Police lausannoise la loi du silence

Police lausannoise la loi du silence

Le dernier scandale qui a
secoué la police lausannoise il y a quelques semaines,
« l’affaire K.», montre toutes les limites de
la promotion « de l’éthique et de la
déontologie » au sein du corps de police
initiée en 2008, et révèle la
nécessité de mettre sur pied une instance
indépendante de plainte, compétente pour instruire
dénonciations et plaintes formées à
l’égard de la police.

Le 16 janvier 2009, le Tribunal de police acquitte un agent lausannois
soupçonné d’avoir aspergé d’un
puissant spray au poivre un jeune Erythréen de 16 ans, avant de
l’abandonner dans les bois de Sauvabelin où il avait
été conduit par une patrouille de « Police
secours ». La police est également acquittée
de l’accusation portée par le jeune homme qui soutient que
les policiers ont refusé d’enregistrer sa plainte quelques
heures après les faits à l’Hôtel de
police : « Le Tribunal peine à imaginer, peut-on
ainsi lire dans le jugement, que l’ensemble de la police
municipale, y compris son commandant, prenne le risque de dissimuler ou
détruire des preuves (bandes des caméras de surveillance,
registre de l’infirmerie, rapport d’engagement de moyen de
contrainte) et de demander à tous les agents engagés,
tant durant l’interpellation du plaignant qu’à la
réception de l’Hôtel de police, de trahir leur
serment et de mentir délibérément, et ce dans
l’unique but de couvrir un collègue. » Et
pourtant, l’inimaginable semble s’être bien
produit… Une partie du corps de police et de la
hiérarchie – à l’exception notable
d’une agente qui a fini par rompre la loi du silence, permettant
la réouverture d’une enquête – auraient
couvert les fausses déclarations de leurs collègues.
D’ailleurs le témoignage d’un agent, rejeté
en première instance parce que jugé invraisemblable par
le Tribunal, révélait déjà
qu’« à l’Hôtel de police, tout le
monde ou presque était au courant du gazage du jeune
Erythréen. Et qu’il arrivait en effet que des jeunes trop
pénibles soient égarés dans les bois de
Sauvabelin » (24 Heures, 9/05). On peut au passage se demander si
ce « tout le monde » comprend des hauts
gradés de la police lausannoise, ce qui serait
particulièrement inquiétant…

Instance indépendante

Face à ces dérives policières, une
« commission préposée à la
déontologie » ou un « comité
éthique », dont le fonctionnement est
essentiellement interne à la police, montrent toutes leurs
limites, notamment parce qu’ils ne peuvent pas être saisis
par des personnes individuellement et qu’ils sont très
largement inféodés au corps de police.
« L’affaire K. » fait ressortir avec
éclat ces défauts. Il est donc urgent que soit mise sur
pied une instance indépendante d’instruction, de
dénonciations et de plaintes à l’égard de la
police, composée notamment de représentants
d’associations de défense des droits humains et de lutte
contre le racisme. C’est d’ailleurs ce que recommandait
Amnesty International dans son rapport de 2007 sur la police et les
droits humains. Une motion a été déposée en
ce sens par le groupe A Gauche Toute ! au Conseil communal de
Lausanne.

Hadrien Buclin