Mobilisation exemplaire contre la hausse du coût de la vie

À la suite des grèves des maçons, un accord est sur la table. Entretien avec Pietro Carobbio, secrétaire syndical chez Unia Vaud et responsable du secteur de la construction.

Manifestation de maçons dans les rues de Zurich
15 000 travailleurs·euses de la construction sont descendu·e·s dans la rue à Zürich le 11 novembre 2022.

Pourquoi une nouvelle grève a-t-elle lieu ? Quelles sont vos revendications ?

La grève intervient dans le contexte du renouvellement de la convention nationale (CN) arrivant à échéance en fin d’année. Un accord doit être signé au premier janvier. Les revendications des syndicats et travailleur·euse·s sont : des journées de travail moins longues ; une meilleure protection contre les intempéries et mieux réglementée ; une augmentation des salaires, sachant qu’il n’y en a pas eu depuis deux ans ; la rémunération de certaines heures de déplacement. 

Concrètement, du domicile au dépôt, les heures ne sont pas comptées et, du dépôt au chantier, les trente premières minutes sont à la charge des travailleur·euse·s (excepté les chauffeurs·euses) – nous demandons la suppression de ces trente minutes. Une meilleure couverture pour les maçon·ne·s âgé·e·s fait également partie des négociations. Enfin, nous demandons une semaine de vacances en plus et des pauses rémunérées.

Il est primordial que les conditions s’améliorent, car le manque de maçon·ne·s se fait déjà sentir. Actuellement, la majorité des travailleurs·euses ont entre 50 et 60 ans et ces personnes seront toutes à la retraite dans dix ans, entraînant une pénurie d’ouvriers·ères.

Le secteur avait déjà mené une grève en 2018. Penses-tu qu’elle a eu un impact positif sur les conditions de travail ?

En 2018, les négociations avaient abouti. Il s’agissait notamment de l’assurance de la retraite à 60 ans, la CN avait été renouvelée et une augmentation de salaire de 80 francs par mois pour l’année 2019 et 2020 avait été obtenue. Donc oui, elle a plutôt été positive.

Concrètement, comment s’organisent les négociations et comment s’y impliquent les militant·e·s ?

Les syndicats du secteur (Unia, Syna) ont fait le tour des chantiers pour soumettre les propositions du patronat au vote des travailleurs·euses : 12 propositions ont été soumises puis votées. Ensuite, il y a eu une première assemblée au printemps, puis l’Assemblée générale de la construction le 7 octobre à Lausanne où 900 personnes étaient présentes. Unia a présenté les revendications syndicales et aussi les propositions de la Société suisse des entrepreneurs (SSE). 

Aux négociations étaient présents les syndicats Unia, Syna, la SSE et également quelques maçon·ne·s. Évidemment, les négociations n’ayant pas abouti, la décision de faire grève était quasiment une évidence.

Comment peut-on mettre en lien les luttes de la construction avec les autres luttes syndicales actuelles, par exemple, en lien avec l’inflation ou avec les enjeux féministes ?

Il faut avoir un point de vue d’exemplarité et soutenir toute lutte qui va dans le sens des revendications des maçon·ne·s. Dans cette période d’inflation, le lien entre la hausse du coût de la vie et la demande d’une hausse des salaires est évident. Pour les luttes féministes, Unia s’était par exemple positionné contre AVS21, notamment parce qu’à long terme cela met en péril la retraite à 60 ans dans le secteur de la construction. Il y a une minorité de femmes en maçonnerie, néanmoins la Grève féministe était présente sous la tente d’Unia lundi 7 novembre, avant le cortège, afin d’y apporter ses revendications.

Propos recueillis par Noé Brandt

un Accord à valider

Les syndicats Unia et Syna ainsi que la Société suisse des entrepreneurs sont parvenus à un résultat pour le renouvellement de la convention nationale (CN) de la construction. Unia le soumettra à l’approbation des délégués lors de la conférence de branche du 10 décembre.

Le résultat de ces négociations comprend une augmentation des salaires effectifs de 150 francs à partir du 1er janvier, ainsi qu’une adaptation des salaires minimums de 100 francs. Des simplifications de l’organisation du temps de travail et des améliorations dans le remboursement des frais et des indemnités de congé paternité font également partie du résultat.

Ce résultat sera présenté le 10 décembre à la conférence de branche de la construction d’Unia, qui réunira des délégué·e·s de toute la Suisse. Les entrepreneurs·euses le présenteront à leurs délégué·e·s le 13 janvier.