Drames en Méditerranée

Drames en Méditerranée : L'Europe assassine

A la mi-novembre, la coalition Boats 4 People (créée en 2011 pour défendre les droits des personnes migrantes) a établi le macabre bilan 2016 des décès en Méditerranée. Un constat lourd par le nombre de vies humaines perdues et par le poids de la responsabilité européenne dans ces pertes.

Grazia Bucca

En 2016, plus de 4200 personnes ont perdu la vie en mer. C’est le bilan le plus élevé jamais enregistré. Un chiffre qui dépasse déjà celui de 2015 (3771 (1)), alors même que l’année n’est pas terminée. Pourtant, selon le HCR, les personnes migrantes sont trois fois moins nombreuses à avoir tenté de rejoindre les côtes italiennes ou grecques.

Sans surprise, la «fermeture» de certaines routes migratoires n’a fait qu’accroître la dangerosité de leur passage et l’ouverture d’autres voies plus périlleuses. Le manque d’entre-aide entre les pays européens a créé une compétition à la limitation des arrivées, qui décourage les patrouilles de sauvetage et a engendré des situations dramatiques (par exemple des bateaux repoussés dans les eaux internationales). Le faible soutien financier à la Grèce ou l’Italie du reste de l’Europe explique également le peu de moyens de ces patrouilles.

Contrôler et réprimer plutôt que sauver

En outre, l’Union européenne (par le biais de l’agence européenne Frontex ou de l’OTAN) continue de favoriser les opérations de contrôle, de lutte contre l’immigration «irrégulière» ou contre les passeurs – désignés comme principaux responsables des mort·e·s en mer – plutôt que le sauvetage, qui vient en seconde ligne. Ce sont d’ailleurs en partie des organisations sur fonds privés (Sea-Watch, Médecins sans frontières,…) qui assurent ces sauvetages. Selon le HCR, seuls 31 % des corps sont récupérés, corps qui ne seront pas tous identifiés en raison de l’absence de procédures systématiques et harmonisées, laissant les familles dans l’incertitude.

L’Europe se plaint de devoir prendre en charge trop d’individus, mais alors même qu’ils·elles sont moins nombreux·ses, les décès augmentent. Croire à une bonne volonté et une incapacité malencontreuse de répondre à la situation n’est plus une option. La responsabilité de toute l’Europe dans le drame humain qui se déroule sous nos yeux doit maintenant être reconnue, y compris celle de la Suisse qui, en refusant toute demande d’asile via une ambassade, oblige les réfugié.e.s à traverser la mer. Avant toute chose, nous exigeons la fin des disparitions en mer ou par voie de terre, par tous les moyens!

AM

  1. En 2015, 3771 personnes sont décédées en mer pour venir en Europe et 1579 par voie terrestre.