Luttes étudiantes à Fribourg

À la suite d’un nouveau projet de Loi universitaire qui sera voté prochainement au Grand Conseil fribourgeois, une centaine d’étu-diant·e·s se sont rassemblés, le 25 mars, à l’Uni Miséricorde, défilant jusqu’à l’Hôtel de Ville pour manifester leur désaccord.

Cette nouvelle loi universitaire pourrait avoir des conséquences relativement graves dans le cas probable d’une acceptation parlementaire. En effet, le projet prévoit l’introduction de «conventions d’objectifs» pour l’octroi des enveloppes budgétaires, ce qui aura pour effet de renforcer les politiques d’austérité, en facilitant les coupes budgétaires et la suppression des branches considérées financièrement «non rentables». Le projet de loi prévoit également de centraliser le pouvoir décisionnel au sein du Rectorat, au détriment des Facultés, et le désengagement progressif des pouvoirs publics ce qui affaiblirait de façon conséquente la gestion démocratique de l’Université. Cette dernière serait ainsi dirigée à la manière d’une économie privée avec la réorganisation de son fonctionnement (objectifs de performance, privatisation de certains Instituts, restrictions d’admission, hausse des taxes d’études et d’émoluments sur les prestations, etc.).

 

Pour une université démocratique

Ces mesures s’accompagneraient de l’introduction d’un article inédit en Suisse qui prévoit pour les étu­diant·e·s des sanctions disciplinaires «en cas d’atteinte à l’ordre universitaire». De fait, derrière cette rhétorique réactionnaire qui prône «l’autonomie universitaire» se cache la volonté de soumettre l’Université aux «diktats du marché » à travers la concurrence effrénée, la rentabilité accrue et les coupes budgétaires. Outre la manifestation du 25 mars, une pétition a été lancée par les étu­diant·e·s pour une « Université démocratique, plurielle et égalitaire », signée par plus de 1000 personnes. La pétition a été remise à la Direction de l’Instruction publique, de la culture et du sport?; le Conseil d’État campe quant à lui sur ses positions malgré la réaction des acteurs et actrices concernés.

Les étu­diant·e·s et les ma­ni­fes­tant·e·s qui les ont rejoints ont appelé à garantir une gestion et un financement publics de l’Université qui valorisent la pluralité de l’enseignement et la coopération entre les différentes sciences et savoirs, et non leur mise en concurrence suivant des logiques de pure « rentabilité ». Les ma­ni­festant·e·s ont dénoncé également la privatisation rampante de certaines facultés universitaires pointant du doigt les écoles polytechniques fédérales qui dépendent de plus en plus des multinationales (Rolex, Logitech, Nestlé, UBS, etc.). La volonté de mettre en place des sanctions disciplinaires fortement antidémocratiques a également été fustigée à plusieurs reprises. Enfin, il a été question de rappeler le droit de toutes et tous d’accéder à une formation universitaire de qualité quels que soient leur origine et leur compte en banque. Si le nombre de 150 ma­ni­festant·e·s pourrait s’apparenter à une faible mobilisation, il faut le replacer dans le contexte de Fribourg avec une très faible implantation de collectifs de gauche. Cette mobilisation est par conséquent encourageante pour la construction de forces antilibérales et anticapitalistes dans le très conservateur canton fribourgeois. Il est à espérer que l’expérience militante vécue durant cette mobilisation soit le berceau de nouvelles luttes futures.

 

Jorge Lemos