«L'art principe actif»
Le dernier numéro de la revue Cassandre/Horschamp est consacré à « Pour une Europe de la Culture ». L’occasion de revenir ici sur la meilleure revue de langue française consacrée aux arts vivants, une revue engagée sur le terrain social.
Il y a quelques années, lors de la troisième édition de notre Université de printemps, nous recevions Nicolas Roméas directeur de Cassandre/Horschamp. Il y était intervenu avec les metteurs en scène Jean-Paul Wenzel et Jean-Claude Blanc sur «création artistique et subversion».
Celles et ceux qui ont participé à cet atelier se souviennent d’une discussion qui entendait mettre la culture au centre. Aujourd’hui, l’édito qui ouvre le numéro 104 de la revue rappelle cette nécessité dans une période où l’art semble ne plus être mesuré qu’à l’aune de son attractivité économique et/ou de son pouvoir propagandiste: «… nous aimerions contribuer à une vision de l’Europe qui ne soit pas seulement axée, dans le sillage nord-américain, sur l’économie et le chiffre. Où l’art, la culture et tous ces outils de la relation que nous appelons “symbolique” trouvent enfin leur vraie place, centrale.»
On le sait l’«atmosphère austéritaire» s’accompagne d’une fermeture des horizons artistiques non seulement parce qu’elle implique très concrètement des coupes budgétaires, mais aussi parce qu’elle s’inscrit dans des politiques répressives et parfois, comme en Russie, clairement autoritaires (cf. solidaritéS, nº 281).
Les arts vivants sont en danger. Pensons qu’en Slovénie, 85 % des budgets culturels ont été supprimés… Et comme le souligne Anne-Marie Autissier, spécialiste des politiques culturelles européennes dans ce numéro 104, «l’idée qu’on ne reviendra pas au modèle d’avant la crise se généralise». La période est en outre marquée par la montée des droites ultra et l’expansion d’une nouvelle culture de droite (pensons à la France où elle semble tenir le haut du pavé).
Aujourd’hui, les artistes, les acteurs et les actrices culturels prennent le maquis, s’inventent de nouveaux répertoires pour «rendre la vie plus intéressante que l’art » et « transformer la société». Cassandre/Horschamp passe ainsi en revue les combats sans frontières de ces nouveaux « artivistes » luttant pour leur autonomie (« L’actionnisme, nouveau communisme libertaire? »).
Le numéro fait la part belle à l’émancipation (« Ces “architectes de la dignité” »), à l’utopie urbaine (« El Patio Maravillas: “Nous irons cracher sur les tombes de vos vieilles villes” ») et aux rêves avec un article consacré à L’Usine (« L’Usine ou l’atelier des rêves »). Un très beau numéro d’une très belle revue!
Cassandre/Horschamp est en difficulté financière alors qu’elle annonce sa volonté de travailler à un projet de revue culturelle plus largement ouverte sur l’Europe. Dans cette période particulièrement sombre, cette revue joue un rôle essentiel qui « fait du bien ». Elle a besoin de vous, de nous. SP
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