Erreur et mort au rendez-vous

Pendant que les dirigeant·e·s continuent leur marchandages, dérisoirement ornés de l’appellation de «Négociations de paix» à Genève, la réalité pour les Syrien·ne·s et les Irakien·ne·s de Raqqa et de Mosul, frappés cette fois-ci par la coalition militaire US, est celle de la terreur et de la mort.

Jordan Castelan
Lors de l’arrivée au pouvoir de Donald Trump début 2017, ses actes contre le droit à l’avortement et l’Obamacare ont, à juste titre, suscité une indignation internationale. Quelques jours plus tard, son feu vert pour un raid au Sud du Yémen, qui a eu pour résultat 25 mort·e·s dont 9 enfants, passa malheureusement sous silence. Or si sur Obamacare il y avait discordance avec le président précédent, sur la guerre au Moyen Orient il y a continuité.

Mossoul ville martyre

Dans cette ville martyre de l’Irak, l’intensification des frappes depuis fin janvier n’est que l’évolution prévisible d’une offensive lancée en octobre 2016 par les forces US, leurs alliés et un conglomérat de milices paramilitaires de la région travestie en «mobilisation populaire». Cette coalition est responsable de plus de 350 000 refugé·e·s et 3500 civils mort·e·s, dont 1200 au mois de mars selon Airwars.org. Les batailles se concentrent maintenant à l’Ouest de la ville, où selon les estimations de l’ONU près de 400 000 personnes se trouvent coincées. Les combats dans les petites ruelles de la ville sont devenus si difficiles que la semaine passée la coalition a du arrêter ses opérations.
Les snipers, les tirs de mortiers et les attentats-suicides font des nombreuses victimes y compris des civils. Les bombardements dits «de précision» qui pourraient faciliter l’avancée de la coalition ne sont pas privilégiés. Lors d’un tel bombardement le 17 mars plus de 200 personnes ont été tuées obligeant ainsi la coalition à avouer qu’«elle était au courant de ces informations» et qu›elle allait «envoyer une équipe pour investiguer»…

Raqqa-Alep, la coalition sème le vent

En même temps qu’elle déploie ses forces à Mossoul, la coalition continue à frapper en Syrie pour «éliminer les jihadistes». Selon l’observatoire syrien des droits humains, un bombardement à côté d’une mosquée le 16 mars à Al-Jineh faisait 49 mort·e·s et 5 jours plus tard 33 civils trouvaient aussi la mort à Mansoura à côté de Raqqa suite à un autre offensive aérien. En tout, les victimes de la coalition s’élèvent à 138 civils dont 19 enfants rien que ces deux dernières semaines.
Les mots d’un syrien à Raqqa, parus dans le Financial Times du 25 mars, sont révélateurs de la situation actuelle: «Jusqu’à maintenant nous avions peur des frappes du régime syrien ou des frappes russes, mais pas des Américains. Maintenant nous craignons la coalition états-unienne plus que tout autre chose car leurs armes sont si avancés! Pour nous, ils sont les plus mortels.» Pour ajouter ensuite que «Chaque fois qu’ils [la coalition] opèrent un grand bombardement la popularité de Al-Qaïda et du ISIS augmente. Et quand ils tuent autant des civils cette popularité ne cesse pas d’accroître.»

La Suisse complice

Même si la Suisse n’a pas des soldats en Iraq et même si ses avions ne volent pas au-dessus du Moyen Orient, les entreprises suisses et notamment RUAG Holding AG et sa filiale américaine Mecanex, productrices des mécanismes indispensables pour une grande partie des armements de la coalition, voient leurs bénéfices croitre d’une manière stable grâce à la perpétuation de la guerre.
De notre côté, tout en restant solidaires des luttes des peuples du proche et du Moyen Orient, contre toutes les forces qui veulent noyer l’espoir des révolutions arabes, nous devons aujourd’hui s’opposer plus que jamais aux meurtres commis par les armées – et pour les capitaux – de nos propres pays.
Dimitris Daskalakis