Lamunière n'emportera pas la Tribune au ciel
Lamunière n´emportera pas la Tribune au ciel
Jeudi 12 décembre en fin daprès-midi, le Tout-Genève se pressait à Cornavin pour accueillir en fanfare la nouvelle conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey. Pourtant, au même moment, avait lieu un rassemblement à nos yeux plus important. Devant les locaux de la Tribune de Genève (TG) démarrait en effet une manif avec environ cent-cinquante participant-e-s: travailleurs-euses, décidés à défendre leurs emplois, salarié-e-s et syndicalistes solidaires.
«Lamunière sen va-t-en guerre La rirette Lamunière sen va-t-en-guerre contre le CIEG. En chemin, il rencontre La rirette Les salarié-e-s qui sont fâchés ! (bis)»cest sur cet air et dautres! – qua démarré le rassemblement.
Y participaient une soixantaine de douvrières-ers descendus du CIEG – le centre dimpression du groupe Edipresse à Vernier – qui annonçaient ainsi leur très ferme détermination de se battre contre la décision, patronale et unilatérale, de transfert de limpression de la TG au centre dimpression dEdipresse à Bussigny (CIEL), au nom du renforcement du «niveau de profitabilité», déjà considérable, du groupe.
Le CIEG étranglé
Cette décision, avec comme «contre-partie» le passage à Genève de limpression du Temps, quotidien dun tirage bien inférieur et dun avenir bien plus incertain que celui de la TG, annonce lintention patronale dorchestrer une mort lente et la fermeture à terme de ce CIEG, quEdipresse avait repris en 1995 – littéralement pour une bouchée de pain – au moment de la mort de La Suisse.
Au-delà de la défense légitime de leurs emplois par les premiers-ères concernés, cette manifestation dénonçait lensemble du processus de démantèlement, concentration et de «rationalisation» capitaliste à luvre dans le secteur de la presse, qui a déjà laissé sur le carreau à Genève, tant La Suisse que le Journal de Genève. Ce processus menace non seulement les emplois – ceux des imprimeurs comme aussi ceux de lensemble de la chaîne humaine allant de la rédaction au portage des journaux – mais met de plus en péril la diversité rédactionnelle, lancrage local des journaux et la liberté de la presse elle-même.
Rédacteurs solidaires
Fait marquant de la manifestation: un arrêt de travail symbolique dune heure par une quarantaine de journalistes de la société des rédacteurs de la TG, dont la porte-parole est venue apporter un chaleureux message de solidarité aux imprimeurs mobilisés ainsi que lexpression de la volonté de faire front en commun contre le démantèlement programmé.
Il faut savoir en effet que celui-ci est déjà à luvre à la TG, sous prétexte de «synergies» diverses et détude de nouvelles formules de journal, les spécificités de 24H et de la TG sont en train dêtre gommées et Edipresse prend un chemin dont le terme serait un quotidien unique avec un minimum dhabillage local cosmétique.
Lutter ensemble
Mais les journalistes ne sont pas les seuls à avoir manifesté leur soutien, du SSP au SIB, du syndicat de la branche, Comedia, en passant par le cartel intersyndical du secteur public, par la communauté genevoise daction syndicale (CGAS), par des porte-paroles de différents secteurs dEdipresse même, nombreux sont les syndicalistes qui ont martelé quils étaient concernés, solidaires et que les plans dEdipresse se verrraient contrés, avec leur appui et celui des organisations et travailleurs-euses quils représentaient.
Au-delà du nombre, la manifestation à été un moment particulièrement chaleureux de solidarité ouvrière. Elle sest conclue par un déplacement au parc des Bastions où la nouvelle conseillère fédérale a été accueillie avec chants et banderoles par des travailleurs-euses du CIEG, alors que le public était interpellée et informé par un tract ad hoc.
Mais ce nétait quun début, le combat continue!
Pierre VANEK
Vive la concurrence?!
La commission de la concurrence (ComCo) sest illustrée ces derniers temps par son zèle néolibéral, consistant à vouloir démanteler les monopoles publics en matière de distribution délectricité, en anticipant la Loi sur le marché de lélectricité (LME) pour allant au devant des vux des multinationales du secteur, mais sans anticiper la volonté populaire manifestée par le refus de cette loi.
Aujourdhui, ce même organisme vient dapporter sa caution à la poursuite de la concentration de la presse, évoquée dans larticle ci-contre, en autorisant le groupe Edipresse à consolider encore son monopole inquiétant sur la presse en Suisse romande.
Ce sont deux quotidiens du groupe Corbaz, La Presse Riviera Chablais tiré à Montreux et La Presse Nord Vaudois tiré à Yverdon, que rafle ainsi Lamunière. Il faut dire que celui-ci sétait, paraît-il, dépensé en visites à ce sujet aux conseillers fédéraux Leuenberger et Couchepin!
Avec cette décision, en moins de deux ans, ce sont une douzaine de journaux indépendants romands qui sont tombés au mains de grands groupes de presse: Edipresse ou Hersant, qui a mis le pied récemment en Romandie et qui est propriétaire de LExpress et LImpartial à Neuchâtel, comme du journal La Côte de Nyon.