RIE 3

RIE 3 : Encore un effort, camarades!

La dynamique de la campagne sur la Troisième Réforme des entreprises (RIE 3) semble s’être inversée. Des sondages annoncent le refus de la réforme. Des voix à droite s’élèvent contre ce projet, l’ancienne conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf en tête. Des économistes libéraux s’expriment contre un texte déséquilibré. Le bateau RIE 3 prend l’eau. Jusqu’au naufrage?


L’une des actions de solidaritéS Jeunes contre la RIE 3 (vidéo: solidarites.ch)

Rien n’est moins sûr. Il est donc crucial de lutter jusqu’au dernier jour, tant le vote s’annonce serré. Ce d’autant qu’en face, le patronat et les partis de droite mettent le paquet, aidés par plusieurs notables locaux du PS et des Verts. Une campagne a maxima qui pourrait se retourner contre le camp bourgeois, tant les méthodes employées pour faire passer la pilule auront parue des plus grossières à la population.

Arsenal de propagande

On aura tout entendu dans cette campagne: exode de dizaines de milliers d’entreprises à l’étranger, pertes fiscales incommensurables, suppression de centaines de milliers d’emplois à court terme… A en croire les partisans de la RIE 3, la Confédération et les valeureux Helvètes qui la peuplent joueraient leur peau à refuser une réforme qui serait inéluctable. Un message apocalyptique soutenu par des moyens financiers exorbitants.

Malgré l’opacité antidémocratique du financement des campagnes politiques en Suisse, il n’est guère difficile d’observer que les moyens financiers investis par le camp du oui dans cette campagne dépassent considérablement celle du non. En plus des quantités phénoménales d’affiches pour la RIE 3, de la publicité dans les journaux et sur la Toile, la population aura reçu entre 3 et 5 tous-ménages en faveur de la RIE 3. Tantôt provenant des faitières patronales, tantôt des partis de droite, tantôt même des pouvoirs publics. Voir les méthodes fort peu démocratiques du conseiller d’Etat Dal Busco (dont nous parlons en pages genevoises).

Un dérapage parmi bien d’autres. A la fin du mois dernier, c’est la justice de Bâle qui condamnait l’Union suisse des arts et métiers (USAM) pour photomontage frauduleux. Ce dernier montrait des opposant·e·s à la RIE 3 (dont des militant·e·s de solidaritéS) lors du dépôt du référendum à Berne, portant une banderole «Des emplois? On s’en moque», alors que la bannière originale contenait «RIE3: NON». C’est d’ailleurs dans ce même libelle que figurent des élu·e·s opposés à la réforme soudain devenus des «élus de gauche favorables à la RIE3».

Mitraille de mensonges

Une campagne à la hussarde donc, et pas seulement sur la forme: les partisans de la RIE 3 ne font pas l’économie de mensonges dans leur propagande. C’est l’artillerie lourde de la désinformation, dont voici deux exemples.

MENSONGE nº 1 
« La RIE 3 ferait payer plus d’impôts aux multinationales, moins aux PME ».

Par les trois nouveaux privilèges fiscaux de la RIE 3, certaines multinationales pourront déduire 80% de leur impôt sur le bénéfice, déjà réduit de presque moitié dans certains cantons. Quant aux PME, rappelons une vérité qu’on se garde bien d’évoquer: en moyenne, 75% des entreprises ne paient pas d’impôt sur le bénéfice. A l’inverse, une toute petite minorité d’entre elles, celles qui font le plus de profit, paient l’essentiel de cet impôt. Baisser cet impôt revient donc à engraisser les patrons et actionnaires qui génèrent déjà les plus grands profits. Les petits entrepreneurs, eux, passeront à la caisse comme la majorité de la population.

MENSONGE nº 2
« 200 000 emplois seraient menacés si la RIE 3 est refusée ».

A mesure que la campagne avance, ce chiffre a augmenté. Des quelques milliers annoncés par le Conseil fédéral en juin 2015, nous voici à ce chiffre farfelu. Il a été établi par l’institut privé Bak Basel, payé près de 200 000 francs par economiesuisse pour leur servir la soupe. Un franc par suppression d’emploi, en somme. Tous ces chiffres ne sont qu’enfumage. Souvenons-nous des mensonges de la RIE 2, qui nous a fait perdre sept milliards de francs, alors que le Conseil fédéral en avait promis un seul.

Les multinationales ne partiront pas, et continueront de payer les salaires. La fiscalité suisse est déjà très concurrentielle et s’ajoute à des conditions-cadres sans égal au plan mondial: stabilité politique, centralité de la place économique suisse, système bancaire, qualité des infrastructures et des transports, etc.

A l’inverse, la RIE 3 et ses milliards de pertes sèches annuelles ne manqueront pas de provoquer des licenciements dans la fonction publique.

Pierre Conscience


Un autre projet est possible

Le patronat et la droite mentent encore lorsqu’ils prétendent qu’il n’y aurait pas de projet alternatif. Plusieurs contre-projets ont été mis sur la table lors de la discussion aux Chambres fédérales. Si le peuple rejette la RIE 3, une nouvelle discussion s’ouvrira sur un Plan B, qui forcera le parlement à se pencher sur un projet socialement juste, qui ne se contentera pas de favoriser quelques nanti·e·s et limitera une concurrence fiscale désastreuse. Les élu·e·s ne pourront pas, une fois de plus, sacrifier la population au profit des actionnaires. Ce Plan B devra donc viser trois objectifs:

(1) un taux unique pour toutes les sociétés ;

(2) une limitation de la concurrence fiscale intercantonale ;

(3) le maintien des recettes actuelles de l’imposition des personnes morales. (pas de pertes pour les collectivités publiques et la population)

Ce plan permettra de combattre à la fois l’évasion fiscale, la concurrence fiscale intercantonale et les politiques d’austérité. Nous appelons l’ensemble des électeurs et électrices à voter et faire voter non à la RIE 3 pour défendre avec nous ce Plan B, pour la justice fiscale, pour la défense des services publics, pour le maintien des prestations sociales et pour l’emploi.