6 semaines de vacances: oui, mais comment?

Dans le numéro 201 de solidaritéS, nous avons présenté l’initiative fédérale «», lancée fin 2007 par les syndicats chrétiens, au moment où ils se tranformaient en Travail.Suisse. Cette initiative a été rejetée par le Parlement en juin 2011, sans contre-projet, et sera soumise au vote le 11 mars prochain.

Nous soutenons bien entendu toute proposition visant à réduire le temps de travail, que ce soit par la diminution de l’horaire hebdomadaire, par l’abaissement de l’âge de la retraite, ou par l’allongement des vacances, par la voie légale ou conventionnelle.

La Suisse connaît déjà un temps de travail parmi les plus élevés au monde. De plus, les pressions contre l’absentéisme, qui tendent à mettre en cause le droit au congé maladie, mais surtout la densification et la flexibilisation du travail, ne cessent d’augmenter sa productivité, en même temps que l’épuisement physique et moral des salarié·e·s.

De nombreux travailleurs-euses ne vivent plus les jours de congé comme un temps de loisir, mais comme un temps de récupération, quand ce n’est pas un temps de sommeil. Pour nombre d’entre eux-elles, ils ne sont plus qu’une phase de réparation indispensable, compte tenu d’une souffrance accrue au travail.

Mais de là à accepter – comme le fait Travail.Suisse – la pénibilité croissante du travail comme un donné du monde moderne, en réclamant 6 semaines de vacances pour accroître la «» des travailleurs-euses, il y a un pas qu’il ne faut pas franchir. La vie d’un salarié·e ne peut pas être sacrifiée, même 46 semaines sur 52, à une exploitation sans cesse plus mortifère.

L’augmentation du temps de vacances doit au contraire être défendue comme partie prenante d’un combat pour l’abaissement de l’âge de la retraite, pour la réduction du temps de travail hebdomadaire, contre la densification du travail et sa flexibilisation, pour le refus d’un contrôle de plus en plus étroit de notre temps par le capitalisme et sa rage d’accumulation.

Disputer le contrôle du temps aux patrons, c’est à la fois une lutte contre l’exploitation et pour la reconquête de l’autonomie. Il ne s’agit pas seulement de gagner un peu d’espace pour reprendre son souffle, pour retrouver le sommeil, pour éviter le «». Il s’agit surtout de mettre en cause une société fondée sur la soumission totale, corps et âme, du salarié·e à un rapport social inhumain.

Comment faire passer une telle initiative auprès des salarié·e·s, alors que la multiplication des attaques patronales les oblige souvent, avec leurs syndicats, à accepter des augmentations du temps de travail pour sauver leurs postes (comme à Novartis)? En ne répondant pas à cette question, Travail.Suisse risque d’avoir de la peine à convaincre…

JB