Un enseignant colombien pour l’échange humanitaire des prisonniers et la paix
Un enseignant colombien pour léchange humanitaire des prisonniers et la paix
Gustavo Moncayo est un père de famille dorigine paysanne,
âgé de 56 ans, professeur de sciences sociales dans un
collège secondaire dun village de Colombie. En
décembre 1997, son fils aîné, qui faisait son
service militaire dans la Police nationale, a été fait
prisonnier avec dautres soldats par les FARC-EP à
lissue de violents combats autour de la base de
télécommunications du mont Patascoy, au cours desquels
des dizaines de militaires sont tombés. Pablo Emilio Moncayo, le
fils du «prof» Moncayo est détenu depuis lors.
Durant des années, «le prof» na cessé
de réclamer des actions plus décidées de la Police
nationale, du Ministère de la défense, du
Ministère de lintérieur, du Parlement et de la
Présidence de la république, mais sans recevoir aucune
réponse. Lassé de tant dindifférence,
après 9 ans dattente et de passivité du
gouvernement et de la société, afin que le sort des
prisonniers de guerre change enfin grâce à des mesures
politiques qui permettent un échange humanitaire, «le
prof» Moncayo cest comme ça que tout le
monde lappelle en Colombie a décidé de
faire quelque chose pour attirer lattention de tout le pays sur
la douleur des familles de prisonniers.
Son idée, qualifiée par certains de «folle»,
a été de se lancer dans une marche à pied en
solitaire de 800 kilomètres, de Sandoná, le village
où il habite au Sud-Ouest de la Colombie, jusquà
Bogotá. Depuis le début, il navait quun
seul objectif: que personne ne reste indifférent à cette
réalité qui touche les Colombien-nes de très
près. Pour cela, tout au long de son parcours, «le
prof» a privilégié le contact avec les habitants,
femmes et hommes: paysans, travailleurs, syndicalistes,
étudiants, associations de parents, élus locaux, membres
dONGs, victimes de guerre, en somme tous ceux et celles qui
voulaient bien lécouter.
Durant 48 jours, «le prof» Moncayo a marché sans
sarrêter, aux dépens de sa santé, avec la
ferme conviction, comme il na cessé de le
répéter, que la question de léchange
humanitaire ne pouvait plus attendre, était indispensable, et
concernait tout le monde, pour ouvrir les voies du dialogue et
parlà de la paix en Colombie. Son discours nest pas
nouveau. En effet, il a été défendu avant lui par
la gauche démocratique légale, les églises, les
secteurs du centre, et même de la droite, non parasités
par la narco-politique, mais surtout par les FARC-EP elles-mêmes,
qui sont les forces insurgées les plus importantes du pays.
Depuis quil est parti de son village «le prof»
Moncayo a disposé de lourdes chaînes autour de son cou,
quil a promis de porter jusquau jour où son fils
serait libre. A son arrivée à Bogotá, une foule de
plus de 500 mille personnes sétait donné
rendez-vous pour laccueillir au long des principales rues de la
capitale, jusquà la place Bolívar, en face du
Parlement. Une fois arrivé là, «le prof»
Moncayo a planté sa tente et y a vécu
jusquà son départ pour la France, à la
mi-août, à linvitation des comités Ingrid
Bétancourt.
Ce qui est nouveau dans lattitude du «prof» Moncayo,
et force aussi le respect, cest quen tant que simple
citoyen et père de famille affecté par la guerre,
grâce à un efffort surhumain visant à attirer
lattention, il est parvenu à concrétiser ce que
des millions de Colombiens, femmes et hommes, victimes directes et
indirectes de la guerre, ressentent, sans pour autant arriver à
lexprimer. De surcroît, en agissant ainsi, le professeur
Moncayo a lancé un défi au paramilitarisme criminel qui
est à la solde du régime actuel.
Nous avons appris de source directe, que lors de sa tournée en
Europe, il a été invité par les autorités
italiennes et par le Vatican, avant de voyager en Espagne, où il
a été accueilli par diverses ONGs.
A la fin novembre, il est très probable que nous le recevrons
à Genève pour prendre connaissance du témoignage
sur ce quil a vécu, mais aussi sur ce quil pense
de la nécessité qui simpose, comme avant,
dun échange humanitaire des prisonniers en Colombie.
Pour finir, nous devons ajouter, quil y a quelques jours, nous
avons reçu un message de Yuri, la fille du «prof»
Moncayo, qui nous faisait part, avec beaucoup
dinquiétude, du fait que sa famille en Colombie, ainsi
queuxmêmes durant leur séjour en Europe, avaient
reçu des menaces de mort. Une raison de plus pour les recevoir
sans attendre à Genève!
Alfredo Camelo