Imposons les héritages pour l'AVS et les collectivités publiques!

En Suisse, ces dernières années, le capital et les nantis ont été arrosés de cadeaux fiscaux. Les inégalités explosent : 1 % de la population possède autant que les autres 99 %. Le revenu d’un salarié est sujet à l’impôt, alors que les fortunes reçues par héritage échappent souvent totalement au fisc. L’impôt sur les successions combat cette injustice et va modestement à contre-courant de la croissance des inégalités.

Selon l’initiative populaire fédérale « Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS », à laquelle solidaritéS appelle à voter oui ce 14 juin, les héritages seraient taxés à un taux fixe de 20 % dès 2 millions. Sur le plan international, on reste en-deçà de l’Allemagne (30 %), de la France (40 %), de la Grande-Bretagne (40 %) et des USA (49 % bientôt 28 %).

Cette initiative mettrait de l’ordre dans 26 législations cantonales différentes, produits désastreux d’une concurrence fiscale intercantonale effrénée, délétère pour les finances des collectivités et pour les prestations à la population.

Un tiers des recettes fiscales issues de l’imposition fédérale des héritages, soit environ un milliard, irait aux cantons, comme compensation du manque à gagner découlant de la fin des impôts cantonaux subsistants. Deux tiers des recettes alimenteraient le fonds AVS, un renforcement utile de cette assurance sociale essentielle, évitant le recours à un financement antisocial via la TVA.

Avec l’initiative, la part d’héritage dépassant 2 millions serait seule imposée. Chaque conjoint d’un couple pouvant faire valoir cette franchise, des parents peuvent léguer à leurs enfants jusqu’à 4 millions nets d’impôt !

Les propriétaires de maisons familiales n’ont rien à craindre de l’impôt sur les successions : une villa valant 5 millions, avec une hypothèque de 1 million, pourrait être léguée sans être taxée. La réglementation de l’imposition des donations est généreuse. Les legs inférieurs à 20 000 francs par an et par donataire sont exemptés. Cette mesure permet aux parents de transférer à leurs enfants des sommes significatives, par ex. pour leur formation.

Quant aux petites entreprises, selon l’initiative, le Parlement devra introduire des allègements, afin de ne pas menacer leur existence, ni leurs places de travail. Les initiants ont imaginé une franchise de 50 millions et un taux d’imposition à 5 %. Les partis bourgeois voteraient évidemment aux Chambres des réductions généreuses. La succession de toutes les PME familiales restera donc exonérée d’impôt.

Rien de confiscatoire donc, à souligner en outre que l’impôt sur les successions n’est pas un projet de gauche, malgré les hauts cris que pousse toute la droite à la veille de ce vote. Des milieux libéraux l’ont souvent soutenu. Ainsi, en 1971, le Parti libéral-démocrate allemand préconisait une taxe sur l’héritage avec des taux atteignant 75 %. En Suisse, il y a une douzaine d’années, c’est le Conseiller fédéral radical Villiger qui prônait un impôt fédéral sur les successions.

 

Mais aujourd’hui, dire oui à cette initiative, c’est voter pour plus d’égalité et refuser la gangrène de la concurrence fiscale et de la course aux caisses vides qu’imposent la droite et le patronat pour mieux sabrer le service public et le social. 

 

Pierre Vanek