Monsanto & Co

Monsanto & Co : Agriculture, écologie et santé publique sacrifiées

L’industrie agrochimique inonde nos assiettes et les écosystèmes d’OGM et de pesticides. Derrière les arguments productivistes, inventaire des risques écologiques, sanitaires et sociaux.


Manifestation en Allemagne pour interdire le glyphosate au niveau européen (novembre 2017) – Daniel Karmann / Campact

Les entreprises agrochimiques comme Monsanto se spécialisent dans le développement et la production d’organismes transgéniques (ou OGM: organismes génétiquement modifiés), ainsi que de pesticides et herbicides. Ce modèle d’affaires leur donne un pouvoir considérable. Elles contrôlent ce que plantent les paysan·ne·s et avec quels moyens elles-ils travaillent leurs champs, elles décident de notre alimentation, et à quelles traces de pesticides nous sommes exposé·e·s. Plus largement, elles représentent un danger pour la société.

Les prétendus bénéfices des OGM

Les aliments transgéniques sont modifiés de manière à avoir une meilleure valeur nutritive, des rendements supérieurs et une meilleure résistance aux sécheresses. L’objectif est aussi de les rendre plus résistants à certains herbicides, pour faciliter le désherbage.

Les adeptes des OGM les présentent comme un moyen de diminuer les risques de récoltes perdues et de malnutrition, et de rendre la production agricole plus efficace. Les aliments transgéniques seraient aussi plus écologiques, car ils agissent comme des pesticides naturels, ce qui permet de diminuer l’utilisation de produits chimiques.

De fait, l’utilisation de plantes transgéniques a initialement entraîné une baisse de l’utilisation de pesticides. Mais cette tendance s’est depuis inversée. La raison en est que souvent, les mêmes cultures sont plantées aux mêmes endroits tous les ans: les espèces nuisibles deviennent immunes aux pesticides «naturels» de ces cultures. Il devient alors nécessaire d’utiliser des pesticides chimiques, qui empoisonnent des espèces indispensables à la survie des écosystèmes, comme les abeilles.

De plus, par croisement naturel, les caractéristiques qui rendent les plantes transgéniques résistantes aux herbicides se propagent à d’autres espèces. Avec pour conséquence l’utilisation d’herbicides de plus en plus agressifs et en toujours plus grande quantité.

Et comme les plantes transgéniques sont associées à l’utilisation d’herbicides particuliers, la monoculture domine. Les monocultures sont la principale cause de la baisse mondiale de la biodiversité et sont à l’origine de crises écologiques comme la disparition des abeilles. Sans compter qu’elles mettent en péril la sécurité alimentaire, car les espèces nuisibles peuvent se propager très rapidement.

Les risques sanitaires

Monsanto continue de nier les effets sur la santé du glyphosate, composante actif de sa gamme d’herbicides Round-up. Pourtant, des tests récents ont montré les dangers du mélange du glyphosate avec les autres composants du Round-up. Ces effets concernent les consommateurs·trices, qui mangent des résidus de ces herbicides. Et en première ligne se trouvent les professionnel·le·s, exposés quotidiennement.

Endettement et dépendance: les risques socioéconomiques

Après les fusions entre Syngenta et ChemChina, entre DuPont et Dew, et celle en cours entre Monsanto et Bayer, le nombre d’entreprises contrôlant le marché mondial des semences transgéniques et des produits chimiques associés se réduit. Les entreprises justifient cette concentration par des effets de synergie: en joignant leurs forces, elles progresseraient plus vite dans la recherche et le développement, améliorant la qualité de leurs produits.

C’est faux. Les rendements des semences vendues par une entreprise augmentent moins, proportionnellement, que la part de marché qu’elle contrôle, et les dépenses en recherche et développement stagnent. En revanche, les prix des semences augmentent.

Les agriculteurs·trices doivent par conséquent payer de plus en plus pour des semences de qualité constante. Il leur faut en plus, du fait des résistances que développent les herbes, recourir à des herbicides de plus en plus toxiques et chers.

Quelles alternatives?

Des alternatives à la dépendance à l’agrochimie existent. L’agriculture biodynamique, la permaculture ou l’agroécologie peuvent assurer la production de nourriture sans créer des risques systémiques au niveau social et environnemental. Elles permettent d’insérer la production agricole dans les dynamiques de l’écosystème, et favorisent une agriculture de proximité. Pour favoriser le développement de ces techniques, il faut mettre fin à l’expansion des entreprises agrochimiques et des cultures transgéniques.

Franziska Meinherz


Plus loin dans la manipulation génétique: le genome editing

Pour immuniser les OGM contre des espèces nuisibles, ou pour augmenter leur valeur nutritive, on ajoute des caractéristiques génétiques d’autres espèces. Cela permet des croisements ciblés qui ne se produiraient pas naturellement, par exemple en insérant dans une plante un morceau d’ADN issu d’une bactérie.

Récemment, une nouvelle technologie de génie génétique a vu le jour: le genome editing, plus rapide et moins cher que les techniques traditionnelles. Au lieu d’introduire des caractéristiques génétiques d’une autre espèce dans un aliment, l’ADN de l’aliment est modifié directement. De telles modifications peuvent se produire de manière naturelle. Mais avec le genome editing, il est possible de les cibler et de les provoquer artificiellement.

Les autorités nord–américaines ne considèrent pas les aliments produits avec du genome editing comme transgéniques. Les risques sont pourtant les mêmes. Nous devons veiller à ce qu’en Suisse, le moratoire sur le génie génétique inclue les aliments produits à l’aide du genome editing. FM