Helvétiquement vôtre

Helvétiquement vôtre : Bon anniversaire Alfred Escher?

Alfred Escher (1819–1882) a joué un rôle majeur dans le développement du capitalisme suisse dans la 2e moitié du 19e siècle. Faut-il pour autant lui souhaiter « Bon anniversaire » à l’instar de Joël Mesot, président de l’EPFZ dans L’Illustré?

Image du film «Gotthard», 2016
Image du télé lm allemand Gotthard (2016)

Alfred Escher incarne ce capitalisme réellement existant, peu soucieux de protection sociale et de démocratie. La bourgeoisie suisse aime honorer ses « héros » en éludant leurs côtés les plus sombres. Laissez-nous nous en charger.

Ainsi, le père d’Alfred Escher avait fait fortune aux USA grâce à la spéculation immobilière, au négoce et à la pratique de l’esclavage dans ses plantations.

Alfred Escher crée, pour sa part, la Kreditanstalt (aujourd’hui Credit suisse) et la Rentenanstalt (aujourd’hui Swiss Life). Il préside la Société des chemins de fer du Nord-Est de la Suisse (impliquée dans le percement du tunnel du Gothard) et suscite la création de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ).

Jusqu’en 1868, Escher contrôle la vie politique zurichoise. Son hagiographe, Jung, le reconnaît: « La participation directe du peuple n’était pas souhaitée: la démocratie était purement de façade ». Le « système Escher » tombe après une série de calamités: chômage, inflation, choléra, touchant les couches populaires de Zurich.

Jung cite le rôle d’Escher dans la construction des chemins de fer. Mais il passe discrètement sur la controverse entre Escher et le conseiller fédéral Jakob Stämpfli, partisan d’une régie publique. Si Escher l’emporte, la majorité des compagnies privées font faillite à la fin du 19e siècle et sont rachetées en 1899 par la Confédération.

Enfin comment passer sous silence, comme le fait l’ouvrage de Jung, les événements de Göschenen (28 juillet 1875), lorsque la milice du canton d’Uri réprima une grève des ouvriers du tunnel du Gothard (4 morts). Ceux-ci protestaient contre leurs conditions de travail et de salaires.

Hans-Peter Renk