Contre l'Europe des polices et de la régression sociale!

Contre l’Europe des polices et de la régression sociale!

A l’heure qu’il est, les sondages s’obstinent à donner le NON gagnant en France contre la Constitution européenne ultra-libérale. Et pourtant, aux côtés du gouvernement Chirac-Raffarin, tout ce que l’Hexagone compte de sociaux-libéraux, qu’ils soient socialistes ou verts, se donnent la main pour tenter de faire triompher le OUI. Heureusement, rien n’y fait! Sur le terrain, le NON de gauche ne cesse de s’affirmer aux dépens de celui de la droite nationaliste, pour la défense des services publics, des droits sociaux – en particulier ceux des femmes – et des conditions de travail.

SolidaritéS apporte son soutien sans réserve à cette mobilisation populaire contre l’Europe des multinationales et appelle les électeurs et électrices français de Suisse à voter NON le 29 mai. Ce serait une victoire, en Suisse aussi, pour toutes celles et ceux qui entendent promouvoir une Europe des droits des salarié-e-s, des femmes, des jeunes en formation, des retraité-e-s, etc., une Europe pacifiste et solidaire du Tiers Monde. Ce serait en même temps une défaite des milieux dominants, de la droite patronale, dans ce pays aussi, qui s’ingénient à démonter les acquis sociaux et démocratiques du demi-siècle écoulé.

En Suisse, une semaine plus tard, le 5 juin, les électeurs-trices devront voter sur l’adhésion de la Confédération à l’Europe des polices: c’est le sens de la ratification des accords de Schengen-Dublin. Tandis que la majorité des forces bourgeoises, le Parti socialiste et les verts, appellent à voter OUI, et que la droite nationaliste, regroupée autour du comité référendaire, soutient le NON, une seule obsession, aux accents fortement sécuritaires et xénophobes, paraît dominer le débat: comment garantir la protection des Suisses contre la criminalité étrangère?

En effet, comme le fait remarquer l’ancien Conseiller national socialiste Nils de Dardel: «Le traité de Schengen supprime les contrôles d’identité aux frontières nationales intérieures de l’Europe, mais, en pratique, il conduit à des contrôles d’identité systématiques et aléatoires à l’intérieur des territoires nationaux. Autrement dit, en adhérant à Schengen, la Suisse connaîtra à l’intérieur de son territoire une augmentation très forte de la présence policière, des contrôles d’identité de tous et toutes. Le principe ‘pas de contrôle d’identité en l’absence d’un soupçon d’infraction’ ne sera plus respecté par la police. La liberté de chacun et de chacune est donc menacée».

Schengen met en place le système informatique SIS, qui intègre des données relatives à tous les individus recherchés en Europe. Ce dispositif policier concerne cependant un nombre croissant de personnes qui ne sont pas même soupçonnées d’activités criminelles ou délictueuses: en fait, seule une personne fichée sur 70 devrait être poursuivie pénalement, selon les lois actuelles. C’est Big Brother à l’échelle européenne! De son côté, Dublin institue le fichier des requérant-e-s d’asile EURODAC: un seul pays a la compétence de traiter une demande d’asile, les autres étant tenus de souscrire à sa décision. C’est un recul important de la protection des réfugié-e-s. De surcroît, la Suisse n’est pas contrainte à se conformer au droit européen qui, en matière de procédure, est sensiblement plus favorable aux requérant-e-s…

Dans ce débat, la place financière joue à «pile je gagne, face tu perds». Comme le note à nouveau Nils de Dardel: «Avec l’adhésion à Schengen-Dublin, la délégation suisse a réussi à glisser dans le traité une exception monumentale en faveur du secret bancaire suisse. Grâce à cette exception, la collaboration judiciaire et policière concernant la fraude fiscale (impôts directs) entre la Suisse et l’Union Européenne restera inexistante. Belle sécurité internationale celle qui laisse le champ libre aux délits économiques internationaux de corruption, de blanchiment et de fraudes portant sur des millions, des milliards d’euros!»

C’est pourquoi, contre l’Europe des polices et de la régression sociale, nous appelons nos lecteurs-trices français à voter NON à la Constitution européenne le 29 mai et nos lecteurs-trices suisses à voter NON à la ratification des accords de Schengen-Dublin le 5 juin. Il s’agit du même combat transfrontalier en faveur d’une Europe des droits sociaux et démocratiques.

Marie-Eve TEJEDOR