion publique 1 et d’affirmer haut et fort, dans un pays qui s’enfonce dans la peur et l’exclusion, notre solidarité internationaliste.
Votons NON aux mesures urgentes sur la Loi sur l’asile.
Angèle Bilemjian et Maryelle Budry
- A ce propos, voir l’excellent instrument produit par Vivre ensemble : Il y a ce qu’on dit sur les réfugiés. Et il y a la réalité, www.asile.ch/prejuges