Un traitement dégradant
Un traitement dégradant
Une interpellation au Grand Conseil du
26 janvier 2010 dénonce les chaînes aux pieds et menottes
aux mains lors des audiences devant la Justice de paix pour les
étrangers en mesure de contrainte.
En janvier 2010, le «Collectif droit de rester» de Lausanne
a distribué aux député-e-s un papillon sur lequel
figure notamment une photo de Diallo, ancien enfant soldat de Sierra
Leone, en Suisse depuis 10 ans, et qui attend de voir le Juge de
paix qui reconduira sa peine denfermement administratif dans le
cadre des mesures de contrainte. Comme lui, ils sont 24 détenus
à la prison de Frambois (GE) en attente de leur expulsion du
territoire.
Ce qui est particulièrement choquant,
cest de constater que ce jeune homme se trouve menotté
aux mains et enchaîné aux pieds. Pire, ces chaînes
ne lui ont pas été retirées pendant tout le
déroulement de laudience devant le Juge de paix.
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De telles entraves à la liberté
personnelle durant une audience devant la Justice de paix ne sont pas
admissibles. Aucune justification nexiste pour leur maintien.
Laudience se déroule dans une salle fermée,
à lintérieur des locaux de la Justice de paix. De
surcroît, deux gendarmes sont en principe présents dans la
salle, munis de toutes leurs armes habituelles. Force est
également de constater quun tel traitement nest
pas réservé même aux criminels endurcis
comparaissant devant des cours pénales. Or, on rappelle que
limposition de menottes durant toute laudience constitue
un traitement dégradant, voire inhumain au sens de lart.
3 CEDH. Linterdiction de tels traitements est consacrée
par larticle 10 § 3 de la Constitution
fédérale. Cette interdiction ne souffre ni restriction ni
dérogation : elle protège toute personne, quels
que soient ses agissements, et même si elle sest
livrée à un comportement répréhensible.
A loccasion dune audience de ce type
devant le Justice de paix, des avocats ont demandé quil
soit mis fin à cette atteinte particulièrement grave
à la liberté personnelle. Il leur a été
répondu quil existait une directive de la police
cantonale qui recommandait un tel traitement. Si tel est le cas, cette
directive ne saurait faire cependant obstacle à la garantie des
droits fondamentaux.
Dès lors, les
soussigné·e·s interpellent le Conseil dEtat
et le prient de répondre aux questions suivantes :
- Est-il exact quil existe une directive de la police
cantonale recommandant le maintien dentraves aux pieds et aux
mains pour les étrangers qui comparaissent devant la Justice de
paix pour des étrangers dans le cade de la procédure de
mesures de contrainte ? Si oui, est-elle accessible aux
justiciables ? - Que pense le Conseil dEtat dune telle
pratique ? Nest-elle pas humiliante pour les personnes
concernées ? Le gouvernement est-il disposé
à prendre toutes les dispositions utiles pour y mettre fin?
Jean-Michel Dolivo, Michèle Gay-Vallotton, Roger Saugy