Crise énergétique mondiale: plus grave sera l'effet de «serres »

Crise énergétique mondiale: plus grave sera l’effet de «serres »

Pollution, catastrophes, gaspillages, pénuries… la Planète va de plus en plus mal. Une évidence confirmée par les scientifiques, statisticiens… même les politiques s’y mettent. Les médias nous rapportent quotidiennement les dernières prévisions de plus en plus alarmantes, apocalyptiques à plus long terme1. Cette grêle d’informations sature le lecteur-trice qui, de sceptique jadis, cède à l’indifférence. Pas étonnant que la passivité gagne les victimes désarmées face à l’ampleur des catastrophes inéluctables, leurs manifestations atypiques, leur magnitude planétaire et surtout, la difficulté de la tâche nécessaire à les enrayer. Nous sommes tétanisés par l’effet de «serres» – bien plus sournois que celui de serre –, pris dans les griffes du capitalisme, retenus en otage dans le cycle infernal du productivisme, sommés de travailler, consommer, gaspiller, polluer sous peine de se voir privés de moyens d’existence. Cette mise sous contrainte sociale et économique pourrait tout autant être nommée effet de «serfs» car nous serons incapables d’infléchir les choix suicidaires que nous imposent les maîtres et seigneurs sans devoir les embastiller.

Tous les aspects de la crise écologique planétaire qui s’annonce sont finement étudiés, sauf un: comment en sortir. Les scientifiques savent avec précision quel sera dans 20 ou 50 ans le nombre de mètres dont s’élèvera le niveau des mers, de degrés d’élévation de la température terrestre, de morts causés par les polluants et cancérogènes industriels, de victimes par manque d’eau, d’habitat ou de médicaments, de migrant-e-s contraints de forcer les digues de l’exclusion, d’espèces vivantes qui disparaîtront à jamais… Ce que nul n’a su prévoir c’est l’éventualité d’une éradication de ces plaies d’Egypte envahissant la terre entière. Le désarroi est d’autant plus grand que les solutions techniques existent, que regorgent les moyens financiers pour les mettre en œuvre, que les Etats s’époumonent en Conférences internationales, édictant moult Protocoles d’Accord, tous aussi laborieux que vains. Cette réponse là, nuls d’autres que les exploité-e-s et les opprimé-e-s, ne pourront la donner.

Derrière la vitrine des «Fêtes»

Pour les lecteurs-trices éblouis par le faste des ouvertures nocturnes de Noël 2005, étouffés par les avalanches de cadeaux achetés ou à jeter, expédiés à grand renfort de kérosène vers des plages épargnées, effarés par la détresse des privés d’emploi, de papiers, de sécurité, et de chauffage et qui en sont morts, il convient de leur donner brièvement les dernières nouvelles de la Planète, piquées au hasard:

  • Economies d’énergie aux calendes grecques . « La Suisse a consommé 2.1% de plus d’électricité entre octobre 2004 et septembre 2005 que pendant la même période précédente […] mais la production d’électricité en Suisse a diminué de 5.4% ».2
  • Asile pour les éco-réfugiés . « Le réchauffement climatique va entraîner une hausse du niveau de la mer de 5 mm par an au XXIe siècle […]. Il existe des craintes fondées pour que le nombre de personnes fuyant des conditions environnementales insoutenables augmente de manière exponentielle au moment où le monde subit les effets du changement climatique ».3
  • Le prix des profits du pétrole . « Les catastrophes naturelles de 2005 coûteront 200 milliards de dollars […]. L’année 2005 a connu les plus grandes pertes financières dues aux catastrophes naturelles régies par les conditions climatiques. Elles découlent du nombre record de cyclones tropicaux, de précipitations sans précédent et de la “montée” des ouragans vers l’Europe». 4
  • Blablater, ça pollue . « Sachant que chaque passager d’un vol transatlantique aller-retour génère l’émission de plus d’une tonne de dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, […] la délégation française à la conférence de l’ONU sur le changement climatique qui se tient à Montréal [en aura produit] quelques 60 tonnes ».5
  • L’agriculture au régime sec . En France, «2006 pourrait aussi être une année très difficile, voire historique en matière de sécheresse […]. Le déficit pluviométrique constaté en France est «jugé «très préoccupant» et également présent en Espagne et au Portugal».6

La guerre du feu aura bien lieu

Mais la nouvelle qui a fait le plus de bruit aura été la salve d’avertissement russe à l’Europe, tirée au gaz naturel. Cette ouverture des hostilités n’est qu’une provocation de plus dans l’escalade pour le contrôle des combustibles fossiles, qui sont le nerf de la poursuite du productivisme capitaliste et le nerf complémentaire du «destructivisme» impérialiste: « Le contrôle des ressources énergétiques se révèle de jour en jour l’alpha et l’oméga des équilibres mondiaux au XXIe siècle ».7

En Europe, la consommation de gaz naturel a presque quintuplé au cours des dernières 30 années et devrait doubler vers 20308 et le quart de son approvisionnement énergétique dépend du gaz russe dont le 80% transite par l’Ukraine. En Suisse, le 13% de l’approvisionnement énergétique en dépend pour la cuisson, le chauffage et la production d’électricité.9 Or, comme toute ressource non renouvelable, les combustibles fossiles étant en cours d’épuisement, on assiste à une ruée sur les derniers stocks. Ainsi, le pactole est accaparé par les puissances dominantes au détriment des dominé-e-s dont les besoins vitaux en feu de chauffage, de cuisson ou d’éclairage ne seront plus assurés.

Face à ces sombres prévisions, il faut que les exclu-e-s réussissent à couper le contact de la monstrueuse machine productiviste dont l’emballement n’aura jamais été aussi inquiétant. Bonne année 2006, de résistance et de lutte!

François ISELIN

  1. Notre journal solidaritéS en porte une part de «responsabilité» puisqu’il n’a cessé d’alimenter sa rubrique «écologie» de révélations et d’alertes.
  2. 24 Heures , 6.1.06
  3. Le Monde , 18-19.12.05
  4. Le Monde , 17.12.05
  5. Le Monde , 7.12.05
  6. Le Monde , 7.1.06
  7. Le Monde , 7.1.06
  8. Le Monde , 6.1.06
  9. 24 Heures , 3.1.06