Vous êtes plutôt casoar à casque ou hyène tachetée?

Le Musée d’histoire naturelle de Berne propose une exposition sur la diversité dans la/notre nature faisant rimer vulgarisation et sensibilisation.

Une hyène empaillée dans l'exposition "Queer, la diversité est dans notre nature"
Les hyènes tachetées jettent par la fenêtre de nombreux stéréotypes de genre: Les femelles mènent les meutes, ont des taux d’hormones mâles extrêmement élevés et un «pseudopénis».

Le débat sur les identités de genre a toujours été aux prises avec la question de la nature. Les tenant·e·s de la binarité et de l’hétérosexisme utilisent ainsi souvent l’argument naturel pour rejeter tous les autres comportements perçus alors comme déviants.

L’exposition du musée d’histoire naturelle les prend au mot pour montrer que, même du point de vue de la nature, binarité et hétérosexisme ne constituent en rien des normes absolues. Ainsi, certaines espèces exclusivement féminines se reproduisent par parthogenèse (division à partir d’un gamète femelle non fécondé, donnant naissance à un clone génétique de la mère) comme les varans, les requins-marteaux ou encore les dindons, quand d’autres sont capables de changer de sexe, comme certains poissons. Le blob constitue, lui, carrément un organisme pouvant posséder jusqu’à 700 types de sexes différents.

Du côté des comportements sexuels, la nature ne se limite pas non plus aux fonctions reproductrices. Les actes homosexuels sont observés chez de très nombreuses espèces,  6 % des moutons domestiques mâles ne s’accouplant par exemple qu’avec d’autres béliers, tandis que certaines espèces monogames connaissent des couples de même sexe durant toute une vie.

Humains et animaux, même combat

Cette exposition ne se borne pas à explorer le règne animal mais plonge l’être humain dans cette diversité naturelle. L’entrée de l’exposition passe par les statistiques pour réfuter la catégorisation de « minoritaire » des identités de genre non conformes, montrant par exemple qu’il y a en Suisse plus de lesbiennes que de membres de l’UDC. 

L’exposition laisse ensuite exploser la diversité des genres expérimentés par les êtres humains, en donnant la parole aux personnes concernées ou en explorant les différentes facettes des identités possibles. Le mérite de cette exposition est de ne pas se contenter de prêcher les convaincu·e·x·s mais de mettre en place une démarche explicative capable de susciter l’attention de chacun·e·x. La visite se fait notamment avec un astucieux cahier d’expédition personnel où chaque visiteur·x·euse est amené·e·x à se positionner quant à son identité, à ses idoles et à partager ses positions à l’aide d’autocollants. On ne peut que recommander cette démarche aux accents pop qui n’oublie pas pour autant de rester critique et exigeante.

Pierre Raboud

Exposition jusqu’au 10 avril 2022