Budget cantonal 2016

Budget cantonal 2016 : Conseil d'Etat démission!

Le projet de budget présenté par le Conseil d’Etat se déclinait sur un air connu. Cela fait près de 30 ans qu’on l’entend: «il faut réduire les dépenses de l’Etat», «les salarié·e·s du public sont des privilégié·e·s», «c’est à eux de faire des sacrifices».

Un tour de passe-passe  visant à ne pas parler des véritables privilégié·e·s, dont les fortunes croissent de façon indécente : selon le magazine Bilan du 15 avril 2014, près de 1000 contribuables genevois déclaraient ainsi une fortune supérieure à 10 millions ! Or Rousseau écrivait : «C’est par les impôts qui soulagent le pauvre et chargent la richesse, qu’il faut prévenir l’augmentation continuelle de l’inégalité des fortunes». A contrario, la droite genevoise travaille par ses cadeaux fiscaux aux privilégiés à l’augmentation continuelle des inégalités.

Dans le même sens, le Conseil d’Etat a proposé de couper dans les prestations aux plus fragiles, aux précaires, aux personnes âgées, aux malades, aux chômeurs·euses, aux working poor, à la jeunesse en formation, à la culture…

 

 

Des propositions de recettes…

Comme l’a rappelé notre camarade Jean Batou, au moment du débat budgétaire, il aurait fallu au contraire réévaluer les recettes de l’Etat et répondre aux besoins de la population. Dans ce sens, EAG a envisagé par exemple – en urgence dans ce débat budgétaire – de proposer un deuxième centime additionnel pour les soins à domicile, qui serait venu s’ajouter au premier centime introduit il y a maintenant 23 ans… permettant de garantir 26,5 millions supplémentaires à l’IMAD, particulièrement en souffrance ; quelques centimes supplémentaires sur les personnes morales auraient permis aussi de défendre les prestations sociales et les services publics.

Mais nous reviendrons à la charge sur l’imposition des plus riches en début d’année prochaine en défendant notamment la suppression, pour les hauts revenus, de l’abattement de 12 % sur l’imposition des personnes physiques, mais aussi en proposant une taxation progressive des personnes morales, plutôt que de leur faire de nouveaux cadeaux fiscaux avec la RIE 3.

 

 

Un mouvement syndical et social sans précédent

Le 3 décembre, une délégation du groupe parlementaire d’EAG était reçue par le Conseil d’Etat genevois. A l’issue de l’entretien nous réaffirmions notre «soutien sans réserve au mouvement exceptionnel de la fonction publique genevoise, non seulement en défense de ses conditions de travail et de salaire, mais aussi et surtout en défense des services publics et des prestations sociales dont la population a besoin.»

Nous avons bien sûr rappelé les motifs de non-entrée en matière sur ce budget : refus du Conseil d’Etat de respecter les mécanismes salariaux, refus de chercher des recettes fiscales nouvelles… sacrifices demandés à la fonction publique et à ses usager·e·s, plutôt qu’aux privilégiés. Situation de nombreuses entités en difficulté : Hospice Général, IMAD, Fondation officielle de la Jeunesse, etc. pour lesquelles les montants alloués, avant même les coupes linéaires, étaient déjà largement insuffisants.

 

Manifestation contre les coupes budgétaires, 16 décembre 2015 . Demir Sönmez

 

Un Conseil d’Etat sans foi ni loi

Mais si la délégation d’EAG a insisté sur la nécessité de débloquer la situation en tablant sur des recettes qui mettent à contribution les privilégiés, elle a aussi souligné que le Conseil d’Etat devait prendre ses responsabilités comme employeur, après avoir provoqué la grève et les manifestations les plus importantes que notre canton ait connues depuis des décennies, et faire des propositions acceptables au personnel mobilisé et à ses organisations représentatives pour déboucher sur un accord. Dans ce sens, nous avons souligné que ce n’était pas avec les partis d’abord, que le gouvernement devait discuter, mais avec le personnel et ses représentant·e·s !

Or si le Conseil d’Etat a bien signé in extremis un accord avec le Comité unitaire de la fonction publique, il lui a tourné le dos dans les heures qui suivaient, en ne tentant même pas d’intervenir en faveur de son respect par les député·e·s.

Pour ne prendre qu’un exemple, la « mesure 71 », incarnée par le PL 11722 – qui prévoit de voler plus de 7 millions par an aux fonctionnaires à l’engagement en leur déduisant automatiquement deux annuités – fait partie des points sur lesquels le Conseil d’Etat s’était engagé à travailler «à l’adoption d’un budget qui tienne compte de la proposition»… de supprimer cette mesure, parmi d’autres ! Or le gouvernement pouvait sans autres retirer ce projet de loi connexe au budget, dont il était l’auteur, projet contraire au deal passé avec la fonction publique. Il ne l’a pas fait manifestant ainsi son mépris de la parole donnée.

Sur un autre front, le Conseil d’Etat n’a même pas réussi à convaincre la droite de voter son projet de loi visant à limiter les déductions de primes d’assurance-maladie complémentaires, privant ainsi son propre budget de 35 millions environ de recettes…

Sept jours de grève de la fonction publique, soutenue par de nombreux usager·e·s, et un vote presque unanime du Grand Conseil, y compris de tous les député·e·s de tous les partis gouvernementaux, contre son budget. Voilà le prix de l’incurie de ce gouvernement. Une telle incurie devrait-elle pas raisonnablement l’inciter à présenter sa démission collective?

Pierre Vanek

 


Dernière minute

C’est avec 20 000 signatures environ, soit près du triple du nombre de paraphes légalement nécessaires, recueillies et déposées ce 23 décembre, bien avant le terme du délai légal, que les organisation syndicales du secteur public et la gauche, dont solidaritéS, ont fait aboutir leur référendum contre le Personal Stop, arme de destruction massive du service public, mise en joue contre les prestations à la population par la droite genevoise. Un résultat qui manifeste un large soutien populaire et augure bien des mobilisations à venir en début d’année sur ce front.