Deuxième pillier: développer la mobilisation
Deuxième pillier: développer la mobilisation
Limportante manifestation nationale du 31 août (plus de 15000 manifestant-e-s) a essentiellement démontré deux choses: Dune part elle a prouvé que les travailleurs-euses étaient tout à fait prêts à se mobiliser pour contrer les attaques contre leurs acquis en prévoyance vieillesse, dautre part que les directions syndicales et sociales-démocrates navaient pas dautres perspectives à offrir sinon une protestation contre un hold-up. Les discours étaient virulents sur la forme (république bananière dixit Paul Rechsteiner), mais aboutissaient à un appel à la mobilisation
pour que chacun exerce individuellement une pression sur «son» député (Fasel).
Lorientation politique qui se limite à une protestation contre la diminution du taux de rendement minimum des capitaux du deuxième pilier conduit tout droit à une défaite, comme lont montré les débats au Conseil des Etats et au Conseil National, qui ont tous deux voté la diminution du taux de rendement de 4 à 3,25% dès le premier janvier 2003.
En effet cette orientation, si elle permet une dénonciation exemplaire des pratiques bourgeoises, reste cependant enfermée dans la vision bourgeoise de la sécurité sociale.
La diminution du taux est une escroquerie
Il est juste et nécessaire de souligner que la décision gouvernementale de diminuer le taux de rendement a été prise en dehors de toute étude chiffrée sérieuse mais sous la pression des assureurs privés. Il faut poser la question des milliards accumulés par ces assureurs privés aux dépens des salariés pendant les bonnes années. Il faut dénoncer le cynisme de la droite qui prétend quil ny a pas de problème puisque pendant les bonnes années, le 4% a toujours été distribué, et que la loi noblige pas les assureurs à redistribuer les bénéfices boursiers. En dautres termes, que les bénéfices profitent aux assureurs privés et que les pertes soient assumées par les salariés est normal, puisque la loi le permet! (cf. la déclaration du président de la commission LPP Bruno Frick (PDC), au conseil des Etats). Et le comble de la mauvaise fois, quil faut vraiment faire connaître, est fourni par la Rentenanstalt : Au moment (septembre 2002) où elle fait la campagne que lon connaît, elle signe des contrats de 3ème pilier dans lesquels elle garantit un rendement de 6%!
Sortir du deuxième pilier
Mais quels sont les débouchés dune telle dénonciation ? Essentiellement de deux types:
Premièrement, une exigence de transparence. Nous nallons certainement pas critiquer lintroduction dune certaine transparence, au contraire, mais à constater laccord unanime, même de la droite, pour cette transparence, nous pouvons légitimement avoir des doutes sur ce que cette transparence permettra de voir!
Deuxièmement, lexigence quune modification du taux minimum de rendement soit «objectivement» justifiée. Cest donc lacceptation dun taux flexible, mais avec des critères «consensuels» pour accepter une modification de ce taux.
En dautres termes, le résultat du débat aux chambres fédérales aura été de réduire les divergences gauche (entendre le PS)-droite à la question du degré de transparence et des conditions définissant le pilotage du taux minimum flexible. Ainsi le vrai débat, et les véritables perspectives permettant une large mobilisation, auront été esquivées. Il ne sagit fondamentalement pas du degré de transparence des assureurs privés, mais bien dexclure le profit privé du système de prévoyance vieillesse. Il ne sagit pas de lobjectivité dun taux de rendement, mais de la garantie de prestations vieillesse à la population en Suisse.
Quels objectif?
De ce point de vue, ce nest pas au parlement, mais dans la rue, dans les entreprises, dans les organisations syndicales que la lutte doit se poursuivre. Dans ce sens il faut saluer et soutenir lappel lancé par un certain nombre de militants syndicaux à des journées daction et de grève en novembre, sur la base dune orientation remettant en cause le système des trois piliers. Mais une mobilisation nécessite des objectifs concrets, qui sinscrivent dans une perspective à moyen terme. Le maintien du taux de 4% ne peut pas être cet objectif, la manifestation du 31 août la montré. En effet cet objectif reste dans le cadre du système actuel des trois piliers, et manifeste fondamentalement une confiance peut-être déplacée dans les profits boursiers à long terme.
Par contre un aspect du débat sur le taux flexible a été fortement négligé : cest celui qui fait passer une majorité de caisses de la primauté des prestations à celui de la primauté des cotisations. En dautres termes, les salariés nont pas une garantie dune retraite en rapport avec leur dernier salaire, mais en rapport avec ce quils ont versé et les rendements boursiers. Cela revient à faire assumer les risques par les salariés.
Enfin on ne peut évoquer des perspectives pour la sécurité sociale sans mettre en avant le principe de solidarité, absent du deuxième pilier.
Ainsi les objectifs dune mobilisation doivent être:
- Pas de profit sur la prévoyance vieillesse, les assureurs privés hors du système.
- Des prestations viellesse garanties, primauté des prestations.
- Des prestations viellesse basées sur la solidarités.
Le débat doit montrer que ces objectifs ne seront satisfaits que dans lintégration du deuxième pilier dans une AVS élargie.
Michel Ducommun