L'enseignement spécialisé toujours hors-la-loi!

Ensemble à Gauche a tenté de sensibiliser le parlement à la cause des élèves aux besoins éducatifs particuliers.


Anne Emery-Torracinta, conseillère d’Etat chargée du département de l’instruction publique (DIP) – UN Geneva

La loi sur l’instruction publique (LIP) n’est pas appliquée et la volonté populaire est bafouée. Le mercredi matin d’école, accepté par le peuple en votation le 11 mars 2012 et instauré à la rentrée 2014, n’est toujours pas la réalité pour toutes et tous les élèves du canton. Quatre ans que cette situation incompréhensible dure.

Dans les faits, ce sont les élèves de l’enseignement spécialisé qui font les frais du manque de moyens. Les élèves de l’enseignement obligatoire, âgés entre 8 et 15 ans, devraient avoir un horaire scolaire similaire, soit environ 32 périodes hebdomadaires. Mais les élèves des classes d’enseignement spécialisé intégrées au cycle d’orientation ainsi que celles et ceux des centres médico-pédagogiques pour «moyens» (8-13 ans) n’y ont pas droit. Apparemment, seul le défaut des ressources empêche le Département de l’instruction publique (DIP) d’offrir ces prestations.

Pourtant, des postes pour le DIP, il y en a

«200 pour 1000 élèves supplémentaires» relevait récemment un député PLR. Il en tirait la conclusion que ces postes n’étaient pas tous destinés à des prestations directes pour les élèves. Avait-il raison? Oui, en partie. Parmi les nombreux projets en lien avec l’école inclusive – dont la situation n’est toujours pas claire – le DIP entend consacrer 16,3 postes pour 7 nouvelles équipes pluridisciplinaires. Celles-ci sont déjà au nombre de 9. Elles ont été déployées sans qu’il ne soit possible de vérifier que leur mission répond aux objectifs fixés, à savoir principalement le maintien d’élèves en difficulté ou aux besoins éducatifs particuliers au sein de l’enseignement régulier. Ces postes de psychologues, thérapeutes en psychomotricité, éducateurs et éducatrices sociaux et enseignant·e·s spécialisés, à des taux d’activité réduits, sont dispersés dans des établissements primaires. Cette façon de procéder s’apparente à un saupoudrage qui peine à convaincre. Certes, les établissements primaires sont défavorisés par rapport aux cycles d’orientation en termes d’équipes psychosociales. Mais pour quel bénéfice, lorsque l’on sait que les postes de psychomotricien·ne·s ne représentent que 10 % des postes par établissement de 700 élèves, et que de toute façon, avec un taux aussi faible, il n’est pas prévu que ces thérapeutes interviennent auprès des élèves?

Il est difficile de comprendre les priorités du DIP et de ne pas lui demander de respecter la loi. L’amendement d’Ensemble à Gauche, d’un montant modeste (461 000 francs), visait à faire cesser cette inégalité de traitement. Quelques postes auraient dû suffire pour couvrir les périodes d’enseignement supplémentaires du mercredi matin dès la rentrée 2014. L’enseignement spécialisé n’a aucune raison de reporter encore davantage cette prestation.

Avec la marge de 8 millions qui subsistait sur un budget de plus de 8 milliards, accepter l’ajout de moins de 500 000 francs pour corriger une inégalité dont souffrent les élèves les plus fragiles représentait une bien petite somme. Anne Emery-Torracinta n’a cependant rien trouvé à dire à ce sujet. L’amendement EàG a sans surprise été refusé. Le groupe socialiste, malgré l’attitude fuyante de sa magistrate, l’a cependant voté, redonnant un peu d’honneur au PS.

Olivier Baud