Pour une écologie anticapitaliste

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 Est-il vraiment déjà trop tard pour réagir? Faut-il encore attendre passivement des solutions technologiques miracles, alors que les émissions de gaz à effet de serre ne cessent d’augmenter et que la biodiversité diminue? Ces deux thèses, celles de l’effondrement et des solutions technoscientifiques, semblent progressivement s’imposer dans les sphères culturelles, économiques, politiques ainsi que dans les lieux de formation. Pourtant, très souvent, ces deux visions prophétiques, au lieu de s’attaquer aux véritables causes du problème, dépolitisent, paralysent, favorisent peu l’esprit critique, en d’autres termes poussent à l’inaction et le repli sur soi. Or il est trop tard pour être pessimistes!

Le constat est simple: le système capitaliste dans lequel nous vivons se heurte aux limites de la planète ; une croissance économique infinie est impossible dans un monde aux ressources limitées. Peut-on, et doit-on, dès lors, espérer une ultime mutation salvatrice du capitalisme? Non, car ces solutions – technoscientifiques, pour la plupart – ne feraient que repousser temporairement les désastres climatique, environnemental et social, au profit d’une très petite minorité. De ce fait, un capitalisme « vert » n’est ni réaliste ni enviable.

Face à ce système profondément injuste, nous devons lui opposer une écologie anticapitaliste, affirmant qu’il faut désormais penser et opérer une décroissance juste, solidaire et, surtout, immédiate, une reconsidération radicale de nos modes de production, consommation et distribution.

Pour cela, un tel projet doit obligatoirement réfléchir à des mesures « transitoires » à très court terme, telles que la décarbonisation totale des transports ou le démantèlement du complexe miltaro-industriel, permettant de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre, 13% chaque année jusqu’en 2024, et atteindre, en Suisse, un bilan carbone neutre en 2030, au plus tard. En plus, il convient de réfléchir à des mesures transversales, c’est-à-dire affectant chacun des secteurs de notre vivre–ensemble, par exemple, une réduction massive du temps de travail ou une transformation radicale des sphères éducatives et politiques.

Afin de sortir de la logique capitaliste, nous devons défendre, en parallèle, deux principes fondamentaux. D’une part, celui de la justice climatique: toute mesure environnementale doit contribuer à réduire les inégalités sociales (de genre, générationnelles, territoriales, etc.) et conduire à une meilleure répartition des richesses disponibles en Suisse et à l’international. D’autre part, celui du pollueur-payeur: celles et ceux qui causent et profitent des émissions de gaz à effet de serre doivent être mis·es prioritairement à contribution (en Suisse, le secteur financier et les multinationales comme Glencore, Nestlé, etc.), et non pas celles et ceux qui en sont les victimes, sous quelque forme que ce soit.

La lutte écologique ne peut être que sociale et réciproquement. Au niveau international, les luttes « écosociales » des peuples indigènes, du mouvement des paysan·ne·s, les grèves d’étudiant·e·s pour le climat, la mobilisation féministe et en Suisse la protection de la forêt du Flon à Lausanne ou la gratuité des transports en commun à Neuchâtel, les grèves climat et la grève féministe du 14 juin, tracent les contours du camp social à rassembler et à renforcer, tout en continuant à s’auto–organiser démocratiquement sur les lieux de travail, de formation (et au-delà) et à se mobiliser dans la rue, afin d’accélérer la prise de conscience collective et multiplier les actions politiques permettant d’opérer un changement profond de notre société. Si nous voulons sauver l’être humain et la planète, le futur doit être écosocialiste!

Steven Tamburini