La plus grande fusion de l'histoire

Les entreprises allemande Bayer et étatsunienne Monsanto ont confirmé l’acceptation par Monsanto d’une offre de 66 000 millions de dollars pour fusionner.

Leader de l’industrie pharmaceutique, Bayer organise ses négoces d’agro-industrie. A sa branche d’agrochimiques commercialisés par la firme CropScience, s’ajoutent plus de 2000 variétés de semences dont la firme Monsanto détient le brevet.

Syngenta, concurrent suisse de Monsanto, a récemment été acheté par l’entreprise d’Etat ChemChina. Les marchés occidentaux deviennent un terrain en dispute. Les six multinationales d’agronégoce se réduisent à quatre géants (ChemChina-Syngenta, Bayer-Monsanto, Dow-DuPont, BASF).

Bayer compte environ 117 000 employé·e·s dans le monde entier, contre 23 000 pour Monsanto. La fusion fait passer le négoce pharmaceutique de la compagnie allemande à la seconde place, avec environ 50 % de son activité.

L’entreprise change d’orientation pour se tourner vers le développement de médicaments avec des brevets exclusifs et à un coût élevé, ce qui a conduit à des licenciements dans le secteur de la vente en janvier 2016. Cette acquisition peut jouer dans le même sens et impliquer la perte de nouveaux postes de travail, ont signalé à la revue étatsunienne Labour Notes des travailleurs·euses, ayant déjà connu des licenciements du personnel lors de fusions antérieures.

L’alimentation soutenable

Un communiqué de la nouvelle entreprise signale que son objectif «est d’alimenter 3 milliards de personnes supplémentaires dans le monde en 2050 d’une manière soutenable pour l’environnement».

Selon le chercheur Hermann Stübler, «depuis plus de 25 ans, l’industrie phyto-sanitaire mondial n’a développé et mis sur le marché aucun herbicide sérieux pour la culture avec un quelconque nouveau mécanisme d’action ; c’est l’une des conséquences de la consolidation de cette industrie, qui s’est accompagnée d’une considérable réduction de l’investissement dans la recherche de nouveaux herbicides». Et la Coalition contre les dangers de Bayer (CBG) d’ajouter: «Par conséquent, toujours plus de plantes sylvestres s’adaptent à ces produits et les agriculteurs doivent utiliser toujours plus d’agrochimiques, avec des effets dévastateurs sur la biodiversité».

La CBG dénonce le fait que ce n’est pas la première union entre Bayer et Monsanto. De 1954 à 1967, ces dernières ont formé une entreprise conjointe, Mobay Chemical Corporation, qui a fourni au Département de la Défense des Etats-Unis l’un des produits générant l’agent orange, utilisé durant la guerre du Vietnam.

L’agent orange a causé, selon la Croix-Rouge vietnamienne, un million de personnes infirmes ou avec des problèmes de santé, et 400 000 morts. Mais Bayer n’a pas été associé à cet événement, comme c’est le cas de Monsanto.

Si c’est Bayer, est-ce bon?

Divers médias estiment que Bayer veut se défaire de Monsanto, car cette entreprise «a une mauvaise réputation», alors que les Allemands jouissent d’une bonne renommée pour avoir inventé l’aspirine.

Mais Bayer a dû faire face à des jugements qui lui ont coûté des millions tout au long de son histoire. Le plus récent en Argentine concerne la drogue pour traiter le cholestérol ; connu sous le nom de Lipobay ce médicament a causé la mort d’une centaine de personnes.

Dans ce cas néfaste, Bayer avait décidé de ne pas inclure les effets secondaires dans la présentation du médicament, en passant par-­dessus les réglementations locales et internationales en matière de santé. Des personnes physiquement en bonne santé, soignées avec ce médicament, restèrent invalides pour toute leur vie. En 2001, le laboratoire dut retirer ce médicament du marché dans le monde entier.

Après ce «faux pas», les actions de Bayer ont commencé à descendre à la bourse. La firme a acheté alors le laboratoire Schering, acquérant le secteur des produits contraceptifs et oncologiques éprouvés, ce qui lui a permis de relever son image et de continuer à accumuler des bénéfices exorbitants.

Alejandra Soifer
Texte original paru sur Viento Sur (vientosur.info) le 18 septembre 2016 Traduction de l’espagnol: Hans-Peter Renk