Squatters évacués: le vrai changement?
Squatters évacués: le vrai changement?
Dans les années 70, le quartier des Grottes à Genève
a été lun des hauts lieux de la résistance à la politique
daménagement antipopulaire de la Ville, qui visait à
laisser dépérir puis à raser les immeubles pour y
construire des bureaux. De référendum en occup, de
fêtes populaires en manifs, tous les moyens ont été
utilisés et la lutte a payé. La Ville a dû faire marche
arrière, renoncer à ses projets antisociaux
pharaoniques et accepter le principe dun entretien et
dune rénovation du quartier qui ne le vide pas de ses
habitant-e-s.
Ce processus nest pas terminé. A la rue de la Faucille,
la majorité «alternative» du Conseil municipal, a voté
en faveur de la rénovation des immeubles des n° 4, 6
et 8, dont elle est propriétaire. Les élu-e-s municipaux
membres de solidaritéS, ont soutenu ce projet, ainsi
que les crédits nécessaires, estimant quà lissue de
ces travaux le parc immobilier municipal serait enrichi
dun certain nombre de logements sociaux répondant
aux besoins prioritaires de la population.
Christian Ferrazino, en charge du département municipal
de laménagement et des constructions, dont
nous avons soutenu lélection à lExécutif municipal, a
fait dans ce sens du bon travail en inscrivant son
action dans le droit fil des exigences du mouvement
populaire des années 70.
Pourtant, La Tribune de Genève du 15 janvier affichait
des manchettes titrant «Guérilla urbaine au quartier
des Grottes». Le Matin faisait sa une dans le même
sens. Ces deux journaux relataient lévacuation plus
que musclée de squatters au 4 rue de la Faucille qui
loccupaient depuis plusieurs années.
Nous soutenons loccupation des logements vides: le
droit au logement prime sur le droit des propriétaires.
Les squats ont été et sont une arme importante
contre les projets spéculatifs, la transformation de
logements en bureaux, en même temps quun lieu de
développement de modes de vie et dhabitation
alternatifs. Ils ont été un creuset pour des éléments de
contre-culture sinscrivant dans une logique qui
conteste la marchandisation à tous crins et
lindividualisme érigé en dogme par les néolibéraux.
Nombre de nos élu-e-s et de nos militant-e-s se sont
retrouvés en maintes occasions pour sopposer aux
évacuations policières de tel ou tel squatt.
Normalement les immeubles de la Ville ne devraient
pas être squattés durablement, parce quils nont pas
à rester vides. En effet, la Ville doit développer un parc
immobilier qui réponde aux nécessités de la population, y compris en matière dhabitats collectifs et
autogérés, adaptés aux besoins réels de très
nombreux jeunes.
Et pourtant le Conseil administratif, en tant que propriétaire,
avec laval de Christian Ferrazino, a fait donner
la police pour faire évacuer le squatt du 4 rue de
la Faucille. Cest inacceptable et honteux que des élus
de gauche sabaissent à utiliser les mêmes méthodes
que les promoteurs quils ont longtemps combattus!
En date du 8 janvier, soit près dune semaine avant
lévacuation forcée, nous avions fait savoir par écrit à
Christian Ferrazino – au nom de la coordination de
solidaritéS – que nous ne soutiendrions en aucun cas
lévacuation forcée des squatters prévue et effectuée
le 14 janvier.
Le collectif des habitant-e-s du 4 rue de la Faucille
avait annoncé par courrier, en date du 21 décembre,
que ceux-ci cherchaient un nouveau logement, quils
désiraient obtenir un report de leur départ au mois de
mai et souhaitaient ne pas être contraints à quitter
leur logement actuel en plein hiver.
Les bases étaient là pour une négociation indispensable.
Elle pouvait se nouer jusquau matin du 14, où
Christian Ferrazino aurait dû être là pour discuter avec
les habitant-e-s. A sa place, nos camarades présentse-
s nont pu que constater le déploiement deffectifs
policiers massifs.
Notre révolte est dautant plus grande, quinterpellé au
lendemain de cette évacuation, Christian Ferrazino a
fait bloc avec lensemble de lExécutif de la Ville pour
justifier lévacuation et lintervention des forces de
police sous le couvert de la légitimité et de la nécessité
du projet de rénovation.
La question nest pas là. Ce qui est en jeu cest de
savoir si on est capable de traiter les problèmes
«autrement» que des générations de politiciens bourgeois
ou sociaux-démocrates, par lécoute et le dialogue.
Tous les habitant-e-s, y compris les squatters,
doivent être entendus! Y compris ceux qui contestent
à tort ou a raison les projets que lon défend. Cest sur
la base dun programme comprenant ces idées là que
nous avons soutenu lélection de Christian Ferrazino.
Nous naccepterons pas quil sen écarte, sauf à lui
retirer définitivement notre soutien!
Pierre VANEK