élections communales lausannoises: quand la campagne de l’UDC se fait même sans elle
élections communales lausannoises: quand la campagne de lUDC se fait même sans elle
La démagogie xénophobe
sinvite dans la campagne pour les élections communales
lausannoises. Le Parti radical-libéral a annoncé le
lancement dune initiative pour linterdiction de la
mendicité, prenant de vitesse lUDC qui venait de
déposer au Conseil communal deux postulats au contenu similaire.
«Sur cette question, on a toujours mené le
bal », sindigne le ténor de
lextrême droite lausannoise Claude-Alain Voiblet,
visiblement fâché davoir été pris de
vitesse. « Il est dépassé. Il nous traite
dopportunistes, alors quen la matière, on
na aucune leçon à recevoir de ce
parti », réplique le radical-libéral Nicolas
Gillard. Les bisbilles entre la droite et lextrême-droite
pourraient prêter à sourire, si la surenchère
sécuritaire de lune ne tendait pas à
légitimer les discours racistes de lautre. Une
banalisation du racisme dautant plus inquiétante
quelle gagne même épisodiquement les rangs de la
gauche : « Avec les gitans, cest
inévitable. Cest dans leurs murs. Un trait de
caractère profond », avait ainsi lâché
le syndic Daniel Brélaz constatant quelques dégâts
commis par 200 personnes accueillies au Chalet-à-Gobet en
juillet dernier (24 Heures, 17.7.10).
Bandes organisées ?
A en croire les radicaux-libéraux, la mendicité serait le
fait de « bandes organisées, qui simulent la
maladie » : un récent rapport de la police
lausannoise a pourtant montré quil ny avait en
réalité ni bandes ni réseaux organisés mais
seulement une vingtaine de mendiants roms de passage (24 Heures, 22.
12. 09). Dailleurs, comme le relève Philippe Leuba,
Conseiller dEtat dun parti qui ne semble pas à une
contradiction près : « La mendicité
organisée par des réseaux est déjà
punissable. » (24 heures, 18.9.09) Pire encore selon les
libéraux-radicaux, la mendicité nuirait
« à limage de Lausanne ». On
pourrait les rassurer en rappelant que la ville est déjà
connue internationalement comme la capitale des multinationales du
tabac: Philip Morris, British American Tobacco et autres empoisonneurs
publics attirés à coup de rabais fiscaux par le canton et
la Municipalité dite de gauche (Marlène Bérard,
candidate radicale-libérale à la Municipalité de
Lausanne, travaille dailleurs comme juriste chez Philip Morris).
A en croire la dernière initiative nationale
lancée par les radicaux-libéraux en vue des
élections fédérales, ceux-ci se targuent de lutter
contre « la bureaucratie ». Or,
linterdiction de la mendicité conduirait à la mise
à lamende des mendiants, comme cest le cas
à Genève: situation à propos de laquelle
lavocate au barreau genevois Dina Bazarbachi souligne que
« les dizaines de milliers de francs
dépensés chaque année par lEtat pour
amender et poursuivre en justice les mendiants seraient plus utiles
pour combattre la pauvreté extrême et la stigmatisation
dont ils souffrent. Car ces gens nont quun
désir : trouver du travail, ce qui est impossible en
raison de leur stigmatisation systématique. » (Le
Courrier, 15.6.10)
Punir la misère
Une interdiction de la mendicité conduirait à une
stigmatisation de la misère dont les conséquences pour
certains Roms pourraient être dramatiques. Dina Bazarbachi
relève ainsi le cas dune mendiante emprisonnée
avec ses deux enfants parce quelle navait pas pu payer
4400 francs damende (Le Courrier, 17.7.09). Le Groupe sida
Genève (GSG) a, quant à lui, souligné que des
jeunes Roms avaient commencé à se prostituer suite
à linterdiction de mendier. La Tribune de Genève
(8.9) révélait même le cas particulièrement
sordide dun Rom de 13 ans découvert en train de se
prostituer dans les toilettes publiques de la gare Cornavin, en
compagnie dun homme de 71 ans. On mesure dès lors combien
est hypocrite lenrobage humaniste par lequel le Parti
radical-libéral cherche à justifier linterdiction
de la mendicité en invoquant la protection de lenfance.
Dans les faits, les mendiants faisant tendre la main à des
mineurs sont déjà expulsés du territoire
lausannois par la police (20 Minutes, 18.1.09). Mais plutôt que
ces expulsions qui ne résolvent aucun problème,
lurgence est à la mise sur pied dun centre
daccueil permanent pour les mendiants, qui permettrait de
surmonter leur situation dextrême précarité.
Tans que ce préalable nest pas posé, les projets
de scolarisation ou de placement en foyer par la force des enfants
impliquant une séparation de leurs parents ne peuvent conduire
quà des situations inhumaines.
Hadrien Buclin