La Toile Voit Rouge: vaccinons-nous contre l’islamophobie « savante »

La Toile Voit Rouge: vaccinons-nous contre l’islamophobie « savante »



Une islamophobie prétentieuse
s’étale aujourd’hui dans nombre de livres et
journaux occidentaux qui ne craignent pas de manipuler
l’histoire. Il y a neuf ans, le magnifique documentaire de
Mahmoud Hussein, intitulé « Lorsque le monde
parlait arabe » (2001), donnait une image beaucoup plus
juste de l’Islam des 7e-12e siècles. A regarder sans plus
attendre.*

Renouant avec un discours du 19e siècle, certains universitaires
et journalistes s’emploient aujourd’hui à donner de
la « civilisation islamique » et/ou arabe une
image globale dépréciative : fanatisme, violence,
fatalisme, rejet de la raison et de l’expérimentation,
etc.

    Il faudrait aussi relativiser l’apport des
Arabes à la culture médiévale des 11e-15e
siècles. L’Europe chrétienne n’aurait pas
vraiment (re)découvert les Grecs grâce aux savants de
l’Islam. Dans Aristote au Mont Saint-Michel (Seuil, 2008), le
médiéviste Sylvain Gouguenheim, professeur à
l’Ecole Normale Supérieure de Lyon, va
jusqu’à expliquer que la langue arabe (comme toute langue
sémitique) serait impropre à rendre les subtilités
du grec.
    Cet ouvrage est l’un des derniers avatars
d’une campagne aux accents racistes. On se souvient du discours
de Ratisbonne du pape Benoît XVI, en 2006, où il reprenait
les propos de l’empereur byzantin Manuel II Paléologue
(fin du 14e siècle) : « Montre-moi donc ce que
Mohammed a apporté de neuf, et alors tu ne trouveras sans doute
rien que de mauvais et d’inhumain, par exemple le fait
qu’il a prescrit que la foi qu’il prêchait, il
fallait la répandre par le glaive ».

    Cette prise de position a libéré la
parole des traditionnalistes, qui n’avaient jamais accepté
les positions conciliantes du concile Vatican II (1964).
N’assuraient-elles pas les musulmans du salut, en leur
déclarant l’estime de l’Eglise et en invitant les
catholiques à un effort de compréhension. Parmi eux, on
signalera Rémi Brague, prof. de philosophie
médiévale à Paris I et à Munich,
invité à l’Université de Lausanne en 1989 et
2000, ou Jean-Paul Roux, historien de l’art, turcophile et
négateur du génocide arménien.

    Des « experts »
d’extrême droite avancent aussi leurs pions dans diverses
revues et sur des sites internet. C’est le cas de René
Marchand, auteur de La France en danger d’Islam, entre
jihâd et reconquista (L’Âge d’homme, 2002), et
de Mahomet. Contre-enquête : un despote contemporain, une
biographie truquée, quatorze siècles de
désinformation, (L’Echiquier, 2006). Il a aussi
accordé un entretien au site raciste Occidentalis pour vanter
les mérites du livre de Gouguenheim.

    Cette grossière offensive a suscité la
réplique de larges secteurs de la communauté
scientifique, dont l’ouvrage collectif, Les Grecs, les Arabes et
nous. Enquête sur l’islamophobie savante (Fayard, 2009),
dirigé notamment par le philosophe Alain de Libera, prof.
à l’Université de Genève, constitue une
synthèse majeure.

Jean Batou

*    Mahmoud Hussein (pseudonyme de Baghgat Elnadi et Adel Rifaat), Lorsque le monde parlait arabe, 2001. Trois heures de vidéo en vingt séquences, en lien sur notre site : www.solidarites.ch.

  1. Lorsque le monde parlait arabe 1
  2. Lorsque le monde parlait arabe 2
  3. Lorsque le monde parlait arabe 3
  4. Lorsque le monde parlait arabe 4
  5. Lorsque le monde parlait arabe 5
  6. Lorsque le monde parlait arabe 6
  7. Lorsque le monde parlait arabe 7
  8. Lorsque le monde parlait arabe 8
  9. Lorsque le monde parlait arabe 9
  10. Lorsque le monde parlait arabe 10
  11. Lorsque le monde parlait arabe 11
  12. Lorsque le monde parlait arabe 12
  13. Lorsque le monde parlait arabe 13
  14. Lorsque le monde parlait arabe 14
  15. Lorsque le monde parlait arabe 15
  16. Lorsque le monde parlait arabe 16
  17. Lorsque le monde parlait arabe 17
  18. Lorsque le monde parlait arabe 18
  19. Lorsque le monde parlait arabe 19
  20. Lorsque le monde parlait arabe 20