Allemagne

Une convention collective pour sortir du charbon

Le syndicat des mines, de la chimie et de l’énergie (IC BCE) et celui des services publics (Ver.di) ont conclu avec les entreprises du secteur de l’énergie des conventions collectives pour un changement structurel. Les premières sont en vigueur depuis la fin août.

Action Ende Gelände, Leipzig 2019
Action du mouvement Ende Gelände dans les environs de Leipzig, 2019

« En relation avec la fin prévue par le gouvernement fédéral de l’exploitation du lignite et de son utilisation pour produire de l’électricité, ainsi que de l’utilisation de la houille dans le même but (ces deux aspects seront par la suite désignés par le terme sortie du charbon), la Commission ‹ Croissance, changement structurel et emploi › mise en place par le gouvernement a formulé, dans son rapport final, des recommandations pour l’élaboration d’une sortie du charbon socialement acceptable au plus tard jusqu’à fin 2038 ». 

Ce rappel forme le premier paragraphe du document de travail signé le 22 janvier 2020 par les deux syndicats ci-dessus et les organisations patronales sur la « sortie du charbon ». Dans ce document sont mentionnées les conditions d’une sortie socialement acceptable de l’exploitation du lignite et du charbon ainsi que des conditions salariales. La loi sur la sortie du charbon spécifie que seules les entreprises qui auront conclu une convention collective avec les syndicats concernés pourront profiter des « versements compensatoires » de l’État.

Sortie tardive du charbon

Fin août, une première mise en œuvre voyait le jour : les premières conventions collectives négociées avec les producteurs d’énergie étaient signées, avant tout celle avec RWE (second producteur d’électricité allemand) concernant le changement structurel dans la région rhénane et la mise à l’arrêt des premières centrales. Ce faisant, un nouveau jalon en direction de la bien trop tardive sortie du charbon de 2038 a été posé.

N’aurait-il pas été possible de concevoir de tels accords pour une sortie en 2030 ? Le syndicat Ver.di n’aurait-il pas été bien inspiré de s’engager dans ce sens et de faire ainsi front commun avec le mouvement climatique ? Ce n’est pas seulement le tournant de la politique des transports qui doit être engagé le plus rapidement possible, mais aussi, justement, le tournant énergétique.

La dernière livraison du journal de Ver.di, Publik, donne une large place à cette convention. Présentée sur deux pages, elle contient nombre de citations de jeunes employé·e·s du secteur. En ressort une grande satisfaction quant au super résultat obtenu. Au premier coup d’œil, cela semble le cas, mais de nombreuses questions doivent maintenant être réglées au niveau des entreprises. Toutes les questions relevant de la co-­détermination ne sont pas abordées dans la convention, comme : quel niveau final des primes de restructuration ? Quelle organisation de la formation continue, respectivement du recyclage ? Quelles seront les indemnités pour ceux et celles qui quitteront l’entreprise ? etc.

La convention collective signée avec RWE prévoit notamment :

  • Interdiction des licenciements pour des raisons opérationnelles durant toute la procédure de sortie du charbon
  • Fixation matérielle des primes de restructuration (80 pour cent du dernier revenu net)
  • Accord sur les prestations pour une formation qualifiante et pour le reclassement dans d’autres emplois
  • Pas de réduction de la prévoyance d’entreprise
  • Règlements de la formation professionnelle et en cas de reprise

À première vue, il s’agit effectivement d’une sortie socialement acceptable, comme les syndicalistes pour la protection du climat l’avaient depuis toujours réclamée. Toutefois, ils revendiquaient aussi une réduction du temps de travail à 30 heures par semaine et la garantie de 100 % du salaire.

Vers quel horizon ?

Surtout, la question de ce qu’il adviendra après la production d’électricité à partir du charbon reste posée. Il y aura-t-il dans la région rhénane des parcs éoliens et solaires, fournissant à toutes et à tous une perspective professionnelle ? Les sites des centrales seront-ils transformés pour accueillir une production alternative d’énergie ? Les salarié·e·s et leur syndicat doivent réfléchir sérieusement aux alternatives aux énergies fossiles. Ne serait-il pas, par exemple, judicieux de ne pas laisser cette tâche à chaque entreprise et de viser au contraire la mise en place d’une organisation publique de la production d’électricité ?

La question des gains énergétiques ne peut pas non plus être résolue indépendamment de celle du choix de la mobilité que nous voulons. Faut-il développer les transports publics locaux et à longue distance ou voulons-nous à l’avenir avoir 40 millions d’automobiles électriques sur les routes, ce qui amènera l’effondrement de la production d’énergie ? Ce sont là des questions sociétales importantes qui ne doivent pas être laissées aux entreprises de l’énergie et de l’automobile, guidées par le profit.

Helmut Born

Traduction : Daniel Süri