Droite complice des spéculateurs contre Rhino

Droite complice des spéculateurs contre Rhino

Suite au jugement rendu par le Tribunal de première instance, qui a décidé la dissolution de l’association RHINO, et au récent Projet de loi déposé par les Libéraux, un habitant fait part de ses réflexions.

De nombreux citoyen-nes sont choqués de voir qu’une instance judiciaire puisse argumenter et conclure, que l’exercice de droits fondamentaux, notamment les droits de recours et d’initiative, est un crime ou un délit. On ne peut voir dans cette interprétation juridique que l’inquiétant profil d’une justice partisane, alignée sur les récentes déclarations du Procureur Général, et faisant fi des bases élémentaires d’un véritable Etat de droit.

Dissolution de l’association RHINO

La criminalisation systématique d’associations citoyennes est désormais évidente de la part des partis de droite (voir les commentaires du libéral Jornot dans la «Tribune de Genève»). Ils perdent ainsi chaque jour un peu plus de crédibilité dans l’exercice d’un pouvoir démocratique digne de ce nom.

En même temps, chaque jour rapproche les spéculateurs responsables, qui ont pillé la BCG de la prescription et de l’impunité. Un des protagonistes de «L’affaire RHINO» est en effet inculpé depuis 5 ans pour complicité de gestion déloyale et détournement de loyers – et toujours pas de procès en vue! Chaque jour passé est un jour gagné pour les affairistes de l’immobilier, que personne ne songerait à taxer de «malfaiteurs». Chaque jour passé souligne un peu plus l’enracinement d’une justice de classe et la faillite du Parlement de notre canton, incapable de défendre la Constitution, notamment son article 10A (voir encadré).

Projet de loi: de la poudre aux yeux…

En gros, ce projet de loi vise à donner plus de pouvoir au procureur général en cas d’occupation de longue durée d’un immeuble, pour faire directement appel à la police et procéder à l’évacuation des occupant-e-s.
Aux dires des auteurs du PL 9799, il paraîtrait que l’association RHINO a rompu avec l’usage, qui veut que les occupant-e-s d’une maison fassent leurs valises dès que le propriétaire s’intéresse de nouveau à son bien. Or, c’est précisément pour éviter ce genre de situation que les habitant-e-s de RHINO ont toujours refusé le principe des «contrats de confiance», qui officialisent la précarité du logement dans les maisons occupées.

Pas de rupture de parole ni d’engagement, mais plutôt une cohérence intégrale avec les buts de l’association RHINO. Cet immeuble doit revenir à la collectivité et ne pas retomber dans les pattes d’un spéculateur. Au contraire, les auteurs du PL se profilent clairement pour que l’Etat garantisse plus activement le droit de propriété, même en cas de défaillance de la part des propriétaires.

Après la grande période de spéculation, ses bénéficiaires avaient disparu dans la nature avec l’argent de la banque cantonale. Quinze ans plus tard, alors que les affaires reprennent, les immeubles peuvent à nouveau servir et les habitant-e-s être évacués pour cause d’obstacle aux affaires! Merci de vouloir pérenniser dans la loi les intérêts de la spéculation immobilière!

Ce Projet de loi posera des problèmes au niveau du droit fédéral (supérieur), car il s’y oppose nettement. Par ailleurs, son caractère revanchard saute aux yeux: la partie n’est pas finie et on cherche à changer les règles du jeu! La Cour Européenne des Droits de l’Homme a rendu un arrêt spécifique pour éviter ce cas de figure…

Le Grand Conseil actuel fait tout son possible pour asseoir le pouvoir des gros propriétaires et conforter leur emprise sur la population genevoise. Il agit ainsi de manière délibérée et par tous les moyens, en totale contradiction avec son mandat de gouverner dans l’intérêt général, et va continuer à aggraver la crise du logement dans le canton. Seule victime annoncée: la population genevoise. Seul coupable: le marché spéculatif et ses sbires au pouvoir.

Maurice PIER


Art. 10 A

1 Le droit au logement est garanti.
2 L’Etat et les communes encouragent par des mesures appropriées la réalisation de logements – en location ou en propriété – répondant aux besoins de la population.
3 A cette fin, dans les limites du droit fédéral, ils mènent une politique sociale du logement, notamment par:
a la lutte contre la spéculation foncière;
b la construction et le subventionnement de logements avec priorité aux habitations à bas loyers;
c une politique active d’acquisition de terrains;
d l’octroi de droits de superficie à des organes désireux de construire des logements sociaux et ne poursuivant pas de but lucratif,
e l’encouragement à la recherche de solutions économiques de construction;
f des mesures propres à la remise sur le marché des logements laissés vides dans un but spéculatif;
g des mesures propres à éviter que des personnes soient sans logement, notamment en cas d’évacuation forcée;
h une politique active de concertation en cas de conflit en matière de logement.