Pour que le peuple puisse se prononcer... 

Pour que le peuple puisse se prononcer...  : Pour des transports publics plus rapides

Le Grand Conseil traitera le 3 décembre du contre-projet à l’initiative des Verts «Pour des transports publics plus rapides!» (IN 154). L’initiative veut que le réseau soit aménagé et la circulation réglée pour donner la priorité aux transports publics sur nos routes.

 Un bon principe, sans coûts supplémentaires significatifs, pour une augmentation importante de la cadence des bus et des trams, avec multiplication du nombre de passagers transportés, nette augmentation de la « vitesse commerciale » des TPG, réduction correspondante du trafic individuel motorisé, baisse de la pollution, amélioration de la santé des habitant·e·s, etc.

 

 

Doit on continuer à faire semblant de ménager la chèvre et le chou ?

Cette priorité aux transports en commun est dans la constitution bâloise et ce canton s’en félicite. Ainsi, l’initiative, devant le peuple, aurait de réelles chances d’être adoptée et servirait alors de levier pour infléchir la politique de mobilité en faveur des transports en commun en réponse aux défis écologiques, sanitaires et sociaux auxquels Genève est confrontée en la matière.

Par ailleurs, face à d’autres projets coûtant des milliards, la traversée autoroutière du lac notamment, la mise en œuvre de l’IN 154 serait d’un coût dérisoire. Mais une majorité de droite et d’extrême-droite du parlement, a refusé l’an dernier d’approuver l’idée et voté non à cette initiative, que nous avions soutenu en son temps.

C’est regrettable ! En effet, comme le disait à juste titre à l’époque Lizza Mazzone députée et présidente des Verts : « On a constaté que ménager la chèvre et le chou ne menait qu’à un blocage généralisé que tout un chacun déplore et qu’il s’agit maintenant de dépasser.» Ainsi l’affaire semblait claire, le peuple serait appelé à arbitrer entre chèvre et chou…

Mais la majorité de droite et d’extrême droite du parlement a entrepris de se soustraire à l’arbitrage populaire sur cette question, de crainte qu’il accepte l’IN 154, comme a été acceptée l’initiative sur la mobilité douce (IN 144).

 

 

Une mécanique bien peu démocratique

La manœuvre, démocratiquement fort discutable, a été la suivante :

 

  1. Engager les travaux sur un contre-projet à l’initiative pour éviter de poser dans les urnes la question simple du oui ou du non populaire à celle-ci.
  2. Eluder le débat de fond sur le principe proposé, en portant le débat sur un contre-projet, non plus de rang constitutionnel, mais de rang législatif. Possibilité discutable introduite par la constitution de 2012.
  3. Se saisir d’un projet de loi élaboré par le Conseil d’Etat pour en faire un contre-projet touffu, en y mettant toutes sortes de choses, en faveur des chèvres et des choux et des ménagements réciproques qu’ils se doivent.
  4. Conditionner quelques-uns des ménagements que les chèvres devraient au choux, au retrait par les Verts de leur initiative, sans consulter – évidemment ! – les plus de 10 000 citoyen·ne·s ayant signé cette initiative.
  5. Le résultat des courses, si la manœuvre réussit, étant que le peuple ne sera pas consulté du tout, puisque le contre-projet cessera d’en être un au moment du retrait de l’initiative, pour devenir une loi ordinaire et que le peuple ne sera alors appelé aux urnes que si un référendum était lancé et aboutissait…

 

Cette manœuvre est discutable. Mais les Verts ont entrepris de s’y risquer et de troquer leur initiative contre une série de dispositions législatives, certaines intéressantes, d’autres problématiques. Mais un amendement de dernière minute est venu infléchir le projet vers la droite et a emporté la position du groupe Ensemble à Gauche en faveur du refus du contre-projet.

 

 

La traversée du lac refait surface

Alors que jusqu’au 12 octobre dernier, le contre-projet en chantier évoquait « l’attente d’une éventuelle réalisation d’un bouclement autoroutier » (en clair une éventuelle traversée autoroutière du lac… la sous-commission a voté majoritairement en faveur de « l’attente d’un bouclement autoroutier par une traversée du lac.»

Cet imposition arrogante de dernière minute, est scandaleuse, alors que dans un esprit de compromis, on aurait pu imaginer le retrait simultané de l’initiative des Verts pour la priorité aux TPG d’un côté et le retrait de l’initiative PLR pour la traversée du lac de l’autre… on a une situation où :

 

  • La majorité des partisans du contre-projet soumis au parlement exige le retrait de l’initiative des Verts avant qu’elle ne soit soumise au peuple, en menaçant, sinon, de durcir encore le texte du contre-­projet.
  • Cette majorité exige par contre que la grande traversée du lac proposée par l’initiative PLR soit inscrite comme fait acquis dans la loi avant que la question ne soit soumise au peuple. Ainsi, même si l’initiative PLR était rejetée, ladite traversée que le gouvernement voudrait financer par un prétendu « partenariat » public-privé serait toujours inscrite dans la loi.
  • En outre, aux chapitres des initiatives toujours, ce contre-­projet comporte des modifications législatives significatives qui réduisent (avant qu’elle n’ait été mise en œuvre) la portée de l’IN 144 « Pour la mobilité douce…» ceci en réduisant et en diluant les exigences précises qu’elle a inscrit dans la loi du fait de son acceptation par le peuple, ceci sans que ses auteur·e·s ne soient même consultés ou entendus.

 

Ce tour de force antidémocratique appelle le rejet du contre-projet et aurait dû suffire à l’AG des Verts pour maintenir leur initiative, sans parler d’autres problèmes dans le contre-projet (v. le rapport de minorité EAG sur le site du parlement : ge.ch/grandconseil/data/texte/IN00154C.pdf). Mais le 24 novembre, les Verts décidaient le retrait de l’IN 154, au profit d’un contre-projet « en-deça de ce que la population est en droit d’attendre » selon leur communiqué !

Pierre Vanek