Royauté et Royalties
Royauté et Royalties
Alors que le Japon fait face à
une catastrophe nucléaire, que les pays occidentaux
sengagent toujours plus profondément dans une guerre en
Libye, que les étudiant·e·s manifestent aux
Etats-Unis et en Grande-Bretagne, le sujet préféré
des médias semble bien être le mariage royal entre William
et Kate.
Tandis que lexcitation ambiante rappelle le conte de fée
des parents de William, le Prince Charles et Diana, sous ce culte de la
célébrité se cache surtout la
vénération dune monarchie conservatrice et
archaïque. Le gouvernement britannique a interdit toute
manifestation le jour du mariage, faisant dune pierre deux coups
en étouffant ainsi toute protestation contre sa politique. UK
Uncut, une organisation qui lutte contre les plans
daustérité et les coupes dans le secteur public,
avait prévu différentes manifestations à
Parliament Square et ailleurs, des manifestations qualifiées de
« violentes » par les médias
bien-pensants
Le gouvernement conservateur a su saisir toutes les
opportunités dans cette distraction de masse. Mais il y a
dautres raisons de sindigner de tout le brouhaha
médiatique entourant lunion des deux jeunes gens.
La monarchie est lennemie de la démocratie
La monarchie anglaise nest plus la structure monolithique de
pouvoir quelle était. Plutôt que davoir un
roi tout-puissant ou une reine rappelant les époques
archaïques du servage, elle a su sadapter aux temps
modernes en devenant une monarchie constitutionnelle, avec la reine
Elizabeth II comme incarnation symbolique dun Etat sous
contrôle de la Constitution, du Premier Ministre et du Parlement.
Il existe un vrai mouvement républicain en Grande-Bretagne, dans
le sens pro-démocratique du terme. Mais cette monarchie
constitutionnelle inébranlable dans la culture politique depuis
des siècles, à quoi sajoute lenthousiasme
évident suscité par le mariage de William et Kate, jouent
contre la démocratie.
Mariage faramineux
David Cameron a décrété le 29 avril jour
férié, ajoutant quil sagissait dun
« grand jour pour notre pays ». On pourrait
vite déchanter, sachant que 10 milliards de livres y sont
passés. Les dépenses sont censées êtres
compensées par largent dépensé par les
touristes et les fans, mais le pays essuiera tout de même 7, 9
milliards de pertes. De plus, si Charles et les Middletons ont
financé en grande partie la réception à Buckingham
Palace, lEtat a dû organiser la sécurité de
lévénement, pour un coût de 15 millions de
livres (soit plus que pour la sécurité des manifestations
du G20 en 2009).
Peut-être plus grave encore, le mariage
détourne les budgets des médias et les journalistes du
travail de reportage
et nos esprits des véritables
informations. La couverture de cet événement, suivi par
quelque 2 milliards de téléspectateurs, a
nécessité la mobilisation de journalistes et de
ressources énormes, en Grande-Bretagne et dans le monde entier.
Il sagit du plus grand rassemblement déquipes
journalistiques jamais vu à Londres. Pendant ce temps, les
radiations japonaises sétendent dans le Pacifique
Enfin, de telles superficialités renforcent
la vision dune culture déshumanisée et
hiérarchisée. Le culte de la
célébrité est dénonçable pour un tas
de raisons (mysogynie, abrutissement, etc). Mais élever autant
la famille royale qui véhicule limage dune
concentration de pouvoir et de richesse et la prétendue
supériorité de certains est néfaste pour
toute la société. En continuant dagir de
manière si éloignée du commun des mortels, la
famille royale renforce lidée selon laquelle certains
écarts de richesse sont normaux et même désirables.
Et cela contribue à maintenir intacte la structure du pouvoir
que nous combattons.
Julianne Escobedo Shepherd
publié sur le site alternet.org ; traduction et adaptation de Giulia Willig