4e Congrès de solidaritéS

4e Congrès de solidaritéS : Vers une organisation nationale

Les 8 et 9 décembre, solidaritéS a tenu son 4e Congrès interrégional à Lausanne. Quelle est sa signification dans l’histoire du mouvement et quelles ont été ses principales décisions?

Les congrès sont des moments nécessaires aux mouvements pour prendre du recul sur les actions politiques quotidiennes. Les 8 et 9 décembre, nous étions une centaine à Lausanne pour débattre collectivement de trois textes qui avaient été diffusés et discutés dans quatre bulletins préparatoires, envoyés à tous et toutes les membres. Nous avons ainsi adopté une charte antisexiste, dont la rédaction avait été décidée lors de notre précédent congrès et qui est conçue comme un instrument d’auto-éducation collective visant les comportements quotidiens au sein du mouvement et vers l’extérieur.

Nous avons aussi adopté un document d’orientation politique. Après une analyse de la situation politique suisse dans le contexte international, ce texte fixe des campagnes prioritaires pour l’année prochaine, avec au centre la grève féministe du 14 juin prochain, le refus de la réforme de l’imposition des entreprises (RFFA) et les élections fédérales d’octobre 2019. Il prend aussi des options pour notre activité politique, qui doit savoir combiner la lutte au quotidien contre les politiques néolibérales et racistes, l’implantation dans le mouvement social et syndical, et la défense de notre projet de rupture avec le capitalisme.

Nous avons enfin discuté, amendé et adopté un texte de position sur notre engagement écosocialiste, une orientation qui avait déjà été débattue lors du troisième congrès, mais sans déboucher sur l’adoption d’une résolution.

Coup d’œil dans le rétroviseur

Les premiers groupes cantonaux de solidaritéS se sont constitués au début des années 1990, mais notre mouvement ne s’est donné des organes et un bimensuel communs qu’au début des années 2000.

En 2002, nous organisions le premier forum socialiste, ancêtre de nos Universités de printemps actuelles. En mars 2009, nous avons tenu notre premier congrès à Lausanne et adopté un document de base: « SolidaritéS: un mouvement anticapitaliste, féministe et écologiste pour le socialisme du 21e siècle » (voir solidaritéS, nº 130). Dans la foulée de ce congrès, nous avons mis sur pied notre première Université de printemps, qui a eu lieu en 2010, avec un succès qui ne s’est pas démenti depuis.

En mars 2013, nous tenions notre deuxième congrès, à Genève cette fois. Ses objectifs visent avant tout à renforcer la centralisation de notre mouvement en nous donnant des statuts et en élisant une coordination interrégionale élargie, renouvelée, féminisée et rajeunie, qui se réunit tous les deux mois depuis lors, un samedi entier, ce qui permet de mener des débats de fond. Ce congrès adopte des modalités d’intégration du 2e pilier à l’AVS.

En septembre 2016, nous nous sommes réuni·e·s pour le troisième congrès à Lausanne, qui engage solidaritéS contre PV 2020, la troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE 3) et la répression accrue des migrant·e·s. Nous adoptons une résolution intitulée: « Pour un féminisme du 21e siècle en lien avec les luttes d’émancipation sociale ». Il confirme la mise en place d’un bureau hebdomadaire de notre coordination interrégionale, qui opte clairement pour la relève générationnelle.

Musique d’avenir

Les congrès sont des moments essentiels dans la construction d’un mouvement et le quatrième congrès n’y a pas fait exception.

Ces derniers mois, nous avons formé une nouvelle section dans le canton de Fribourg et, plus récemment, noué des contacts politiques avec le groupe zurichois Schwarze Flamingo Maschinerie, issu de mobilisations auto–organisées contre les coupes budgétaires et pour l’accueil des réfugié·e·s dans les collèges, dont neuf membres ont assisté au quatrième congrès (voir encart). Nous pouvons donc espérer construire une organisation qui soit réellement nationale, un défi que nous allons tenter de relever dans la période à venir.

Dans cette perspective, nous avons décidé de renforcer notre structure interrégionale en visant une coordination mensuelle réduite d’une vingtaine de membres, complétée par un bureau hebdomadaire et trois commissions: internationale, féministe et queer, et écosocialiste. Nous avons aussi décidé de soutenir activement les Rencontres internationales des jeunes (RIJ) de la Quatrième Internationale et de débattre des options internationales de solidaritéS.

Dans un délai maximum d’une année, solidaritéS s’est engagé à réunir une Conférence interrégionale pour adopter de nouveaux statuts, dont un premier projet a été porté à la connaissance de ce dernier congrès.

Franziska Meinherz et Jean Batou


Zurich est dans la place

La présence d’un groupe des jeunes militant·e·s zurichois·es a marqué le congrès de solidaritéS par leur nombre et leur jeunesse ainsi que par les possibles collaborations qui s’annoncent.

Entre 2015 et 2016, des Zurichois·es âgé·e·s d’à peine plus de 14 ans créent la « Machinerie des Flamants Noirs » (SFM) qui leur sert de plateforme pour mobiliser massivement contre les mesures d’austérité dans l’éducation et le service public, et soutenir l’accueil des réfugié·e·s.

Après quatre ans d’activité, les militant·e·s de la SFM entament maintenant une période de réflexion. Face à une classe dirigeante qui ne recule devant aucune barrière linguistique, il est nécessaire de coordonner l’action des militant·e·s anticapitalistes plus largement.

C’est dans ce contexte que plusieurs réunions ont eu lieu entre la SFM et solidaritéS au cours des derniers mois. Nos convergences sur la nécessité d’une analyse marxiste de notre société capitaliste et sur les possibilités ouvertes par une coordination pour les luttes à venir ont conduit la SFM à participer à notre congrès.

Une invitation à adhérer à solidaritéS leur a depuis été adressée, non seulement dans l’objectif de créer une force anticapitaliste qui transcende les barrières linguistiques, mais aussi et surtout pour enrichir notre mouvement avec l’expérience d’une jeunesse forgée et active à Zurich, centre économique du pays.

Notre proposition, accueillie aussi chaleureusement que sérieusement par SFM, exige bien sûr une période de réflexion. En même temps, nous sommes conscient·e·s que les luttes en cours ne peuvent pas attendre. Des rencontres auront donc lieu prochainement pour discuter de notre travail commun: 2019 nous trouvera décidément plus fort·e·s que 2018.

Dimitris Daskalakis