Ensemble, défendons nos salaires et nos emplois: OUI à la libre circulation

Ensemble, défendons nos salaires et nos emplois: OUI à la libre circulation

Le 25 septembre prochain, le corps électoral suisse sera appelé à se prononcer sur l’extension de l’accord de libre circulation aux dix nouveaux pays de l’Union Européenne, ainsi que sur les mesures d’accompagnement concoctées par le Seco. Rappelons que solidaritéS a décidé de refuser de s’associer à un référendum de gauche contre cet accord, qui a rassemblé une dizaine de milliers de signatures, contre septante mille pour la droite nationaliste.

Du côté du OUI, le débat est dominé par la droite patronale, c’est-à-dire les Radicaux, le PDC et une minorité de l’UDC, mais aussi par les syndicats, le PSS et les Verts. Du côté du NON, il est hégémonisé par la droite nationaliste et xénophobe, en particulier en Suisse alémanique, avec une majorité de l’UDC, de l’ASIN et des petites formations d’extrême droite. Une géographie électorale difficile à déchiffrer du point de vue des intérêts des salarié-e-s…

Dans ces conditions, les différents groupes de SolidaritéS ont décidé de défendre un OUI critique, dans la ligne de l’Appel «Abattre tous les murs et lutter ensemble avec le plombier polonais… pour nos conditions de travail» (disponible sur notre site: www.solidarites.ch), que nous vous appelons à signer. En effet, non seulement «la libre circulation est un droit fondamental de la personne humaine», mais elle confère aussi des droits aux salarié-e-s étrangers concernés (autorisation de séjour, regroupement familial).

Par ailleurs, nous sommes conscients que cette libre circulation restreinte, limitée au vingt-cinq pays de l’UE, n’est pas la nôtre. Nous sommes conscients aussi que les «mesures d’accompagnement», ratifiées par les Chambres, ne garantissent pas des droits élémentaires pour les salarié-e-s. C’est pourquoi, notre OUI le 25 septembre est indissociable de notre NON à la nouvelle Loi sur les étrangers (LEtr), mais aussi de notre lutte pour «la fixation d’un salaire minimum légal, modulé par région et par branche, [et pour] le renforcement de la protection légale contre les licenciements».

Les partisans d’un NON de gauche – du moins, ceux dont nous sommes le plus proches – affirment qu’ils ne combattent pas la libre circulation mais le dumping salarial et les licenciements. Pour eux, refuser l’extension de l’Accord de libre circulation permettrait aux syndicats de négocier des droits pour l’ensemble des travailleurs-euses dans un meilleur rapport de force. Le problème, c’est que la droite nationaliste est totalement maître du jeu et que les salarié-e-s d’Europe de l’Est et l’ensemble des salarié-e-s étrangers, sont ainsi pris en otage…

En même temps, une partie non négligeable des partisans du NON de gauche sont tentés par le discours de la préférence nationale. A Genève, le Parti du Travail et les Indépendants de l’Alliance de gauche ont ainsi couplé leur récolte de signatures pour le référendum avec une initiative cantonale pour renforcer la protection des résident-e-s sur le marché du travail local, qui visait à durcir le contingentement de la main d’œuvre étrangère dans le canton. SolidaritéS a clairement refusé la logique de cette initiative…

En Allemagne, Oskar Lafontaine, à la tête de la nouvelle alliance électorale du PDS et de la WASG (Wahlalternative Arbeit und soziale Gerechtigkeit – née d’une scission du SPD), déclare que «l’Etat est obligé de protéger ses citoyens et citoyennes [afin] d’empêcher que des pères de famille et des femmes ne deviennent chômeurs parce que des travailleurs étrangers acceptent des bas salaires et leur prennent leurs places de travail». Dans son nouveau livre, Politik für alle (Politique pour tous), il affirme même vouloir «retirer la citoyenneté à tous ceux qui ne parlent pas la langue allemande».

En France, c’est Malek Bouti, secrétaire national du PS et ancien président de SOS-racisme qui préconise «une nouvelle politique de l’immigration» qui limite le regroupement familial et la double nationalité, impose des connaissances linguistiques préalables à l’entrée en France, rende plus difficile l’acquisition de la nationalité, instaure un système de permis A-B-C (bleu-blanc-rouge) et prévoie «un livret de suivi sanitaire, scolaire et familial» pour les immigrant-e-s.

En Suisse, depuis les années 60, le contingentement de l’immigration est considéré comme le principal – voire le seul – moyen de réguler le marché du travail dans l’intérêt des salarié-e-s helvètes. Cela fait donc une quarantaine d’années que les mouvements xénophobes chassent sur les terres des syndicats et du Parti socialiste – voire du Parti du travail – … pour exiger des mesures de contingentement toujours plus radicales.

Dans un tel contexte, la lutte commune des travailleurs-euses suisses et immigrés pour la défense de leurs salaires, de leurs conditions de travail et de leur emploi, est la seule réponse à la pression croissante d’un patronat de plus en plus internationalisé. Cela suppose le renforcement de leur unité dans l’action, de leur organisation, mais aussi de leurs liens avec les expériences et les mobilisations de l’ensemble des salarié-e-s de l’Europe des quinze, des vingt-cinq, et au-delà.

Jean BATOU