Toujours aucune volonté contre les faillites frauduleuses

Une motion tente de relancer le débat sur les faillites en cascade. Elle demande à ce que le registre du commerce puisse refuser l’inscription d’une nouvelle entreprise si l’un·e de ses responsables a été impliqué dans une société ayant fait faillite durant la dernière année écoulée.

Les faillites en cascade désignent un vieux fléau contre lequel les syndicats essaient de lutter. Concrètement, il s’agit de liquider une société pour ne pas avoir à honorer ses dettes, puis d’en ouvrir une nouvelle sous une autre raison sociale, afin de continuer son activité, et ainsi de suite. Les principales victimes des patron·ne·s fautifs? Ce sont les travailleurs·euses à qui l’on ne paie pas tous les salaires et pour lesquel·le·s les cotisations sociales ne sont pas prélevées. Ce manque à gagner sur les assurances sociales a aussi un impact sur la collectivité dans son ensemble: via le chômage, celle-ci indemnise les lésé·e·s pour des salaires impayés. Finalement, et c’est la seule raison que la droite invoque dans ce débat, les faillites en cascade relèvent de la concurrence déloyale.

Des fraudes sans sanction

Actuellement, les lois pour lutter contre les faillites frauduleuses sont difficiles à faire respecter. La plainte pénale mène rarement à une sanction, tant il est compliqué de prouver que la violation est «manifeste et indiscutable». C’est particulièrement flagrant dans les secteurs les plus touchés par ces pratiques, comme l’hôtellerie et la restauration ainsi que la construction, dont les employé·e·s sont quotidiennement laissés sur le carreau malgré les démarches pour réclamer leur dû. Ainsi, cette nouvelle motion apparaît comme un outil permettant de lutter contre cette forme particulière et courante d’abus patronaux que sont les faillites en cascade. En visant directement l’activité économique d’individus, elle met face à leurs responsabilités des patron·ne·s qui empochent personnellement des bénéfices en se cachant derrière des raisons sociales.

Des responsabilités diluées

Reste à voir si la proposition se concrétisera, et quelle forme elle prendra. Les discussions parlementaires sur le sujet n’ont jamais réussi à régler le problème. Et si la droite s’engage aujourd’hui sur cette question, les syndicats sont en droit de douter de ses intentions, dès lors que même de grosses entreprises se défaussent systématiquement de leurs responsabilités et possèdent une armada de juristes prêts à rendre l’application des lois impossible. Une chose est sûre: les luttes syndicales emblématiques sur ces questions n’ont à ce jour pas encore permis de modifier le rapport de force en faveur des travailleurs·euses. Sans un cadre légal véritablement solide et des relais politiques, les lésé·e·s se retrouveront encore sur la paille.

Mila Morena