L'hystérie guerrière
L'hystérie guerrière : Un problème étatsunien
Juste après mon arrivée à Séoul, un groupe de porte-avions US reçut l’ordre de naviguer en direction des eaux coréennes. Immédiatement, les médias US commencèrent à diffuser des reportages relatifs à de possibles frappes préventives visant les installations militaires de la Corée du Nord.
Ces reportages étaient alimentés par un flux constant de tweets menaçants du président Trump et de prédictions catastrophiques. Ces déclarations étaient corroborées par les « experts » belliqueux qui dominent à la télévision. Comme d’habitude dans leur façon de couvrir la Corée du Nord, la majorité des reportages US ne présentent aucun contexte historique et n’incluent presque aucune prise de parole de Coréen·ne·s. Ils défendent une approche conflictuelle, défendue autant par Trump que précédemment par Obama. La presse US évite systématiquement de mentionner l’horreur infligée au Nord par l’aviation militaire US durant la guerre de Corée, tout comme la longue histoire de provocations militaires US dans la péninsule.
Pongyang, bien-sûr, ajoute sa propre hyperbole. « La Corée du Nord répondra immédiatement de façon appropriée aux provocations américaines. », déclarait l’armée populaire coréenne (APC) dans une déclaration du 14 avril. Si elle est attaquée, l’APC dit être prête à frapper, y compris avec des armes nucléaires. Le sensationnalisme de la couverture US et les déclarations nord-coréennes ont convaincu de nombreux étatsunien·ne·s que la guerre était imminente.
Des menaces presque rituelles
A l’exception d’une petite minorité de fanatiques anti-communistes, les Sud-coréens ne se sont eux pas inquiétés. « Pour de nombreux Sud-coréens, les inquiétudes à propos du Nord sont ressenties comme un rituel printanier au même titre que la floraison des cerisiers », écrivent ainsi deux reporters basés à Seoul pour le Wall Street Journal. En fait, empêcher le retour d’un gouvernement de droite conservatrice préoccupe davantage les citoyen·ne·s coréen·ne·s. La Corée du Sud va choisir son nouveau président le 9 mai. Les deux favoris, le libéral Moon Jae-in et le plus centriste Ahn Cheol-soo, possèdent une forte avance sur le candidat conservateur Hong Jun-pyo.
Moon appelle à un dialogue direct et des négociations avec la Corée du Nord, ainsi qu’à une réouverture de la coopération économique. Ces idées sont très séduisantes pour les Coréen·ne·s fatigués par des années de querelles entre Pyongyang et Washington. Moon a également déclaré que les Etats-Unis devraient reporter le déploiement du controversé terminal de défense aérienne de haute altitude (THAAD) jusqu’à ce que le prochain gouvernement soit en place, bien qu’il ait récemment tergiversé sur la même question.
Ahn a défendu une ligne plus dure, affirmant son accord avec le déploiement immédiat du THAAD. Mais comme Moon, il a souligné l’importance de négociation et de l’implication de la Chine.
Pour les forces progressistes, le discours guerrier venant autant de Trump que de Kim Jong-un est cause d’inquiétudes. Toutefois, le sentiment à Gwangju et ailleurs semble être que ceci aussi va passer – jusqu’à ce que quelqu’un ait le courage et la ténacité pour rabrouer les Etats-Unis et essayer vraiment de s’engager pour le changement. Après tout, c’est leur pays. C’est une donnée que trop d’américains, avec leur obsession d’une Corée du Nord comme ennemi stratégique, semblent oublier.
Tim Shorrock
Article paru sur le site europe-solidaire.org.
Titre, traduction et adaptation de notre rédaction.