Fonction publique : le bras de fer

Fonction publique : le bras de fer

Le projet de budget 2010 du Conseil
d’Etat prévoit un déficit de 34 millions qui
inscrit des économies réalisées sur le dos du
personnel de la fonction publique à hauteur de 15 millions. Une
nouvelle fois, le Conseil d’Etat propose un budget
d’austérité, qu’il cherche à faire
entrer à tout prix dans le corset étroit du frein
à l’endettement et aux recettes. Il veut bloquer la
progression salariale de tous les employé·e·s et
remet en cause, unilatéralement et sans négociations un
accord qu’il avait pourtant signé avec les syndicats en
2008. A cette attaque frontale, s’ajoutent d’autres causes
de mécontentement.

Education et santé en ligne de mire

Les enseignant·e·s sont particulièrement
visés. Il est prévu d’augmenter l’horaire de
travail des profs de lycée sans aucune compensation salariale,
à tous les niveaux. Le nombre d’élèves moyen
par classe sera relevé d’une unité, engendrant
d’importantes difficultés dans les classes
d’orientation (secondaire I), pré-professionnelles et
terminales. Les sections de maturité verront leurs effectifs
grimper à 26, voire 28 élèves ; sans aucune
possibilité de dédoublement ne serait-ce qu’une
fois par semaine pour favoriser l’apprentissage, notamment de la
langue maternelle ou de l’allemand.

    Dans la santé, ça grogne aussi ;
autonomisés, les hôpitaux (HNE), les soins à
domicile (NOMAD), la psychiatrie (CNP) ont leur propre convention
collective qui règle leurs conditions de travail, mais les
subventions sont fixées par l’Etat qui dans ce domaine
cherche aussi à faire des économies. Tout va de travers.

    De façon générale, il est aussi
prévu une réduction linéaire des subventions de 5
à 10 % dans le secteur para-public (écoles
spécialisées, prise en charge des
handicapé·e·s…) ; les communes se voient
imposer des reports de charges supplémentaires avec effet au 1er
janvier 2010. Il en sera de même pour Job service qui, si ce
budget devait être voté tel quel, ne pourrait
éviter des licenciements et une baisse de ses prestations,
à un moment où les jeunes – et moins jeunes –
ont tout particulièrement besoin de lui pour (re)trouver 
un emploi.

    Jeudi 12 novembre plus de 1500
employé·e·s (700 selon la police, 500 selon la TSR
qui ne disposaient pas de caméras, plus de 2000 selon les
organisateurs) ont défilé à Neuchâtel pour
défendre leurs revendications. C’est une étape,
mais il en faudra plus pour faire revenir le Conseil d’Etat
à la raison. Prochaines échéances : jeudi
19 novembre, journée d’actions syndicales avec
débrayages des profs entre 11 h et midi dans toutes les
écoles du canton ; puis lundi 23 novembre, assemblée
générale de la fonction publique pour faire le point et
décider de la suite.

Un contexte inédit

Ce budget fortement contesté est issu d’un Conseil
d’Etat à majorité de droite. Il est soumis à
un Grand Conseil qui lui est à majorité de gauche –
PS, Verts, POP, solidaritéS – (60) contre
libéraux-radicaux-UDC (55). En théorie, la gauche a
toutes les cartes en main pour refuser ce budget et/ou le changer dans
un sens favorable au monde du travail et des plus
défavorisé·e·s. Mais on sait bien que de la
théorie à la pratique il y a parfois de grands
écarts. Tout dépendra au bout du compte de la
capacité du personnel de la fonction publique d’aller
au-delà du rituel d’une manifestation de rue. Un grand
mouvement gréviste, voilà ce dont aurait besoin ce canton
pour réveiller les autorités. Le Conseil d’Etat
essaie de jouer la grande pleureuse « nous sommes tous
dans une situation difficile ». Le libéral Gnaegi
est allé geindre devant l’assemblée des
enseignant·e·s du SAEN. La réponse de
l’assemblée ne s’est pas fait attendre : la
fiscalité des entreprises et les généreuses
exonérations accordées qui sont le vrai problème
de ce canton et de ses finances a été largement
thématisée par les profs. Mais le Conseil d’Etat
est resté inflexible. A quand une majorité
décidée à empoigner ce problème de
front ? Il est temps.


Henri Vuilliomenet