Loi sur la police (LPol)

Loi sur la police (LPol) : Un large front politique et syndical porte le non de Gauche à la loi-Maudet

L’automne dernier, Ensemble à Gauche (EAG) a lancé « son » propre référendum pour avancer les multiples raisons du non de gauche à cette nouvelle loi et ne pas laisser le monopole de l’opposition à cette LPol au MCG et à son rejet de la « menace » hypothétique de policiers non-suisses, mise en avant comme raison prépondérante de s’opposer à la loi par cette formation d’extrême droite.

L'opportunité référendaire avait été « offerte » au MCG, en pleine période d’élections municipales, par un surprenant deal de dernière minute, conclu dans les coulisses du parlement, qui avait vu la députation PS soutenir soudain le PLR pour voter cette loi fétiche de son magistrat en charge de la police… en échange de quoi, on n’a jamais très bien compris.

Sans le soutien, ni du PS ni des Verts, les référendaires de gauche paraissaient assez isolés cet automne et le MCG semblait, au premier abord, être appelé à truster l’opposition à la LPol, servant d’ailleurs de repoussoir à toutes celles et ceux qui rechignaient à y regarder de plus près et les poussant à accepter une loi comprenant des aspects parfaitement inacceptables.

 

 

Liberticide, antidémocratique, antisyndicale,
néolibérale…

 

Pour mémoire en effet, cette loi liberticide, soumise au vote populaire le 8 mars prochain, contient notamment l’exigence d’une « militarisation » de la police sur le plan organisationnel, elle reconduit et réintègre dans la nouvelle loi des dispositions concernant le flicage préventif de la population, que le Tribunal fédéral a pourtant balayées comme étant inacceptables et qui avaient donc été éliminées de la loi précédente.

Elle conserve un statut taillable et corvéable à merci de toute une catégorie de personnel, elle substitue l’arbitraire policier aux tribunaux en permettant à la police d’édicter des « mesures d’éloignement » découlant d’appréciations policières subjectives et non de décisions de justice…

La loi est en outre antidémocratique et antisyndicale notamment en instituant des organes – tant pour représenter le personnel que pour définir la stratégie de la police – dont la composition découle de décisions gouvernementales arbitraires.

A charge, on peut encore reprocher à cette LPol de liquider le commissariat à la déontologie censé recueillir et traiter les plaintes de la population envers la police, remplacé par un organe de propagande au service de celle-ci… sans parler de la porte grande ouverte à la tactique du salami en matière de privatisation contractuelle d’activités policières.

Pour couronner ce brouet législatif peu ragoûtant, la loi met en œuvre une logique de marchandisation de prestations policières par « facturation » des frais d’intervention de la police… Pas un·e homme ou une femme de gauche, pas un·e démocrate, pas un·e syndicaliste… ne devrait un instant envisager de soutenir une loi pareille !

 

 

Tous les syndicats rejettent ensemble cette LPol

 

Pourtant EAG, dans l’urgence du lancement du référendum, et dans le brouillard entretenu par le soutien à la loi du PS et des Verts, combiné à l’opposition aux accents xénophobes du MCG, apparaissait bien seule à imaginer possible un non de gauche significatif à cette LPol.

Depuis les choses ont bien évolué et on peut s’en féliciter. Premièrement, les organisations syndicales du canton, au-delà des syndicats de la police déjà acquis à l’opposition à la LPol, ont pris la mesure du contenu réel de la loi et de l’importance de lui dire non : le Syndicat des services publics (SSP/Vpod) d’abord, le SIT, UNIA, le Cartel intersyndical de l’Etat, la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS), pour ne nommer que les organisations principales ont tous pris position en faveur du non de gauche. Ainsi, aujourd’hui, c’est plutôt le PS et les Verts qui semblent isolés, où plutôt les directions de ces partis, qui ont cru bon de s’encolonner derrière leur fractions parlementaires soudain « gouvernementales » et hypnotisées par Pierre Maudet…

En effet, nombre de PS et de Verts voteront sans doute avec nous contre la loi. Comme appelle d’ailleurs à le faire le Groupe pour une Suisse sans Armée (GSsA) dont le non sans ambage se fonde sur son opposition à la « militarisation » envisagée de la police. Si le GSsA s’est toujours opposé à l’utilisation de l’armée à des fins de prétendue « sécurité intérieure », ce n’est pas pour accepter « en miroir » une convergence de la police et de l’armée.

 

 

Maudet fait de la surenchère xénophobe

 

A signaler aussi que le renforcement du non de gauche a été, paradoxalement, servi par le Conseil d’Etat en début 2015. En effet, le gouvernement cantonal a introduit, par voie réglementaire, une disposition interdisant d’engager des étran­gers·ères ou des fron­ta­liers·ères dans la police. Cette disposition, qui formalise la pratique actuelle, dont rien n’indique que le Conseil d’Etat voulait en changer, vise à plaire au MCG, tout en lui enlevant du vent des voiles. Elle a le mérite d’écarter le débat sur cette question qui a surtout servi à occulter des aspects réellement problématiques de la loi que nous mettions en évidence.

Mais Pierre Maudet en rajoute d’ailleurs. Avec son opportunisme légendaire, il affirme dans Le nouveau libéral de janvier que «Le processus lié à la nouvelle loi aura permis de clarifier et de figer la pratique actuelle consistant à réserver la fonction de policier aux seuls ci­toyen·ne·s suisses. Raison de plus pour soutenir cette nouvelle loi.»

Ainsi, les progressistes qui ne veulent pas voir « figer » la préférence nationale, ni dans la police, ni ailleurs, et qui pensent que les critères de compétences et de qualifications doivent primer sur la couleur du passeport pour tous les emplois du secteur public à Genève doivent donc, selon Maudet, dire NON à sa loi avec nous ! 

 

Pierre Vanek