Grand Conseil à droite, Conseil d'Etat à Gauche?

Grand Conseil à droite, Conseil d’Etat à Gauche?

Les résultats des élections au Conseil d’Etat genevois se soldent par une majorité «de gauche», pour autant que les quatre élus des Verts et du PSG puissent être rangés dans cette catégorie politique (de plus en plus élastique)…

En réalité, les commentateurs sérieux, comme l’ancien Conseiller d’Etat radical, Guy-Olivier Segond, ont salué une victoire du «Grand Centre», incarnée par le succès du PDC Pierre-François Unger (1er élu), des Verts Robert Cramer et David Hiler (2e et 3e élus) et du radical François Longchamp (4e élu).

La marginalisation apparente des Libéraux, qui perdent un siège (Micheline Spoerri), et dont le très réactionnaire Mark Muller n’arrive qu’en 6e position, renforce cette impression, de même que les mauvais résultats du candidat MCG, et surtout des deux candidats UDC (entre 13 et 16%).

Dans l’ensemble, le Conseil d’Etat ne compte plus aucune femme, tout comme le Conseil Administratif de la Ville de Genève… ce qui ne peut être perçu que comme une grossière insulte par plus de la moitié de la population de ce canton. Le mot d’ordre de «Femmes en colère» – rejeté par solidaritéS – n’a cependant pas décidé beaucoup de femmes de gauche à rajouter la libérale Spoerri aux quatre candidats verts et socialistes (M. Spoerri obtient 248 suffrages de plus que Mark Muller sur les bulletins verts, et 269 sur les bulletins socialistes).

Que signifie donc ce résultat? Tout d’abord, que la majorité de la population, qui a dit 6 fois non, en avril dernier, aux mesures antisociales du Conseil d’Etat sortant, attend du nouveau Conseil d’Etat qu’il maintienne les prestations à tout prix et trouve d’autres moyens pour «assainir» les finances publiques. D’où le succès des Verts, qui ne cessent d’affirmer qu’il suffit de rationaliser et de moderniser l’Etat, sans réduire ses missions sociales…

Une chose est sûre cependant: sans recettes supplémentaires, en particulier sur les gros revenus, les grandes fortunes et les bénéfices, il faudra couper sévèrement dans les services publics et dans le social. La majorité verte et socialiste du gouvernement, talonnée par un Grand Conseil très réactionnaire, va donc devoir se mettre au travail, sous le regard amusé des milieux patronaux.

Cependant, les jeux ne sont pas faits. En cas de barrages référendaires ou de mobilisations sociales d’envergure, cette nouvelle majorité devra y réfléchir par deux fois avant de passer malgré tout en force… parce qu’elle n’a pas été élue pour ça. Voilà un élément de fragilité institutionnelle qui préoccupe les partisans de la manière forte, comme le libéral Charles Poncet qui, au lendemain des élections, fulminait contre cette victoire du centre mou.

A l’inverse, c’est la raison pour laquelle solidaritéS avait précisément appelé à voter pour les quatre candidats verts et socialistes. Nous y voyons une raison supplémentaire, aujourd’hui, de soutenir activement les mobilisations politiques et sociales indispensables en faveur des plus défavorisé-e-s, des locataires, des services publics et des prestations qu’ils dispensent, qui seules pourront faire la différence.

Jean BATOU