8 mars 2017

8 mars 2017 : Des mobilisations féministes sans pareil

Des centaines de milliers de femmes ont manifesté mercredi 8 mars dans le monde entier. Dans de nombreux pays, elles ont suivi le mot d’ordre «Une journée sans les femmes». Partout, il était question d’une mobilisation exceptionnelle. En Suisse, s’il n’a pas été question de grève, les femmes ont aussi été très nombreuses à manifester leur colère et leur détermination pour défendre leurs droits.

En Turquie, les femmes ont fait preuve d’un courage exceptionnel. Alors que le gouvernement Erdogan cherche depuis plusieurs mois à museler toute forme d’opposition et que l’an passé 316 femmes ont été assassinées par leur conjoint ou par des hommes proches de leur entourage, elles ont brandi, notamment dans les rues d’Istanbul, le non sous toutes ses formes: «Non à la terreur», «Non à la guerre», «Non aux violences», «Non, c’est non!», «Non le 16 avril» [voir page 7].

En Argentine, au Mexique, en Italie, le mouvement Non una de meno a pris une ampleur impressionnante: des dizaines de milliers de femmes ont suivi le mot d’ordre lancé sur les réseaux sociaux #NosotrasParamos (Nous faisons grève) et ont occupé les rues jusque tard dans la nuit dans de très nombreuses villes pour dénoncer les féminicides (en moyenne 6 femmes tuées par jour au Mexique), les viols et les violences, mais aussi les injustices sociales et les disparitions de jeunes femmes (plus de 6700 adolescentes disparues en 8 ans selon l’Institut mexicain des statistiques).

En Pologne, plus de 100 villes ont vu les femmes descendre dans la rue en nombre; il y a également eu des manifestations en Ukraine, aux Philippines, en Indonésie, au Bangladesh, au Nigéria, en Grèce, au Moyen Orient, au Canada et aux Etats-Unis, mais aussi en Espagne, au Portugal, en Allemagne et dans les pays scandinaves. En France, les inégalités salariales entre femmes et hommes impliquent qu’en moyenne les travailleuses triment gratuitement chaque jour à partir de 15 h 40. Pour protester contre cette injustice, les organisations féministes et syndicales ont appelé les femmes à faire grève le 8 mars dès 15 h 40.

En Suisse, les rassemblements du 8 mars ont débuté le matin: installées sur la Place fédérale les femmes tricotaient des Pussy hats, relayées au sein même du Palais fédéral par des parlementaires hommes qui tentaient de manier à leur tour les aiguilles et le fil rose; scène un peu ridicule et relayée sans grand contenu par des médias qui se sont montrés plus discrets le soir, lorsque, dans plusieurs villes en Suisse romande, des centaines de femmes et d’hommes se sont rassemblées pour exprimer leur colère contre l’augmentation planifiée de leur âge de retraite, conjuguée à une baisse de leurs rentes, ou pour rendre compte des différentes manifestations féministes qui ont rassemblé plusieurs milliers de femmes et d’hommes entre le 8 mars (la nuit à Genève, voir article ci-contre) et le 10 mars à Bâle et à Zurich.

Si, sur Google images, on trouve de cette journée internationale 2017 des centaines photos illustrant les mobilisations dans plus de 50 pays, il manque encore un bilan mondial de ce mouvement féministe international «No una de meno» et «We can’t keep quiet», qui a aussi rassemblé, dix jours plus tard, 17 000 féministes, essentiellement suisses alémaniques, à Zurich [voir page 7]. La presse en a fait état. Reste à analyser l’ampleur et la nouveauté de ce mouvement féministe qui, pour la première fois depuis des années, est capable de faire descendre dans la rue avec une telle radicalité des féministes, toutes générations confondues.

Marianne Ebel