Unité Populaire

Unité Populaire : Le défi de gauche à la reddition de Tsipras

Nous publions ci-dessous des extraits traduits de l’interview à Sotiris Martalis, membre de la direction de DEA (Gauche ouvrière internationaliste), du Comité central de Syriza et partisan de la Plateforme de gauche, parue dans Socialist Worker le 25 août dernier [Réd.]

Qu’est-ce qui a amené à la création d’Unité populaire  ?

 

Tsipras a annoncé la démission de son gouvernement et demandé la tenue d’élections avant le congrès de Syriza, faisant fi des décisions du parti. Cela voulait dire qu’il excluerait de la liste électorale de son parti tous les député·e·s qui avaient voté contre le troisième mémorandum ou s’étaient abstenus. 25 député·e·s ont présenté leur démission au président du Parlement et annoncé qu’ils avaient formé un nouveau groupement dénommé Unité populaire. Quatre membres de la Plateforme de gauche ont démissionné du bureau politique de Syriza et accusent la direction de ne pas suivre les décisions du parti.

 

 

Qui fait partie d’Unité populaire  ?

 

Le plus gros des troupes provient de Syriza. Mais le processus n’est pas terminé. Nous ne savons pas exactement quelles composantes participeront à Unité populaire. Nous ne savons pas non plus s’il s’agira d’un nouveau parti, d’un front ou d’une fédération d’organisations.

Le fondement d’Unité populaire sera toute la Plateforme de gauche – c’est-à-dire le Courant de gauche (mené par Lafazanis et d’autres) et le Red Network (établi par DEA) – et, je l’espère, une partie de ce qu’il est convenu d’appeler le Groupe 53-Plus (les dissident·e·s parmi l’actuelle majorité de Syriza qui appuient Tsipras) qui ne sont pas d’accord avec la décision de la direction du parti.

 

 

Des groupements de gauche n’appartenant pas à Syriza se joindront-ils à Unité populaire  ?

 

Deux réunions ont déjà eu lieu auxquelles 13 organisations et groupes ont participé, dont Xekinima, une section du Comité pour une Internationale ouvrière (CWI), Paremvasi (qui signifie Intervention en français), et certains anciens sociaux-­démocrates comme DIKKI (le Mouvement social-démocrate).

La plupart d’entre eux collaboreront à Unité populaire, dont deux ou trois groupes du Front de la gauche anticapitaliste d’Antarsya : ARAN (Recomposition de gauche), deuxième groupement le plus grand d’Antarsya et ARAS (Rassemblement anticapitaliste de gauche).

Les groupes d’Antarsya qui n’ont pas décidé de rejoindre Unité populaire comprennent NAR (le Nouveau courant de gauche) ; SEK, le Parti socialiste des travailleurs, qui fait partie de la Tendance Socialiste Internationale (IST)  ; et OKDE-Spartakos, la section grecque de la Quatrième Internationale. Toutefois, la participation de groupes importants d’Antarsya à Unité populaire leur mettra la pression.

 

 

Quelle position le KKE (Parti communiste grec) a-t-il prise par rapport à Unité populaire  ?

 

Dès le premier jour, le KKE a attaqué Unité populaire, parce que ce groupement, selon lui, est la réplique de Syriza et qu’il poursuivra les mêmes politiques. Cependant, Unité populaire met également la pression sur le KKE. Deux petites factions du KKE participent déjà au processus : Lutte des travailleurs et Kordatos, du nom d’un historien grec de gauche, membre du parti.

 

 

Quelle est la position des dirigeant·e·s de Syriza  ?

 

Leur point de vue peut être résumé ainsi : « Nous nous battons, mais ils nous font du chantage, et nous nous voyons obligés de faire ceci, quand bien même nous n’y croyons pas»«nous avons changé la situation en Europe. Nous avons ouvert le débat sur la solidarité et la fin de l’austérité, et nous attendons donc de voir les résultats» ; et enfin «Nos députés nous ont renversés parce qu’ils n’ont pas voté pour le mémorandum, et nous sommes donc obligés de faire de nouvelles élections. »

Ils accusent Unité populaire d’avoir le même plan que le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, parce que celui-ci préconise un Grexit de la zone euro.

En réalité, Tsipras avait l’accord des autorités européennes pour convoquer de nouvelles élections. La classe capitaliste grecque et les Européens n’ont pas d’autre choix que d’agir par le biais de Tsipras dont la cote de popularité dans le pays est encore très élevée et qui gagnera les prochaines élections.

Tsipras perdra une partie des votes de gauche de Syriza, mais je ne peux vous dire combien. Unité populaire est une nouvelle formation et n’a donc ni ressource, ni siège, ni argent, en d’autres termes, rien. La participation aux élections va être très difficile, mais je pense qu’Unité populaire dépassera les 3  % nécessaires pour faire élire des député·e·s au Parlement.

Pour sa part, Tsipras pourrait ne pas obtenir la majorité absolue et se voir forcé de former une coalition avec les ANEL (parti des Grecs indépendants), à savoir les conservateurs qui faisaient partie de la coalition précédente. Autrement, il pourrait former une coalition avec Potami, un parti modéré pro-­austérité, ou avec les sociaux démocrates du PASOK.

C’est ce que prévoyait depuis le début la classe dirigeante : pousser Syriza à former un gouvernement d’unité nationale avec les sociaux démocrates. Si une telle alliance se fait, ce sera mieux pour les capitalistes.

 

 

Comment Unité populaire se prépare aux élections  ?

 

Une lutte a commencé dans les sections locales de Syriza. Nous allons voir combien vont se joindre à nous, combien resteront avec la direction, et combien rentreront simplement chez eux. Nous allons convoquer des réunions et des assemblées, mais le résultat dépendra de l’équilibre des forces dans chaque section locale.

En parallèle, nous avons entamé des discussions sur un texte portant sur les positions d’Unité populaire. Nous tiendrons également une assemblée du Red Network sur l’ensemble du pays. La campagne pour l’élection, y compris la sélection de la liste de candidats, va commencer.

Traduction Magda Pavitt et adaptation de notre rédaction. Le texte original complet se trouve sur socialistworker.org