Censure à Calvingrad

Censure à Calvingrad

Sur le rivage où, roulant sa belle onde, le Rhône échappe à sa prison profonde

(Voltaire  La Guerre civile à Genève)

A lire Voltaire, une certaine tradition semble coller aux murs des
Bastions de la cité de Calvin où « on y
calcule, et jamais on y rit ». On croyait rêver
quand, il y a cinq ans, notre ministre de la culture, Patrice Mugny,
demandait des gages de bonne conduite… à un humoriste.
Dieudonné pour bien le nommer. Depuis, on croyait la
plaisanterie terminée.

    L’aventure de Dieudonné avec la ville
de Genève ne s’arrête pas là. En 2009, elle
refuse de louer l’Alhambra pour son spectacle, Sandrine,
dénonçant les violences faites aux femmes ! On
peut ironiser sur une mesure aussi stupide : la Ville de
Genève serait-elle favorable aux violences faites aux
femmes ? En Espagne, pays de la corrida, une femme est
massacrée tous les deux jours par son compagnon ou son mari. En
Suisse, combien de femmes périssent suite à un mauvais
usage des armes d’ordonnance de leurs maris, à
l’instar de la skieuse Corinne Rey-Belle ? Nous ne le
savons pas !

    Patrice Mugny, qui a censuré
préventivement le spectacle de Dieudonné. Je ne sais pas
ce que vous allez dire donc, mais étant donné que vous
pourriez dire que: taisez-vous ! A Genève, le
Tribunal administratif a condamné la ville de Genève pour
« violation de la liberté
d’expression ». S’il y a une chose qui ne
devrait pas être soumise à discussion dans le camp de la
démocratie, c’est la liberté
d’expression ! Elle est faite pour ceux qui ne pensent pas
comme vous et moi. Le débat démocratique est à ce
prix. La ville édictera-t-elle un manuel pour les humoristes, et
autres artistes ?

La bêtise au front de taureau

Le comité référendaire contre le
démantèlement de la Maison de la culture de Saint Gervais
avait produit une affiche illustrant une citation de Baudelaire
« La bêtise au front de taureau ». La
ville de Genève a fait recours auprès du Tribunal
fédéral, belle obstination ! En début
d’année, la décision est tombée : la
Ville de Genève a bel et bien violé la liberté
d’expression en refusant de louer une salle pour un spectacle de
Dieudonné sur les violences conjugales.

    La politique rejoint la tauromachie. Notre ministre,
Patrice Mugny ne regrette rien. « Je trouve très
bien que la ville persiste…», et il ajoute qu’il
n’exclut pas un recours à la Cour européenne des
droits de l’homme à Strasbourg ! Car c’est
là que réside le problème : aucun des
collègues ministres de Mugny n’est intervenu pour
dénoncer cette censure préalable, ce scandale ; aucun
conseiller municipal n’est intervenu pour protester contre un
exécutif qui s’est mis hors la loi en bafouant la
liberté d’expression, et envisage de
persévérer sur la voie de la censure ! Alors
merci, si vous voulez aller à Strasbourg, pas en notre nom, et
à vos frais !

Daniel Künzi