Suisse-Union européenne
Suisse-Union européenne
Libre circulation: vers un nouveau référendum
La prochaine campagne sur la libre
circulation des personnes (il y en aura dautres!) est
lancée. Le sujet a occupé une large place de la
dernière séance du parlement fédéral,
autour dun problème tactique, aux enjeux non
évidents pour les non-spécialistes de la vie
parlementaire helvétique: fallait-il coupler dans un seul
arrêté la confirmation des accords bilatéraux 1 et
leur extension aux nouveaux membres de lUE, Roumanie et
Bulgarie, ou au contraire en faire deux arrêtés distincts.
Les accords bilatéraux 1, signés en 1999 avec
lEurope à 15 Etats, sont des accords de
libre-échange et forment un tout; des 7 accords, un seul pose
problème en Suisse, cest la libre circulation des
personnes. Les facilités de circulation des marchandises, des
capitaux, des investissements et la participation aux programmes de
recherche européens ne sont pas contestés. Pour
lUnion Européenne, refuser un article ou
lextension aux nouveaux membres, cest refuser
laccord. Il nous paraît logique de ne faire quun
arrêté, puisque, au bout du compte, il sagit de
savoir si la Suisse poursuit ou non dans la voie des accords
bilatéraux.
Un ou deux arrêtés?
Pour la politique intérieure helvétique, deux
arrêtés ou un seul, cest très
différent, car cela ouvre la possibilité de faire des
référendums distincts. LUDC sest battu au
parlement pour avoir deux arrêtés séparés,
espérant lancer un seul référendum contre
lextension des accords bilatéraux à la Roumanie et
la Bulgarie, qui lui ouvrait de nouvelles perspectives
daffichage raciste, cette fois avec les roms roumains dans le
collimateur; elle aurait aussi eu de meilleures chances de liquider les
accords bilatéraux et de renforcer le repli nationaliste
quelle préconise, sans avoir à sen prendre
formellement aux accords existants. LUDC a pu, dans un premier
temps, attirer le parti radical dans son camp, mais ce dernier, mis en
minorité au Conseil des Etats, a finalement renoncé
à lidée de soumettre au peuple deux accords et
lUDC, elle-même divisée, sest
retrouvée quasi seule à refuser
larrêté unique. Un référendum a
immédiatement été annoncé par lUDC
(sans Blocher qui, lui, se dit opposé au
référendum). La votation aura lieu en février ou
mai 2009. Peu importe les choix tactiques de lUDC qui
hésite entre un référendum lancé par les
nationalistes de lASIN, des «démocrates
suisses» et de la Lega, quelle soutiendrait ou un
référendum commun. Quels que soient les états
dâme de Blocher, le référendum aura lieu et
lUDC en sera le principal porte-parole.
Référendums à répétition
La voie des accords bilatéraux avec lUE (au lieu de
ladhésion pure et simple à lUnion
Européenne), choisie par tous les partis gouvernementaux (y
compris lUDC), offre au patronat ce dont il a besoin tout en
garantissant aux nationalistes xénophobes la possibilité
de lancer des référendums à
répétition contre les immigrés en les
stigmatisant: hier le plombier polonais, demain le rom roumain et
après-demain les balkaniques. Le Conseil fédéral
avait promis au parlement que toute extension de laccord aux
nouveaux pays membres de lUE serait soumise au
référendum facultatif. Les accords bilatéraux 1,
entrés en vigueur en 2002, prévoient une confirmation en
2009, au moment-même (hasard du calendrier de lUnion
européenne) où la Roumanie et la Bulgarie deviennent
membres de lUnion.
Nous avons déjà eu un référendum UDC en
2005 contre lextension aux huit Etats de lEurope de
lEst qui ont adhéré en 2004 à lUE.
Nous aurons un nouveau référendum contre
lextension à la Roumanie et Bulgarie, et demain
dautres référendum sont à prévoir
contre lextension aux prochains Etats qui vont adhérer
à lUE (Croatie, Macédoine,
Monténégro, Serbie,….), à moins quun
refus en 2009 remette toute la machine en question.
Des intérêts opposés
Les patrons défendent laccès le plus libre
possible au marché européen pour leurs marchandises et
capitaux et souhaitent disposer dune main-doeuvre en
suffisance, répondant à leurs exigences de qualification
et de flexibilité. solidaritéS, avec toute la gauche
politique et syndicale, défend les conditions de vie et de
travail de lensemble des salarié-e-s (salaires, droits
sociaux, logement, permis de travail, …), indépendamment de
leur statut ou de leur absence de statut, et cette défense passe
par le refus des discriminations liées à lorigine
ou à la nationalité. Si nous défendons la libre
circulation, cest pour demander un statut pour tous les
sans-papiers et mieux combattre les patrons. Lobjet du vote,
cest la reconduction des accords bilatéraux 1
étendus à toute lUE (25 Etats).
LUSS décidera à la fin de lannée
«Jusquà ce jour, lUnion Syndicale Suisse a
dit OUI à la libre circulation des personnes avec lUnion
Européenne, mais à la condition que les salaires et les
conditions de travail soient protégés à
laide de mesures daccompagnement.» Elle prendra
position définitivement à la fin de lannée.
Dici là elle va tenter de monnayer son soutien par un
renforcement des dites mesures daccompagnement et
dextension de conventions collectives. Mais on voit mal
quelle puisse passer dans le camp du NON.
Combattre la xénophobie, défendre le monde du travail
Lun des fondements de solidaritéS est la volonté
de lutter contre toute xénophobie et racisme, pour la
défense de lensemble des salarié-e-s, en
particulier des plus faibles qui nont pas de statut. Cest
à partir de cette conception que solidaritéS
décidera de sa position formelle dans le courant de
lautomne.
Une chose paraît certaine: la campagne sera un remake de la
votation de 2005 et tournera autour du dumping salarial et des
«mesures daccompagnement». Les
inégalités croissantes produites par les politiques
identiques des gouvernements européens et des autorités
helvétique suscitent, chez une partie des travailleurseuses, un
rejet de la libre circulation, ressentie comme cause des
difficultés sociales quils vivent. Mais celles et ceux
qui viennent de lUE ou de pays qui sont sur la liste
dattente dadhésion à lUE voient bien
que les accords bilatéraux ont renforcé leur
sécurité et leurs possibilités de se
défendre et ressentent, avec raison, certains discours sur le
dumping salarial comme autant dattaques contre leur
communauté.
Comment construire et renforcer lunité des travailleurs
et travailleuses, quels que soient leur origine et leur statut, est
bien la question que nous aurons, une nouvelle fois, à mettre au
centre de nos débats.