Au delà de la mise en échec de PV2020... - Dessiner un nouvel horizon pour nos retraites

Dessiner un nouvel horizon pour nos retraites

Six mois de campagne, des dizaines de milliers de signatures, autant d’heures passées à battre le pavé nous auront permis de gagner notre pari: une victoire populaire contre un projet de dégradation des retraites sur le dos des femmes, des plus précaires, mais aussi de la grande majorité des retraité·e·s.

Si les déterminants sociaux de ce résultat ne seront sérieusement analysés que dans les semaines à venir, la dimension de classe de ce vote, qui cristallisait particulièrement l’opposition des personnes aux revenus les plus modestes, est évidente, comme le montre le dernier sondage pré-votation. Sa dimension féministe doit aussi être soulignée. A l’heure où les commentaires politiques se disputent la signification politique de ce résultat, le caractère décisif du référendum de gauche apparaît également clairement.

Des deux objets, c’est bien celui contesté par référendum et portant sur l’ensemble du paquet qui a recueilli le plus de non. Malgré l’ostracisation médiatique dont le comité référendaire a été victime, nous avons réussi à faire valoir des arguments de gauche contre l’élévation de l’âge de la retraite des femmes, contre la baisse des rentes pour toutes et tous, et contre la spirale régressive enclenchée par ce projet. Par notre action, nous avons contraint l’ensemble des forces politiques à se positionner sur le fond.

Prévoyance Vieillesse 2020 a été renvoyée à son expéditeur ; le statu quo a été maintenu. S’il était préférable aux coupes prévues par PV2020, le débat s’ouvre désormais sur l’alternative que nous proposons. Et c’est bien sur un plan B que le comité référendaire devra se mettre d’accord à l’occasion des Assises qu’il convoque le 9 décembre prochain, sous peine de devoir réitérer sous peu le même effort pour empêcher de nouvelles dégradations de nos retraites.

Aussi nécessaires soient-elles, un enchaînement de batailles strictement défensives, comme celles contre PV2020, nécessitent une énergie et un déploiement de forces considérables, qui suscitent, passé le soulagement immédiat, le sentiment de n’avoir fait qu’éviter le pire. L’activité déployée ces derniers mois, aussi importante soit-elle, peut cependant viser au-delà. Elle peut dessiner l’horizon d’un espoir de changement de donne, fondé sur le refus du placement de nos retraites en bourse et sur le choix de la solidarité. Il en va de l’ancrage de nos luttes sur le long terme.

Tout au long de cette campagne, toutes les composantes du comité référendaire ont reconnu le caractère dévastateur du 2e pilier, d’un système de capitalisation individuelle qui amplifie les inégalités entre hommes et femmes, entre catégories de revenus, entre générations, et livre l’épargne des travailleurs et travailleuses au pillage du capital financier et à la quête de profits des caisses de pension. De ce constat, une conclusion s’impose: un système de retraites plus juste passe par l’abandon du 2e pilier et son intégration à l’AVS.

Un tel projet n’est pas une chimère, mais une proposition tout à fait concrète qui permettrait, compte tenu des données actuelles, de financer des rentes sûres, dignes et solidaires pour toutes et tous. Un horizon politiquement difficile à atteindre dans l’immédiat sans doute, comme pouvait l’être l’AVS au moment de la grève générale de 1918, mais qui représente le seul véritable objectif pour rompre avec la régression sociale en cours.

L’avenir appartient à une AVS massivement renforcée, soit à un véritable système de rentes populaires permettant à chacune et à chacun de «maintenir son niveau de vie de façon appropriée», selon l’expression consacrée par la Constitution fédérale, en garantissant des retraites à 80% du dernier salaire, avec un plancher à 3800/4000 francs et un plafond à 9000/9500 francs.

Selon nos simulations, les taux de cotisation en vigueur, le maintien des transferts fiscaux actuels et l’intégration de la fortune du 2e pilier au fond de compensation AVS (avec des rendements de 2% au moins, autorisant des investissements sociaux et écologiques) sont compatibles avec un tel objectif. Il nous reste à en convaincre de plus larges secteurs de la société, en particulier dans la jeunesse, qui voit les conquêtes sociales des deux générations précédentes prendre l’eau de toutes parts. Cela peut changer! Cela doit changer!

PV2020 est mort, la lutte continue!

Audrey Schmid