Naturalisation, libre circulation des personnes
Naturalisation, libre circulation des personnes : L'UDC dicte sa loi!
Une politique ouvertement discriminatoire et raciste à l’encontre des étrangers·ères s’impose tous les jours davantage, conduisant à des modifications législatives qui les stigmatisent, les précarisent et les excluent. Asile, conditions de séjour, acquisition de la nationalité, portée de l’accord sur la libre circulation des personnes, le Conseil fédéral, comme le parlement, marchent sur les pas tracés par l’UDC qui, sur ce terrain, ne cesse d’avancer. Jusqu’où ? Banalisation et légitimation du discours xénophobe. Jusqu’aux ratonnades ou à la chasse ouverte aux im-mi-gré·e·s, comme en Grèce ?
En 2011, le Conseil fédéral avait mis en consultation un projet de révision de la loi sur la nationalité. Le gouvernement proposait un durcissement de taille pour obtenir la nationalité suisse, à savoir l’exigence d’une autorisation d’établissement (permis C).
Cette condition, désormais acceptée par les deux Chambres fédérales, est particulièrement discriminatoire pour les personnes étrangères, non ressortissantes de pays de l’Union européenne (UE), qui sont soumises à des conditions d’obtention du permis C beaucoup plus sévères que celles des ressortissants de l’UE. Or, plus de 95 % des personnes naturalisées aujourd’hui, par voie ordinaire, sans autorisation d’établissement proviennent d’Etat tiers (non UE).
Cette condition entraînera, selon une étude mandatée par la Commission fédérale, une diminution du nombre de naturalisations ordinaires de quelque 5000 par année. Le projet du Conseil fédéral prévoyait certes une réduction du délai de résidence de 12 à 8 ans, devant permettre 1500 naturalisations de plus par année. Mais le solde est largement négatif et l’exigence du permis d’établissement constitue une péjoration importante.
Les Faiseurs de Suisses ont encore de beaux jours devant eux
Au printemps 2013, les deux Chambres fédérales sont tombées d’accord pour fixer des « critères d’intégration » plus strictes pour la naturalisation ordinaire, comme la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation.
Le projet du Conseil fédéral, sous prétexte d’harmoniser les critères d’intégration du droit de la nationalité avec ceux du droit des étrangers, avait déjà ouvert la voie : selon le gouvernement, une « intégration réussie se manifeste en particulier par le respect de la sécurité et de l’ordre public, le respect des valeurs de la Constitution, l’aptitude à communiquer dans une langue nationale et la volonté de participer à la vie économique ou d’acquérir une formation ». Les parlementaires ont durci un peu plus ces exigences, ouvrant la porte encore plus largement à l’arbitraire. Une révision qui va ainsi dans le sens opposé à une reconnaissance des droits de la deuxième et troisième génération des jeunes étranger·ère·s né·e·s dans ce pays.
Trois votations-tremplins pour la xénophobie
En 2014, le référendum annoncé contre l’extension de l’Accord de libre circulation à la Croatie, le vote sur l’initiative UDC « contre l’immigration de masse » visant à rétablir des contingents d’immigrés ainsi que celui sur l’initiative EcoPop qui veut arrêter la croissance de la population menaçant l’environnement vont offrir autant de nouveaux tremplins à l’expression de la xénophobie et du chauvinisme. L’establishment politique helvétique se trouve en partie piégé : lui qui s’inscrit dans la tradition du racisme d’Etat sera amené à combattre la remise en cause de l’Accord de libre circulation avec l’UE au nom des intérêts de « l’économie ». Dans cette situation, la direction du parti socialiste (PSS) cherche à tirer les marrons du feu, en tentant d’obtenir en échange de son soutien au gouvernement un durcissement des mesures d’accompagnement pour mieux lutter contre le dumping social et salarial. Cette posture n’est que de la poudre aux yeux ! Sur le plan fédéral, comme dans les exécutifs cantonaux et communaux, le PSS met en œuvre une politique d’austérité qui rogne le pouvoir d’achat de la majorité de la population. Quant à la politique vis-à-vis des étrangers·ères, elle est portée par sa conseillère fédérale, Simonetta Sommaruga. Dans les mois et les années qui viennent, la lutte contre toutes les formes de précarité et contre la démagogie raciste passe par le renforcement d’un mouvement antiraciste et par celui de l’action collective des salarié·e·s sur les lieux de travail. En 2014, la bataille pour l’introduction d’un salaire minimum légal est un premier jalon dans cette perspective, tout comme le rejet des initiatives xénophobes.
Jean-Michel Dolivo