Neuchâtel

Neuchâtel : Les syndicalistes sont acquittés!

Les syndicalistes du SSP et de Syna ont été largement acquittés dans le cadre du conflit de l’Hôpital de la Providence à Neuchâtel. La Fondation de cet hôpital et le groupe Genolier avaient déposé des plaintes pénales pour violation de domicile et diffamation, à la suite de la grève de 2012-2013. Pour rappel, afin de rendre l’établissement plus rentable pour son acquéreur (le groupe Genolier), La Providence avait dénoncé la convention collective de travail (CCT-santé 21). Bonjour le partenariat social, tant vanté en Suisse!

Il s’agit d’un jugement important pour la liberté syndicale: les juges ont reconnu le caractère licite du piquet de grève tenu durant quatre jours et demi sur le parking de l’hôpital, reconnaissant que le droit d’accès dans l’exercice d’une lutte syndicale prenait ici le dessus sur le droit à la propriété privée. Une décision qui est notamment justifiée par le caractère particulier de ce conflit, touchant au domaine sensible de la santé et dans lequel l’employeur avait rompu la paix du travail de manière unilatérale. De plus, la direction de La Providence avait fermé la porte au dialogue et exercé des pressions fortes sur les employé·e·s.

Dans ce cadre, le piquet de grève a été jugé comme une réponse proportionnée, destinée entre autres à informer les collègues et usagers et usagères de la situation directement sur le lieu de travail. Quant aux plaintes pour diffamation concernant des termes utilisés dans les tracts, seules quelques infractions ont été retenues, mais aucune n’a été sanctionnée, encore une fois à la lumière du caractère particulièrement tendu du conflit.

Cette décision cruciale crée une jurisprudence importante et facilitera sans doute les luttes à venir. Toutefois, elle n’effacera pas les dures conditions posées à la lutte syndicale en Suisse, et notamment à la grève. Le caractère licite du piquet de grève a été reconnu dans un contexte d’attaque brutale de la part de l’employeur. Si le conflit avait été moins dur, si les enjeux avaient été différents, si les travailleurs et travailleuses avaient été les premiers, même de manière légitime, à rompre la paix du travail, le tribunal aurait-il porté le même jugement? On est en droit d’en douter.

En outre, la faiblesse de la protection des salarié·e·s continuera d’entraver le combat syndical. Pour rappel, 22 des grévistes de La Providence avaient été licenciés pour «grève illicite», ce qu’ils n’avaient pas manqué de dénoncer devant les tribunaux. Or, la législation suisse ne prévoit pas de réintégration pour des employé·e·s licenciés abusivement, l’employeur s’exposant tout au plus à devoir leur payer quelques mois de salaire.

Le combat pour les droits syndicaux et pour la protection des salarié·e·s en lutte pour leurs conditions de travail continue donc. Le courage des employé·e·s de La Providence et le mouvement de solidarité qu’il a engendré n’ont pas permis le maintien de la CCT 21, face à la toute-puissance d’un groupe Genolier largement soutenu par le Conseil d’Etat. Leur lutte aura pourtant permis d’ajouter une pierre solide au maigre édifice des libertés syndicales en Suisse.

Marie Nozière


Des deux côtés de la barricade…

Lors de la grève des employé·e·s de l’Hôpital de La Providence (Neuchâtel) et du procès intenté à quatre secrétaires syndicaux, ceux-ci étaient défendus par Me Christian Dandrès, député socialiste au Grand Conseil genevois.

La fondation La Providence (qui avait déposé plainte pour violation de domicile et diffamation) était défendue par Me Michel Bise, député socialiste au Grand Conseil neuchâtelois!

D’autres épisodes (la nomenclature en serait longue) montrent que Me Michel Bise n’est pas seul à avoir sauté la barrière. Récemment, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga (incarnant la xénophobie d’Etat «suave») inspectait la frontière avec l’Italie et préconisait la fermeté envers les réfugié·e·s qui s’y pressent. D’autres membres du PS (comme le conseiller national Carlo Sommaruga) sont venus constater la situation déplorable de ces réfugié·e·s.

Il y a des socialistes de droite et des socialistes de gauche. Comment ces derniers peuvent-ils encore coexister avec les premiers dans le même parti?

Hans-Peter Renk