Un chemin pour en finir avec la capitalisation

solidaritéS porte depuis une décennie un projet de réforme radicale du système de retraite en Suisse. Face aux attaques de la droite, ce projet affirme la répartition des richesses par un système de retraites basé sur les droits sociaux plutôt qu’une capitalisation creusant les inégalités sociales, de genre et intergénérationnelles.

La proposition de solidaritéS vise à construire un pôle syndical, féministe et écologiste pour abolir le système des trois piliers et les fusionner dans un système unique de sécurité sociale. 

La capitalisation ne sert pas les assuré·e·s mais offre une assise financière majeure aux milieux dirigeants suisses.

Les lignes fortes d’une réforme nécessaire

Sa suppression ne peut se décréter sans esquisse d’un plan solide pour garantir le maintien du niveau de vie dans un système par répartition : le droit de vivre notre fin de vie hors de la subordination patronale et étatique en dépend.

Notre projet veut d’abord garantir des prestations qui maintiennent le niveau de vie par une rente qui couvre environ 80 % du salaire moyen durant l’activité professionnelle, mais au minimum 4000 francs et au maximum 8000 francs mensuels.

Concernant son financement, nous nous basons sur une cotisation paritaire selon la répartition actuelle (45 % à charge des travailleurs·euses et 55 % des patron·ne·s) selon un taux unitaire toutes classes d’âge confondues et similaire à celui actuellement prélevé, soit 27 %. La cotisation sur l’ensemble des salaires sans plafond, ni plancher (contrairement à la LPP) amèneraient de nouvelles recettes substantielles.

L’abolition des bricolages des PC, des défiscalisations du 3e pilier et des coûts de la gestion dispendieuse de la LPP par les caisses sont également des moyens de baisser le coût des prestations à servir. Les contributions des cantons (prestations complémentaires) ou le financement fédéral (TVA, taxes sur les cigarettes et les casinos) maintiendront leur participation au financement à la hauteur de 10 % des recettes de l’AVS.

1000 milliards à récupérer pour la transition écologique et sociale

Des aménagements sont nécessaires pour une période transitoire durant laquelle les rares personnes qui pourraient bénéficier de meilleures expectatives dans l’ancien système devraient pouvoir en profiter sous l’angle des droits acquis. Dans une certaine mesure, les retraits en capital pour départ à l’étranger devraient rester possible. Pour le reste, le changement profond que nous proposons doit se faire fermement avec un gel de la création de nouvelle caisse et la démocratisation de celle-ci en gardant une certaine forme d’exécution décentralisée à l’image des agences AVS ou offices AI. Mais le fonds de financement serait entièrement public.

Ce n’est pas une mince affaire : Les capitaux actuellement sous gestion des fonds de prévoyances dépassaient les 1000 milliards de franc en 2019. En calculant un rendement faible de 2 % et une perte pour la garantie des droits acquis, un revenu annuel de 14 milliards est attendu tout en autorisant des critères d’investissements durables et justes.

Face aux attaques généralisées de la droite, notamment l’initiative « générations » du PLR, et la détérioration des conditions environnementales et économiques des peuples, nous sommes là pour mettre au centre du débat un projet radical de répartition des richesses concret et efficace.

Dimitri Paratte

Rapatrier les capitaux de la LPP ?

La fusion du système des trois piliers en un seul système de sécurité sociale répond aussi aux préoccupations des mouvements pour la justice climatique.

Retirer les capitaux investis dans des sociétés actives dans l’exploitation des énergies fossiles, ou dans le secteur minier, place les salarié·e·s/cotisant·e·s devant un nouveau dilemme. Où trouver des placements de substitution avec des rendements permettant d’alimenter les futures rentes ? Le secteur de l’immobilier ne peut absorber une telle masse de capitaux. 

Des secteurs liés à la transition écologique ? Choix délicats. Outre l’inconnue sur l’aspect économique, et donc des résultats financiers, la justification écologique peut-être discutable, voire nocive (à l’instar de la promotion de l’énergie nucléaire comme production « verte »).

Plutôt que de parier sur une capitalisation « verte » ou « sociale », nous proposons de changer de mode opératoire. Le système basé sur la répartition n’a pas besoin de prospecter à moyen ou long terme les évolutions économiques, dont les prévisions restent très difficiles à établir. Il distribue immédiatement les cotisations prélevées. C’est donc aussi un gage de sécurité en évitant les errements boursiers. Et donc la meilleure manière de « reprendre la main sur notre argent ». JS