La Suisse est un désert syndical

répression-anti-syndicale
Rassemblement de soutien à M. Débay, délégué syndical licencié par l’entreprise Dubois Dépraz.

 La présence syndicale sur les lieux de travail est devenue quasi inexistante, que soit avec des commissions du personnel (prévues dans certaines conventions collectives) ou avec des groupes syndicaux d’entreprise. Cette faiblesse représente un avantage supplémentaire pour la domination patronale dans les entreprises.

Ainsi le licenciement d’un délégué syndical par l’entreprise Dubois Dépraz au mois de juin 2019 ne doit pas être considérée comme un fait divers ou anodin. Deux semaines après la grève des femmes, un patron effectue un acte de dissuasion massive, dont la portée va bien au-delà du cas individuel et de la Vallée de Joux. Ce licenciement doit être interprété comme une déclaration de guerre envers tou·te·s les salarié·e·s qui voudraient contester un tant soi peu le pouvoir patronal dans les entreprises. Que ce soit sur le plan salarial, de l’emploi ou des conditions de travail, la toute-puissance, voire l’arrogance, patronale a été quelque peu malmenée par l’organisation et le succès de la journée du 14 juin. Il était temps de rétablir l’ordre sans plus attendre.

Ce licenciement a eu lieu dans la région où un groupe d’horlogères s’était constitué pour préparer la grève féministe.

Ce groupe a aussi produit un cahier de revendications spécifiques à intégrer dans les négociations du renouvellement de la convention collective de travail (CCT) de l’horlogerie. Une telle situation ne s’était pas produite depuis longtemps. Pour les patrons, cette année de préparation de la grève du 14 juin a créé un mauvais climat, propice à de nouvelles initiatives de la base.

La manifestation syndicale du 8 juillet a représenté une première réaction salutaire et indispensable. Mais, depuis, c’est le silence radio. Cette situation mériterait que la direction d’UNIA et de l’USS organisent de nouvelles actions pour continuer ce combat. Plutôt que de s’engager dans une « médiation », nous aurions souhaité que le président de l’USS Pierre-Yves Maillard annonce un plan d’actions pour assurer la liberté syndicale et la liberté tout court dans les entreprises. Si c’est le prix à payer pour le « respect » des « partenaires » sociaux, UNIA et l’USS font fausse route. Le sacrifice de la liberté d’un syndicaliste ne saurait être acceptable en aucune manière. Peut-être que sur cette affaire, Maillard veut donner des gages de sérieux au patronat suisse.

Mais les militant·e·s et les permanent·e·s d’UNIA et des autres fédérations de l’USS ne doivent pas laisser ce cas sans réagir. La réintégration sera difficile à obtenir. Mais renoncer à le faire serait un aveu de faiblesse fatal pour toutes celles et tous ceux qui désirent prolonger les énergies revendicatrices et émancipatrices de la grève du 14 juin.

L’organisation des travailleuses·eurs sur les lieux de travail, qu’ils soient syndiqué·e·s ou non, devrait devenir une des priorités du mouvement syndical. La dénonciation et la lutte contre toutes les discriminations (salariales, sexistes, xénophobes) en sortiraient renforcés. Cela constituerait aussi une meilleure dissuasion que le passage annoncé d’inspecteurs ou devant des chambres de « conciliation ».

José Sanchez