Mode et publicité: les images mises à nu

Mode et publicité: les images mises à nu

Les images sont partout, en nous comme autour de nous. En raison des nouvelles technologies, elles sont de plus en plus nombreuses sur magazine, affiche et écran. Elles nous informent et nous forment en même temps, quoi que nous en pensions. Car le visuel joue un rôle prépondérant dans la pensée humaine, ainsi que dans le processus de transmission des comportements. Avec les images actuelles, quel monde créons-nous? Savoir mieux décrypter les images de notre quotidien permet de (re)trouver nos repères personnels, mais est-ce suffisant? Pour Eva Saro, l’art est une forme d’activisme culturel. Elle travaille entre musées, écoles et entreprises (Nokia, publicitaires) et a participé à un documentaire TV sur Benetton. En quelques mots, elle dit ce qui la motive. (mbu)

J’estime que les femmes ne peuvent plus être libres dans cette multiplication d’images. Confrontées sans cesse à des modèles normatifs, même les plus sûres d’entre elles se sentent déstabilisées. Même des professionnelles de la photo qui savent pertinemment que toutes les images commerciales sont retouchées (avec des programmes comme Photoshop).»

Jusqu’à l’anorexie

Quant aux plus faibles, les plus jeunes, elles deviennent anorexiques (90% des jeunes Allemandes se trouvent trop grosses, et 50% des fillettes de 11 à 13 ans ont déjà tenté un régime amaigrissant, d’après une enquête du magazine Brigitte). C’est un constat souvent fait par animateurs et enseignant-e-s: les relations entre filles et garçons sont dominées par des rapports inégalitaires, les mêmes qui sont constamment véhiculés dans la pub sexiste, les clips musicaux et la mode.

Les premières relations sexuelles sont influencées par les clips commerciaux. Les jeunes filles y voient des femmes en extase et se sentent anormales de ne pas jouir. Les garçons s’identifient à des semi-violeurs qui font crier les femmes. Dans un atelier, j’ai rencontré un jeune Africain qui s’est indigné: «Mais les hommes ne sont pas tous des chiens qui courent derrière les femmes comme dans cette publicité de mode!» Ce genre de réaction est rare! Pourtant la publicité, si elle avilit les femmes, ridiculise les hommes. Tous y perdent leur humanité.

Une position humaniste

La récente apparition de quelques hommes dévêtus dans la publicité n’est pas un gage d’égalité! Si on observe bien les images, on peut voir que les hommes sont toujours conscients, actifs, ils maîtrisent la situation, au contraire des femmes qui sont toujours présentées passives, couchées ou, pire, dans des postures «tortillonnées» impossibles à tenir, avec un visage irréel, lissé, sans vie. De plus le corps des femmes est très souvent représenté coupé en morceaux: des jambes, des poitrines, des mains, des fesses, privées de tête. Ce n’est pas (encore?) le cas pour les corps d’hommes.

Féministe? je n’utilise pas ce mot pour me définir, car il n’a pas de signification claire dans la tête des gens. Cela donne à croire que l’on veut casser de l’homme. Or, je milite pour le respect de l’homme et de la femme dans la publicité, j’ai une position humaniste.

Eva SARO

Sites à consulter: www.youwatchit.net, www.you-watch-it.de et www.mlab.uiah.fi/watchit

Contact: Eva Saro Tél. 022 418 52 59, evasaro@bluewin.ch Dès avril les panneaux de l’exposition seront disponibles pour des écoles, des centres de loisirs, etc.


Exposition sur la pub et la mode, les stéréotypes sexistes et la beauté

LES IMAGES MISES A NU – Eva Saro & Co, à la Villa Dutoit du Petit Saconnex, ch. Gilbert-Trolliet 5 Vernissage: jeudi 4 mars dès 18h / finissage: dimanche 28 mars de 15h à 17h. Ouverture mer, jeu, ven 14-18h, sam-dim 13-17h

Tables rondes:

Le 11 mars à 19 heures autour du thème Violence, sexualité et beauté: quelles images fabriquons-nous pour quelle société? Avec la participation de Stella Jegher d’Amnesty International, de Joseph Minniti du Centre de loisirs de Carouge, de Salika Venger, députée de l’AdG et de Frédéric Scheidegger, secrétaire-adjoint au DJPS, pour présenter un projet de loi. Le 19 mars à 19 h avec les graphistes activistes les Casseurs de pub de Lyon. Le 26 mars, rencontre avec la styliste Valentine Ebner sur les coulisses de la mode et les bureaux de recherches de tendances. (mbu)