Les dettes privées sont politiques
Le Conseil fédéral souhaite modifier la loi sur les poursuites et faillites (LP). À Genève, Ensemble à Gauche solidaritéS–PdT–DAL a élaboré une prise de position.

En Suisse, il est difficile de connaître avec exactitude le nombre de personnes surendettées, c’est-à-dire celles qui n’ont plus les capacités financières de rembourser leurs dettes. En effet, il n’existe pas de statistiques assez représentatives sur le sujet même si le nombre de personnes aux poursuites (plus de 500 000 !) nous laisse à penser que leur nombre est important.
Selon les statistiques de Dettes Conseils Suisse, l’origine des dettes est majoritairement due à un « accident de la vie » : la perte d’un emploi, la maladie, une séparation sont les principales causes du surendettement. De plus, les personnes vivant dans la précarité sont évidemment bien plus à risque. À cela s’ajoutent les effets d’une économie libérale poussant toujours plus à la consommation, encourageant la vie à crédit et n’avantageant que les grandes fortunes.
En ce sens, il est nécessaire de ne pas mettre la personne surendettée seule face à sa responsabilité individuelle, mais tenir compte également de la responsabilité de notre société de consommation et du capitalisme mondial.
Malgré un surendettement qui tend à augmenter, il n’existe pas encore en Suisse de procédure qui pourrait offrir aux personnes surendettées une deuxième chance, à l’instar d’autres pays européens tels la France, l’Autriche ou l’Allemagne. Les procédures existantes sont compliquées et ne sont destinées qu’à des personnes ayant soit un nombre raisonnable de dettes, soit des revenus confortables, ce qui exclut la plus grande partie des personnes concernées.
Une deuxième chance
Le Conseil fédéral propose en premier lieu une procédure concordataire simplifiée pour les débiteurs·trices n’étant pas soumis·es à la poursuite par voie de faillite, la rendant plus efficace et moins coûteuse que celle existante. La personne serait saisie sur ses revenus pendant quatre ans, lui laissant un minimum vital élargi (impôts compris, contrairement aux saisies sur salaire actuelles) et serait libérée des dettes restantes.
En deuxième lieu, elle permet la création d’une procédure d’assainissement par libération des dettes sous certaines conditions pour les personnes qui ne disposent pas de capacité de remboursement. Pour y accéder, il faudrait que la situation du débiteur·trice soit durablement insolvable et qu’il n’y ait aucune perspective d’amélioration dans un futur proche. En parallèle, iel doit assurer ses charges courantes et ne pas risquer la contraction de nouvelles dettes.
En tenant compte des conséquences néfastes à long terme pour les personnes surendettées et pour la collectivité, nous défendons la possibilité d’offrir une deuxième chance aux débiteurs·trices pour sortir de la spirale du surendettement. Il ne faut pas oublier que cette problématique a des répercussions non négligeables sur la santé, la famille et l’intégration sociale, qui par conséquent touchent la société entière au niveau économique et social.
Combattre les conditions qui engendrent le surendettement
Toutefois, cette procédure pourrait aller bien plus loin, par exemple en instaurant une durée n’excédant pas les trois ans comme le préconisent les services sociaux spécialisés dans les dettes ou encore en incluant les impôts dans le minimum vital de la personne saisie sur salaire.
Une résolution à l’attention de l’assemblée fédérale insufflée par EàG est d’ailleurs en discussion au parlement genevois à ce sujet. Enfin, en n’excluant pas certaines dettes de la procédure comme celle de l’aide sociale. Plus largement, nous continuerons de lutter contre cette société capitaliste qui crée les conditions de surendettement pour de larges secteurs de la population.
Ensemble à Gauche solidaritéS-Pdt-DAL se battra pour que cette réforme puisse être votée avec les améliorations demandées. L’exemple de la situation genevoise où les personnes endettées sont tributaires du bon vouloir de fondations philanthropiques est antidémocratique et intenable.
Il est par ailleurs évident que la société de consommation, les inégalités de revenus et la dégradation de nos assurances sociales sont autant de facteurs qui influent très fortement sur cet endettement et sur lesquels le Conseil fédéral ne met aucun frein.
GT Social & Santé de solidaritéS Genève