Salaires et accumulation capitaliste

La progression n’a été que de courte durée. Selon la dernière étude de l’Union syndicale suisse, certains salaires ont recommencé à se réduire. Lesquels ? 

Christoph Blocher
La famille Blocher est la 10e fortune de Suisse avec près de 15 milliards de francs.

Alors que sur la période 2010-2016, les salaires faibles et médians avaient augmenté, la période 2016-2020 voit ces catégories moins bien rémunérées. Les salaires faibles sont définis comme les 10 % inférieurs, ce qui équivaut à tout juste 4100 francs par mois pour un plein temps. Ayant progressé de 9,6 % sur la première période, ils ont reculé de 1,8 %. 

La même tendance est observée pour les salaires médians, +7,2 % et ensuite une régression de 0,9 %. Le salaire médian dépasse de peu les 6200 francs.

Cette évolution à la baisse n’est pas du tout observée sur les 10 % supérieurs (directeur·ice·s, cadres de direction, gérant·e·s). Sur les deux périodes, ils enregistrent des hausses de 6 % et de 5,4 %. Les membres de cette tranche salariale sont payé·e·s environ 11 000 francs par mois, soit presque le triple des « 10 % inférieurs ».

En restreignant les revenus au « 1 % supérieur », la statistique des revenus AVS permet d’évaluer cette catégorie à environ 45 000 francs mensuels.

Vivre avec 4100 francs ou moins n’est pas une situation marginale, puisque cela concerne un demi-million de personnes. Une flagrante inégalité très genrée aussi, la moitié des femmes touchent un salaire mensuel de 4470 francs ou moins.

Des salarié·e·s capitalistes

De tels niveaux de salaire permettent évidemment un processus d’accumulation très important et très rapide. Cela explique le nombre croissant de salariés millionnaires, dont le nombre a plus que triplé en vingt ans pour atteindre en 2020 le cercle d’environ 3549 personnes. Ce groupe de riches a connu une envolée ces dix dernières années, passant de 2621 à 3549 personnes. C’est de l’épargne facile, et désormais très recherchée pour ce fameux 3e pilier.

Cet enrichissement rapide est confirmé de manière encore plus marquée pour le groupe percevant un salaire annuel de 500 000 francs ou plus. En passant de 11 866 personnes en 2010 à 15 637 en 2020, cette flambée illustre aussi ces excès salariaux.

Nette différence de classe

3500 millionnaires face à un demi-million de personnes touchant pas plus de 4100 francs. Quelles qualifications, formations, fonctions justifient de tels écarts ? 250 fois plus d’intelligence, d’heures de travail ? 

La cupidité sans limite est permise et possible dans le capitalisme et reste un des ressorts de l’enrichissement. Cette ignoble réalité doit être rappelée et combattue, notamment en relevant les salaires minimaux dans les conventions collectives. L’USS demande un minimum de 5000 francs. Avec quels moyens va-t-elle l’imposer aux patronat ?

José Sanchez
Données tirées du Rapport sur la répartition 2023 de l’Union syndicale suisse, janvier 2023